mercredi 30 novembre 2011

Equerre d'argent 2011 (la vraie !)

La tour Bois-le-Prêtre (17ème)
(recyclage d'un article paru en aout dernier ici-même)

Construite entre 1959 et 1961 par Raymond Lopez, cette tour de logement a fait l'objet d'une rénovation en 2010 par Frédéric Druot et l'agence Lacaton-Vassal (Grand prix d'architecture 2009). L'immeuble est caractéristique de la production de Raymond Lopez et de la période de la reconstruction au cours de laquelle il était fait appel à des systèmes constructifs industriels, préfabriqués, assemblés sur une trame standardisée.
AVANT

APRES

La tour Bois-le-Prêtre a reçu l'Equerre d'Argent 2011, prix décerné chaque année par un jury dont les membres (architectes, maîtres d'ouvrage, critiques, ...) sont choisis par la Direction d'AMC, le magazine spécialisé en architecture du Moniteur du BTP.
Le prix honore à la fois la qualité architecturale et la démarche du maître d'ouvrage.

Le principe de la "métamorphose" a consisté en :
1) l'ouverture des baies existantes
2) le rajout de balcons de 3,00m de profondeur
3) la réalisation de jardins d'hiver.
La chirurgie esthétique a permis à cet immeuble banal de 16 niveaux de retrouver une image décente.
Les charges (sans doute de chauffage ?) ont été divisées par deux.

Les regrets (sauf à apporter la contradiction positive) :
1) des matériaux "cheap" (baies coulissantes des jardins d'hiver en plastique sur cadres galvas, re-plastique pour la cage d'ascenseur "panoramique")
2)le revêtement aux teintes criardes des parties communes
3) les rideaux (imposés ?) des baies vitrées en maille métal imitant les textiles amiantés des années 70
4) On peut s'interroger sur la pérennité de certains matériaux ; et donc de l'ensemble...


Témoignage d'un locataire : "C'est mieux maintenant, mais il y a quand même des "petites imperfections"..."

Cette opération est quand même intéressante à plusieurs titres :
1) Il s'agit d'une rénovation d'une tour de logement social dans Paris Intra-muros ; ce qui signifie une volonté de permettre à une classe de population disposant de revenus limités de rester dans Paris
2) Elle a été réalisée avec un budget "compétitif" ; c'est plutôt bien adapté à une période de crise
3) Plutôt que de démolir ces constructions vieilles d'une quarantaine d'années, il est démontré qu'il est possible d'en tirer un parti satisfaisant (même si on ne va pas se prosterner devant "l'oeuvre architecturale") ; en termes de développement durable, c'est plutôt positif (mais bof, le plastique et le galva...)

Moralité : il n'y a pas que dans les transports aériens qu'il y a du "low cost" ! Et pourtant, ça marche !

lundi 28 novembre 2011

Equerre d'Argent 2011


L'Equerre d'Argent 2011 n'a pas été décernée ce jour à Suzel BROUT pour sa résidence de jeunes travailleurs Denis Diderot à Paris (12ème). Maître d'Ouvrage RIVP. Et c'est dommage !
Ce très beau bâtiment, audacieux et juste, s'impose (sans indisposer) sur le boulevard Diderot aux confins de la Place de la Nation. Enveloppé dans une vêture métallique au calepinage précis, doté d'une modénature de façade qui renouvelle les postures aléatoires, coloré sans outrances, cet ensemble d'une dizaine d'étages constitue un exemple d'architecture contemporaine de qualité. Par ailleurs, son usage - une résidence de jeunes travailleurs - constitue à lui-seul un sujet pertinent dans le champ d'études de l'habitat urbain.
Et en plus, après enquête, les résidents en sont satisfaits !

Artem non odit nisi ignarus

"L'art n'est odieux qu'à l'ignorant", c'est la devise inscrite au fronton de pierre du Pergamon Museum de Berlin et dont j'ai retrouvé la traduction en quelques secondes grâce à internet. (et si "internet" n'était odieux qu'à l'ignorant ?)

dimanche 27 novembre 2011

Neues Museum de David Chipperfield à Berlin


Certains bâtiments connaissent plusieurs vies. C'est le cas du Neues Museum de Berlin ouvert en 1855 dans l'île aux Musées, et qui fut laissé au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, et pendant 70 ans, dans un état de quasi-ruine. Dans les années 90, les deux Allemagne s'étant réunifiées, le projet de le reconstruire fut adopté. Et c'est en 2009 que le "nouveau" Neues Museum, rénové par l'architecte britannique David Chipperfield, pu offrir à nouveau la contemplation de sa magnifique collection égyptienne dont la pièce maîtresse est le célèbre buste de la reine Néfertiti, épouse d'Akhétanon, vieux de plus de 3.300 ans, dont le modelé, le rendu de la peau, le port de la tête sont d'une telle perfection que si le visage s'animait subitement, nous n'en serions peut-être pas surpris.

Le choix de Chipperfield n'a semble-t-il pas été simple. De nombreuses "autorités" ont milité pour une reconstruction à l'identique du musée ; aspect extérieur, mais également restitution des salles dans leur état originel, c'est à dire chargées de toute la décoration "historiciste" en vogue dans la seconde moitié du 19ème siècle. Une autre école, à laquelle appartenaient le directeur du Staatlich Museum et tous les directeurs du Neues Museum, défendait le projet de Franck Gehry, sans doute plus radical, avec l'espoir d'une répétition du désormais fameux "Syndrome de Bilbao".

L'approche de Chipperfield a consisté à ne pas opposer patrimoine et modernité, et à développer le concept du palimpseste appliqué à l'architecture. Il s'est attaché dans son projet à composer avec la mémoire du lieu, les absences, les vides, les blessures du temps. Il a cherché à remettre au coeur du projet les oeuvres elles-même - servies par une muséographie d'une très grande délicatesse - davantage que le spectacle des espaces qui les accueille.

Il justifie l'ensemble de son travail pour le Neues Museum en prenant l'image d'un vase antique dont il ne reste que quelques fragments, qui seront reliés par une pâte de plâtre (neutre) sans volonté de réinterpréter, ou pire, de répliquer l'oeuvre, mais juste avec l'intention de donner à imaginer la substance et la beauté originelle de celle-ci.
La "pâte de plâtre" est ici un béton bouchardé (ou polymérisé ?) d'une couleur sable assez claire, qu'il décline également pour les parties structurelles neuves composées d'éléments préfabriqués (poteaux, poutres et dalles de plancher). Dans ces dernières, on retrouve la rectitude de l'écriture de Chipperfield ; laquelle s'exprime pleinement dans le nouvel aspect du hall central dont la composition géométrique d'origine, assez raide, a été conservée, livrant un espace d'une très grande sobriété - qui peut confiner au dépouillement -, et dans lequel la seule concession à une modernité affichée correspond au plafond, composé d'un assemblage orthonormé de très grandes poutres en bois, inspiré des charpentes de certains temples japonais du 12ème siècle.

L'expression de Renzo Piano considérant que "l'architecture est un art contaminé" prend toute sa pertinence dans le Neues Museum de son confrère Chipperfield.
Pour les architectes soucieux d'approfondir leurs connaissances en stratégie de concours, ils peuvent aller consulter l'article de "The Independant" en date du 13 novembre 1997 de la journaliste Nonie Niesewand : une leçon !

vendredi 25 novembre 2011

A saisir

France Inter, ce matin. Invité Elie Wiesel, seul écrivain Prix Nobel de la paix, déporté à Auschwitz à 15 ans, rescapé, miraculé. Il évoque une "anecdote", un "détail de l'Histoire" probablement, que je connaissais, mais qui est d'une portée incommensurable : un nazi dit un jour à un déporté ; "je te laisse en vie, et tu me maudiras chaque jour, car quand tu raconteras ce que je t'ai fais, personne ne te croira !"

Toujours France Inter, toujours ce matin. Le joueur de foot le mieux payé du championnat gagne 360.000 € brut par mois. Il faut se rassurer pour les autres : un bon nombre ne sont qu'à 250 ou 300.000 !
Plus de 260 fois le smic !
Reiser disait quelque chose comme ça : "je déteste le foot, ce sport où des millions de pauvres regardent et applaudissent 22 millionnaires qui poussent un ballon !"

jeudi 24 novembre 2011

Patrimoine(s) Tous conserv(n)és ?


Titre d'une table-ronde organisée récemment à l'initiative du magazine "Architecture d'Aujourd'hui" ("AA" pour les connaisseurs) sur la question du patrimoine, de sa protection, écartelé entre les conservateurs à tout crin et les adeptes de la "tabula rasa", (sur ?)protégé par une réglementation imparfaite (normal : dura lex sed lex !). Qu'en tirer d'essentiel ? Une unanimité de la tribune pour rappeler qu'il était absurde d'opposer patrimoine et modernité. Un contraste saisissant d'épaisseur dans les discours des intervenants : l'invective, l'ironie ou l'agression verbale (plutôt chez les architectes) ne pèsent finalement pas lourd face à l'argumentaire construit, étayé et calme (chez un docteur en histoire de l'art et de l'architecture). Et puis surtout la prise de parole de Claude Parent, relatant l'anecdote de sa rencontre avec l'évêque à propos de son église de Nevers qui, si elle n'est pas consignée quelque part (l'anecdote... et par exemple, ici !) risque d'être oubliée. C'est peu de dire que Sainte Bernadette fit - et fait sans doute encore - polémique. Cette église, coincée dans un territoire peuplée d'immeubles sociaux, évoque à première vue un bunker. Je laisserai à chacun son jugement sur l'édifice. J'espère pouvoir revenir dans ses lignes apporter mon point de vue ; mais ce sera après l'avoir visitée, évidemment. Revenons à l'anecdote. Donc, Claude Parent face au "Monseigneur" qu'il décrit grand, baraqué et portant soutane (nous sommes dans les années 60). L'église est construite. Notre architecte iconoclaste et néanmoins académicien (un oxymore à lui tout seul), s'attend à passer un quart d'heure moyennement sympathique, tant la levée de boucliers a été quasi unanime. Et voilà l’ecclésiastique qui lui dit : "il y avait tant de gens qui étaient contre votre projet, tant de choses épouvantables dites à son sujet, que je me suis dit : si je la fais, il se passera des choses dedans, c'est évident !". L'auteur de Sainte Bernadette souligne qu'à chacune de ses visites dans l'église, il a découvert une "chose" qu'il n'avait absolument pas imaginée lors de sa conception ; et de faire glisser le propos vers la question de l'autonomie d'une œuvre ; question fondamentale, en guise de remède contre l'ego (démesuré) de la plupart des architectes...

mardi 22 novembre 2011

Veinard(e)s

On a (presque) tout changé à droite !*

* il était temps !

Topographie des terrors


C'est le nom du bâtiment-exposition édifié à l'endroit-même où se trouvaient les bâtiments qui ont abrité, de 1933 à 1945, le siège des services qui ont mis en oeuvre l'horreur nazie (Gestapo, QG des SS, Sécurité du 3ème Reich, etc. ...).
Le bâtiment se présente comme un très grand parallélépipède métallique creusé en son centre d'un patio rectangulaire, légèrement surélevé par rapport à un terrain paysagé uniquement d'une caillasse sinistre rappelant les cailloux brisés à coups de pioches et de masses par les déportés. Le dessin des modules de façades - tous les mêmes - est minimal, mais parfaitement juste. L'ensemble donne une impression de retenue, de discrétion, qui correspond bien à la symbolique du lieu*.

Dans l'espace intérieur est installée une exposition présentant, à grands renforts de photos, les acteurs du nazisme ; principalement les bourreaux mais également les victimes. Les visages des premiers ne sont pas particulièrement monstrueux, même si, sur certains, on ne peut s'empêcher de détecter les marques de la lâcheté ou de la perversité (voir le poème de Léonard Cohen sur Eichman).

Surtout, on est stupéfait de constater que certains individus particulièrement épouvantables, responsables de tueries ou d'actes de barbarie, n'ont écopé que de quelques années de prison au terme desquels ils ont été libérés pour "bonne conduite", et recyclés sans problèmes dans la société allemande.
Enfin, l'exposition montre à quel point, même si l'Allemagne a eu ses héros, le nazisme a pu contaminer une large partie de la population.
Cette exposition interroge : sur la montée actuelle des extrêmes (et en Allemagne aujourd'hui, le nazisme suscite encore, tristement (de plus en plus ?), des vocations !), sur le courage qu'il faut aux allemands pour affronter le fait que la génération de leurs parents ou grands-parents furent celles qui accompagnèrent le régime hitlérien, de son ascension jusqu'à sa débâcle sanglante.
Aurions-nous le courage de faire un "Musée de la collaboration" ?
* l'architecture du bâtiment est l'oeuvre d'Ursula Wilms, de l'agence berlinoise Heinle, Wischer & Partner)

Collection Boros à Berlin : le bunker



Cette collection privée d'art contemporain est installée dans un ancien abri géant anti-aérien de la seconde guerre mondiale qui pouvait contenir jusqu'à 4.000 personnes. Edifié en 1942 sur des plans d'Albert Speer, le bâtiment à l'allure monumentale est couronné d'un attique néo-renaissance et coiffé du penthouse du collectionneur. Les murs, épais de 2 à 3 m, ont été percés à de rares endroits afin d'y créer une fenêtre (partie intégrante d'une oeuvre exposée), et une cage d'escalier + ascenseur afin d'accéder à "l'étage propriétaire" (privé).
C'est à l'architecte Jens Casper de l'agence Realarchitektur que le publicitaire et collectionneur Christian Boros a confié le soin de transformer ce lieu invraisemblable, constitué de cellules en béton armé au plafond bas, en un espace digne d'accueillir une galerie accessible au public d'amateurs.

Le travail de l'architecte est particulièrement réussi. Il est parvenu à dégager des perspectives dans lesquelles certaines oeuvres d'art déploient leurs interrogations. Quelques vestiges des installations de ventilation, des portes blindées habillées d'une rouille qui leur confère le statut d'oeuvre d'art, un ancien téléphone rappellent la vocation originelle du lieu.

La collection exposée est composée essentiellement d'oeuvres qui entrent en résonance avec l'espace. Joli travail de dialogue minimaliste et insolite entre art et architecture.
Attention : inscription obligatoire sur internet pour la visite guidée du "Bunker" !

Merci à CL qui se reconnaitra si elle vient jusqu'ici (ce qui est peu probable).

jeudi 17 novembre 2011

Tendance hiver 2011


Le retour de la rigueur (climatique et économique) risque de nous imposer des mesures radicales. Everybody Knows a testé pour vous une paire de chaussures qui, si elle peut paraître surprenante (uniquement pour les individus blasés), présente des avantages non négligeables : la surface de frottement de la patte d'éléphant vous assure une certaine stabilité (plus particulièrement sur un sol enneigé), et les vertus de la charentaise ne sont plus à démontrer.
Des grincheux prétexteront que ce port n'est pas altier ou seyant. Il ne s'agit que de grincheux (évidemment).

mercredi 16 novembre 2011

Un témoignage, une rencontre


Le témoignage c'est celui, terrifiant, de cette jeune femme de 22 ans qui fut pendant plusieurs années l'esclave sexuelle de Khadafi. A lire dans "Le Monde" daté d'aujourd'hui. A 15 ans, il la repère à l'occasion d'une manifestation de collégiens à la gloire du "Prince de Syrte". Il la fait enlever par ses "amazones" et lui dit, quelque part dans le désert où il a installé sa tente: "tu seras ma pute." S'en suivent 5 années de calvaire : "il continue à la réclamer deux ou trois fois par semaine. Toujours violent, sadique. Elle a des bleus, des morsures et le sein déchiré. Elle a des hémorragies. Gala, une infirmière ukrainienne, est sa "seule amie."

Une belle rencontre, celle du libraire de la librairie Henri IV à Paris (21, Bd Henri IV Paris 4ème). Le lieu sent bon le livre aimé. Il y a un modeste carré proposant des ouvrages sur l'architecture ; mais tous sont choisis. Le libraire aime l'architecture, aussi. Les lieux accueillent jeudi 17 (demain) une lecture d'extraits du livre "Jeanne et Marguerite" de Valérie Perronet (voir Everybody Knows du 10 octobre). Sans doute un très beau moment.

Trois ans aujourd'hui !

Et oui, déjà 3 ans, jour pour jour, qu'Everybody Knows existe ! Alors ? 10.975 visiteurs identifiés d'origines multiples (Par ordre de mérite : États Unis, Belgique, Canada, Allemagne, Suisse, Algérie, Tunisie, Pays-Bas, Russie, et bien entendu France en pôle position ; et ces jours derniers : Lettonie, Liban, Réunion, Espagne ; mais également : Palestine, Java, Chine, Slovaquie, ...), 575 textes, environ 700 pages A4, plutôt des commentaires de lecture et de visites d’œuvres architecturales, Cohen un peu délaissé, quelques commentaires sympathiques (mais rares ; normal : pas facile, quoi dire ?), peu de "coups de gueule", une inspiration très aléatoire (une faiblesse ces temps derniers par exemple, alors qu'il y aurait tant à dire : Dodo la Saumure, Khadafi, le triple A, Carlos,...).
A ce propos (inspiration en rade), on recycle ; texte originel d'Everybody Knows publié le 16 novembre 2008 :
Génèse

"A l'instant de créer ce blog, je me suis demandé : "mais que vais-je bien pouvoir inscrire comme premier message ?" Alors, assez naturellement, il m'est venu l'idée de saisir une Bible et de recopier un des passages de la Genèse qui m'apparaîtrait comme particulièrement adapté à cet instant. Et ce fut donc celui où Ève, en mangeant un fruit de l'arbre de la connaissance du bien et du mal, créé en quelque sorte la "vraie" humanité. C'est un hommage à la Femme. C'est aussi une distance par rapport au Dieu de la Bible. Je me suis arrêté avant que Dieu chasse Adam et Ève du Paradis terrestre afin de rester (et de commencer) sur une utopie.
"Or le serpent était le plus fin de tous les animaux des champs que l’Éternel Dieu avait faits ; et il dit à la femme : Quoi ! Dieu aurait-il dit : Vous ne mangerez point de tout arbre du jardin ? Et la femme répondit au serpent : Nous mangeons du fruit des arbres du jardin. Mais quant au fruit de l'arbre qui est au milieu du jardin, Dieu a dit : Vous n'en mangerez point, et vous ne le toucherez point, de peur que vous ne mouriez. Alors le serpent dit à la femme : Vous ne mourrez nullement ; mais Dieu sait qu'au jour que vous en mangerez, vos yeux seront ouverts, et vous serez comme les dieux, connaissant le bien et le mal. La femme donc voyant que le fruit de l'arbre était bon à manger, et qu'il était agréable à la vue, et que cet arbre était désirable pour donner de la science, en prit du fruit et en mangea, et en donna aussi à son mari, qui était avec elle, et il en mangea.
"

vendredi 4 novembre 2011

Nouveau monde Nouvelles idées


C'est le slogan du moment ; tout du moins celui qui s'affiche derrière les pupitres du G20 réuni actuellement à Cannes sous la présidence de notre président. Nouveau monde ? Ces deux mots résonnent dans notre imaginaire comme une promesse de bonheur. Le "Nouveau monde", n'était-ce pas ce continent américain que chacun, jadis, percevait tout à la fois comme une corne d'abondance et un espace immense des "possibles" ? Le "Nouveau monde" de 2011 a-t-il quelque chose de commun avec cette utopie du 19ème siècle ? Nous savons désormais que la corne d'abondance a un fond et que ses fruits se font à la fois plus rares, moins frais et surtout que si rien ne change il n'y en aura pas pour tout le monde ! Nous avons toujours beaucoup de peine à comprendre que le "tout est possible" de la société de consommation n'est qu'un mirage qui ne sert qu'à sans cesse nourrir l'illusion en même temps que les pouvoirs financiers qui l'entretiennent.
"Nouvelles idées" ? Force est de constater qu'elles ne sont pas encore disponibles dans les rayons du magasin de l'humanité. Les grandes théories politiques se sont épuisées à l'exercice concret du pouvoir ; le capitalisme tente de faire croire qu'il constitue encore l'unique planche de salut (comme celle posée sur le bastingage d'un navire de pirates du haut de laquelle les condamnés sont précipités dans la mer ?). Les valeurs humanistes, qu'elles soient portées par les religions ou les philosophies issues des "Lumières", ont été balayées par les nouvelles "valeurs" d'un matérialiste de charbonnier ; les trois piliers des consciences sont aujourd'hui la Communication (avec ses deux bras armés que sont la télévision et la publicité), le Commerce (avec ses fondamentaux : la Bourse et les Centres commerciaux), les Loisirs (j'existe car j'ai "fait" la Thaïlande ou les Maldives).
La tolérance est un concept presque obscène. La démocratie représentative est à bout de souffle.
Le "Nouveau monde" compte désormais 7 milliards d'individus dont 20% qui se goinfrent (pour combien de temps ?). Les "Nouvelles idées" font bruler les locaux d'un journal libre ou manifestent contre la représentation d'une pièce de théâtre, au prétexte du blasphème. Le "Nouveau Monde" continue à spéculer sur la misère de l'autre. Les "Nouvelles idées", c'est un printemps des peuples arabes rattrapé par l'ordre religieux. Le "Nouveau monde" s'est un monde qui continue à dépenser des milliards pour entretenir un arsenal atomique.
Une chose est certaine : plus personne ou presque ne peut croire que ceux qui défilent derrière les pupitres et devant ces mots "Nouveau monde Nouvelles idées" peuvent incarner ce slogan.
(Moralité : on ne peut pas être submergé d'optimisme tous les matins !)

mercredi 2 novembre 2011

Prix littéraires : on vous l'avait dit !

Extrait d'un commentaire que l'humble animateur de ce blog a posté lundi 31 octobre sur le site du Square Littéraire :

Blogger Pergame a dit...

Allez, je me lance :
- L'art de la guerre pour le Goncourt
- Limonov pour le Renaudot

Je n'ai pas lu le 1er, mais depuis l'été on ns dit que c'est super. J'ai le le second et, personnellement, j'ai beaucoup aimé.

lundi, octobre 31, 2011


Moralité : il faut lire les blogs sérieux !

Voir commentaires sur "Limonov" dans Everybody Knows daté du mardi 4 octobre, et annonce ce même jour - soit un mois avant l'annonce officielle - du très probable couronnement au Renaudot !

mardi 1 novembre 2011

Les souvenirs


Neuvième roman de David Foenkinos, figurant dans la 2ème sélection du Goncourt (mais viré de la 3ème !), "Les souvenirs" constitue le regard que le narrateur jette sur certains épisodes de son passé - la mort de son grand-père, la fugue de sa grand-mère, l'égoïsme de son père, la dépression de sa mère, le divorce raté de ses parents, son boulot de réceptionniste d'hôtel, son amour pour Louise, etc. ... - qui sont autant de fragments de sa vie qui lui ont permis d'être aujourd'hui ce qu'il est, et surtout ce qu'il va advenir ; c'est à dire, un écrivain. C'est une "auto-analyse" en quelque sorte. Résumé comme ça, c'est peut être un peu banal, voire trivial. Mais David Foenkinos parvient, avec de très belles images, des formules simples ("On devrait vieillir avec la beauté. Ou plutôt on devrait se soulager de la vieillesse par la beauté."), des rencontres au hasard de la vie, des infortunes ou des moments plus heureux, à nous faire partager tout un univers qui résonne en chacun de nous ; plus vraisemblablement chez les quadras ou même les quinquas que chez les plus jeunes.
Le récit est entrecoupé de petits textes "Souvenir de ..." qui correspondent à des souvenirs liés à d'autres personnes que lui (Mastroianni, Kawabata, une femme russe inconnue, Fitzgerald, ...), et qui sont autant de mises en perspective du récit. Ainsi il rappelle les propos de l'acteur italien pour qui "les souvenirs sont une espèce de point d'arrivée ; et peut-être sont-ils aussi la seule chose qui nous appartient vraiment." De Kawabata dont la famille connue plusieurs tragédies, il cite cette phrase extraordinaire que lui avait dite son grand-père : "Nous avons été frappés par la mort, et cela nous donne l'obligation d'aimer."