Un soleil qui baigne avec générosité la terrasse du kiosque de la gare de Becon-les-Bruyeres, quelques habitués attablés qui goûtent le plaisir indicible d’un bonheur ordinaire au parfum de volupté (rien que ça !), des passants qui passent - reconnus par les habitués -, des sujets de conversations éclectiques (les gros cubes, les naturistes libertins des dunes de l’île de Ré, l’ouverture possible d’une sex-Shop côté Asnieres, un propagandiste de Zemmour qui rôde, la meilleure façon d’enfiler un suppositoire, la recette du chevreau à l’aillé, …), voilà le menu du jour des chroniques du centre de l’univers (et, tout ça en moins d’une demi-heure !).
J’informe Jean-Michel que la lecture de quelques passages du livre d’Olivier m’a passionné. Le paragraphe traitant de la « servitude volontaire » (concept développé par le jeune Etienne de La Boetie alors qu’il ne devait avoir que 16 ou 18 ans, et qui date de 1576 dans sa version intégrale en français) m’a particulièrement intéressé. J’ai, en effet, souvent croisé dans mon activité professionnelle, que ce soit en ingénierie ou en architecture, des personnes qui présentaient tous les attributs de « l’esclave volontaire », comme j’aime à les désigner. Soumis par destin à une autorité supérieure.
On a retrouvé Philippe et Martine qui semblaient avoir déserté le kiosque deux ou trois jours de suite (manquent pas de toupet, ceux-là !). On me souffle que Jacques Pradel a donné un coup de mains dans la recherche des déserteurs.
Seule ombre à ce tableau idyllique : le dos du Passeur.
J’ai aperçu « Casse-bonbons » se trémoussant tout en révélant à Jean-Michel une probable évidence que tout le monde ignore ; un truc comme : « il ne faut pas confondre le porc et le jambon ».
J’ai découvert des habitués de rang 2 qui semblent ne pas manquer d’intérêt : un homme revêtu d’une combinaison en laine imprimée camouflage, une petite dame d’un certain âge pleine d’humour qui lance à la volée « bonjour les chippendales » à destination des messieurs, et une jeune femme discrète qui répond très aimablement à la question « est-ce que ça va ? » par un « oui, ça va » qui nous rassure tous.
Pascal est en verve. C’est vrai qu’il a retrouvé sa casquette… Il nous raconte ses exploits du temps où il était biker operationnel au guidon d’une Vmax débridée qui caracolait sur l’A6 avec des 240 km/h au compteur, et ses courses-poursuites avec les motards de la gendarmerie. Une parenthèse s’ouvre dans le propos : les CRS picolent ; davantage que les pompiers qui s’en mettent des bonnes aussi ? Fermer la parenthèse.
« Faut que j’aille préparer mon chevreau à l’aillet », dis-je à mes amis. Martine, curieuse, me demande comment je le prépare. Je tente de l’informer. Pascal me conseille de faire cuire les pommes de terre qui l’accompagnent avec de l’ail et du persil. J’apprends incidemment que Philippe n’aime pas le gibier, mais aussi qu’il y a un certain François, un barbu, petit et plutôt maigrichon, qui recrute dans les parages pour Zemmour. Philippe s’est frité avec lui, un jour où le zemmourien l’a traité de ventru (ou équivalent). A présent le facho évite la terrasse du centre du monde.
Rien d’autre aujourd’hui ou presque. C’est ainsi que les hommes vivent.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire