"La plus secrète mémoire des hommes", prix Goncourt 2021, du jeune romancier sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, est un livre immense dans lequel on s'imagine parfois perdu, mais l'auteur a pris soin, imperceptiblement, de nous remettre, dans cet univers littéraire piranésien, une pelote de fil d'Ariane qui permet au lecteur de parcourir le temps et l'espace comme un explorateur le ferait d'un pays oublié dans lequel les traces de civilisation et d'humanité interrogeraient chacun de ses pas.
Ici on tente de s'exercer à écrire sur l'architecture et les livres (pour l'essentiel). Ça nous arrive aussi de parler d'art et on a quelques humeurs. On poste quelques photos ; celles qu'on aime et des paréidolies. Et c'est évidemment un blog qui rend hommage à l'immense poète et chanteur Léonard Cohen.
mardi 30 novembre 2021
"La plus secrète mémoire des hommes", prix Goncourt 2021, du jeune romancier sénégalais Mohamed Mbougar Sarr, est un livre immense dans lequel on s'imagine parfois perdu, mais l'auteur a pris soin, imperceptiblement, de nous remettre, dans cet univers littéraire piranésien, une pelote de fil d'Ariane qui permet au lecteur de parcourir le temps et l'espace comme un explorateur le ferait d'un pays oublié dans lequel les traces de civilisation et d'humanité interrogeraient chacun de ses pas.
vendredi 19 novembre 2021
Copenhague, issue d’une famille pauvre, elle quitte l’école assez tôt ; en 1939 elle écrit pour le magazine littéraire Vild Hvede, « Blé sauvage ». Son enfance a très fortement influencé son œuvre. Elle s'est mariée et a divorcé quatre fois. Elle a écrit de nombreux romans, traduits dans plusieurs langues. Elle se suicide en 1976 par overdose de somnifère
sans cesse croisent mon chemin,
le premier est celui que j'aime,
le second m'aime.
Le premier est dans un rêve nocturne,
il réside dans mon esprit sombre,
l'autre se tient près de la porte de mon cœur,
je ne lui ouvre jamais.
L'un me donna un souffle printanier
de bonheur, vite enfui,
l'autre me donna toute sa vie
et n'eut pas en retour une heure.
L'un bruit dans le chant du sang,
où l'amour est pur et libre,
l'autre fait un avec le jour triste
où les rêves sont noyés.
Chaque femme se tient entre eux deux,
aimant, aimée et pure –
chaque cent ans cela peut arriver
qu'ils ne fassent plus qu'un.
Poème N°41 d’Alfredo Gangotena (1904-1944), poète équatorien qui fit ses études à Paris, quelques années aux beaux-Arts puis à l’Ecoles des Mines où il obtint son diplôme d’ingénieur. Il maîtrise parfaitement le français en seulement 3 années. Il fréquente Jules Supervielle, Max Jacob et Jean Cocteau. Il est proche de l’écrivain Henri Michaux.
Hémophile, il est d’une santé fragile. Retourné vivre dans les Andes à partir de 1928, il organise des manifestations contre le nazisme durant la guerre et effectue plusieurs interventions à la radio en faveur de la France libre.
Il meurt suite à une intervention chirurgicale à 40 ans.
dans la blancheur nocturne de mon
front.
Dans leurs haleines, mes mains : liquides
et transparentes du lait filtrant de
cet appel.
Mon Amour, je t'attends dans la totalité pure
de ta présence.
Et la porte dans la nuit s'ouvrit, soudain,
d'un solennel battant,
qu'elle laissa, par cette veillée lugubre, en mon cœur s'épandre tout
le sang de ta beauté.
Et tes seins sur moi ! et leurs soies lunaires
répandirent une telle étrange blancheur sur moi.
Dans l'aile liquide de ma chair, sur
moi :
à me ravir l'esprit, l'espace et
la durée,
ô larmes ! à en mourir.
Poème N°42 "Veines sauvages" du poète sénégalais Amadou Lamine SALL (1951). Léopold Senghor a dit de lui qu’il était le poète le plus doué de sa génération.
Il est le Fondateur de la Maison africaine de la poésie internationale, et il préside aux destinées de la Biennale internationale de poésie à Dakar. Lauréat en 1991 du Prix du rayonnement de la langue et de la littérature françaises décerné par l'Académie française, il est l'auteur de nombreuses anthologies de poésie qui ont été traduites en plusieurs langues. (Source : Wikipédia)
(extrait)
Tu arrivais du nord
là où le soleil épuise ses
larmes derrière les barreaux du ciel
sur le dos des éclairs je sais là
où tu es descendue chanter
nouant tes cheveux aux épis de mil
et tu m'attends du coté le
plus divin de ton corps
là où les dieux ont fait
pousser la fraise dans la mangue
Tu es de ce pays
où les hirondelles ont bu tous les soleils
et le ciel toujours cambré de sommeil
Le vent lève ton nom… Boléro
et ta bouche et tes lèvres infaillibles
ont l'arome langoureux des
chemins de miel que j'aime
Je t'aime comme une guérison
j'aime ta gorge apaisante
la saison de ta bouche quand tu ris
j'aime la maison de tes yeux
tu réchauffes mieux que le ventre
de l'ours à midi
Tu es si belle que tu désamorces
la course des météores…
Tu es mon nouveau livre Boléro
les premiers hiéroglyphes d'un nouveau millénaire
....
Poème N°43 "Le quatrième jour"" de la poétesse slovène Barbara Pogačnik née en 1973.
Egalement traductrice, critique littéraire et organisatrice d’événements littéraires, elle a fini ses études de philologie romaine à l’Université Catholique de Louvain en Belgique et terminé son master à la Sorbonne – Paris IV.
Elle est l’auteur des recueils "Inondations" (2007), "Feuille de papier perdu dans la foule" (2008), "Le bleu recouvrant la maison" (2013) et "Alice au pays des manteaux" (2016). Ses poèmes figurent dans différentes anthologies, sont traduits en 32 langues et mis en musique.
Pèlerines blanches, entassées en une foule flottante,
murmurant entre chien et loup.
En cercles, rassemblées en un mur d’amphithéâtre.
Pèlerines blanches, gonflées par
le vent, qui prennent la couleur
transparente de la pluie. Pèlerines sans visages,
murmurant comme un peuple de sucre.
[trad. de G. Métayer]
vendredi 12 novembre 2021
Le style y est ciselé avec une précision minimaliste : souvent une succession de phrases "sujet-verbe-complément" dans lesquelles chaque mot "fait mouche". J'avais lu quelque part que le grand architecte Frank Llyod Wright avait pour habitude, en corrigeant les projets de ses élèves, de leur soumettre cette petite question : "Et maintenant : qu'est-ce qu'on enlève ?" Dans "l'Enfant réparé", il me semble qu'il n'y a rien à enlever. Tout est en place et à la juste place dans cette mise en abîme de la production littéraire de l'auteur.
Une nouvelle fois - après "Bellissima" et "Enfant de salaud", c'est le rapport au père que l'enfant devenu adulte interroge afin de tenter sa reconstruction ; un père que l'on pourrait haïr mais qu'il est probablement indispensable d'aimer pour vivre et oublier.
mercredi 10 novembre 2021
Je viens à l'instant de refermer la dernière page - la 384ième - de "Klara et le soleil", le dernier roman du Prix Nobel de littérature 2017, Kazuo Ishiguro, l'auteur de "Les vestiges du jour".
J'ai mis un peu de temps avant d'entrer véritablement dans le livre ; près d'une centaine de pages. Mais ma persévérance a été, je crois, récompensée : une impression de plénitude et d'un bonheur assez doux subsiste ; elle va assurément s'accorder avec la très belle journée qui s'annonce sur la Côte basque.
Klara n'est pas une jeune fille ordinaire. Klara n'est même pas une jeune fille, puisqu'elle est une "AA", c'est à dire une "amie artificielle", un robot. Mais un robot doué de sentiments, d'une générosité et d'une abnégation absolue qui peuvent la conduire jusqu'au sacrifice de sa "vie". Les AA sont destinées à se faire adopter par une famille en tant que "personne de compagnie". Et Klara se fait adopter par Josie, une jeune adolescente à la santé fragile qui vit seule avec sa mère divorcée dans une très belle maison tenue par une gouvernante. Tout à côté, mais dans une maison en mauvaise état et également seul avec sa mère, vit Rick. Josie et Rick s'aiment et se sont promis de partager plus tard leur vie. La mère de Josie, après de longues hésitations, a accepté d'adopter Klara car elle a un objectif précis et troublant pour le robot ; objectif que le lecteur découvrira dans la seconde partie du livre.
L'intervention du soleil avec lequel Klara a une relation toute particulière - le soleil fournit les robots en nutriment - apporte au roman une dimension fabuleuse au sens premier du terme ; à ce titre, le roman pourrait être classé dans une catégorie du type "conte futuriste".Certaines descriptions semblent anecdotiques, d'une précision qui parait inutile et qui donne au récit, surtout dans sa première partie, un rythme assez lent, incertain. Ce travail d'Ishiguro est loin d'être anodin : il parvient à traduire parfaitement la perception singulière de Klara dont l'attention se porte sur le moindre détail des objets et des personnes de son environnement. Une leçon pour nous-autres humains qui avons une tendance de plus en plus prononcée à nous cantonner dans le superficiel ?
(Publié sur mon compte FB le 7 octobre dernier).
C’est un premier roman d’un journaliste du quotidien breton, Le Télégramme. Il est écrit sans ponctuations à l’exception des points de fin de phrase et dans une langue « volcanique » selon le commentaire de la 4ème de couverture. Je la comparerais, cette langue, cette écriture, à un étonnant cocktail composé de grumeaux baignant dans un bouillon aux saveurs aigres-douces diffusant des odeurs tour à tour insupportables et délicates (peut-être aussi à une eau-de-vie dans laquelle seraient immergées des choses étranges).
Le narrateur est ce que la presse à sensations qualifierait de « monstre ». Il écrit depuis la cellule de sa prison. Il écrit sur cette vie qui est la sienne et qui a choisi pour lui de le faire naître de parents monstrueux.
Selon une formule qui, ici, prend pleinement son sens : on ne sort pas indemne de cette lecture. C’est un livre incroyable, d’une force « volcanique » (pour reprendre le terme du commentaire), avec des instants de grâce immenses et des passages sordides.
Enfant de salaud
(Article publié le 19 octobre dernier sur mon compte FB)
Si vous avez un boomer, plutôt mâle, dans votre entourage (et seulement si vous ne lui avez pas offert "Abuelo" ), voilà un super cadeau pour Noël !
Extrait (Jean Roscoff, le narrateur, visite à Etampes la maison assez minable du poète noir américain inconnu, Robert Willow, qui a émigré en France dans les années 50 et pour lequel il a décidé, afin de donner un peu de matière à sa retraite décadente, de reprendre un manuscrit écrit dans sa jeunesse ; lequel livre va le conduire à sa perte) :
"A l'heure dite, je me trouvais devant la porte cochère. L'agent immobilier était un jeune homme athlétique, qui ne devait pas avoir trente ans. Costume satiné, chaussures à bouts carrés, chemise bleue pétrole : il n'avait pas échappé à la malédiction esthétique qui poursuit tous ceux qui se lancent dans l'aventure immobilière. Il arborait un sourire forcé où perçait le désespoir. Il était évident que cette maison lui restait sur les bras depuis de longs mois, peut-être une année entière.
-On est partis ? lança-t-il avec un clin d'œil.
Il introduisit la clé dans la serrure puis s'arrêta, se tourna à demi et me glissa sur le ton de la confidence :
-C'est une perle, mais il faut savoir se projeter."
La critique de Télérama est pas mal ("entre Kafka et Courteline") :
https://www.telerama.fr/.../le-voyant-detampes,n6976388.php
Poème N°44, "La cabane", du poète géorgien Témour Chkhetiani, né en 1955.
Temour Chkhetiani est l’ auteur de huit recueils poétiques. Ses poèmes sont traduits et publiés en français, en anglais, en allemand, en suédois, en russe.
Il a traduit en géorgien des poèmes, entre autres, de Guillaume Apollinaire, d’ Arthur Rimbaud, de Michel Houellebecq, de Rainer Maria Rilke, et de Marina Tsvetaeva. Il est aussi compositeur de puzzles d'échec.
Nous nous sommes cachés de la pluie dans une cabane.
Avant cela, nous marchions ensemble dans la forêt ;
Nous regardions, écoutions tout avec joie.
Regardions les arbres et les fleurs,
écoutions le chant des oiseaux et le bruissement des feuilles,
nous étions si heureux de l’air frais, de l’eau claire et l’un de l’autre…
Nous nous sommes cachés de la pluie dans une cabane.
La pluie nous a suivis pas à pas et nous a mouillés,
Mais elle est restée à la porte
Et n’est pas entrée
Avec nous
Où notre rire battait
Contre les murs.
Puis nous nous essuyions
les cheveux, les yeux, les visages avec une seule serviettes.
Il pleuvait encore et la pluie faisait du bruit sur le toit de notre cabane
Et claquait à la porte.
Après cela, la nuit tombait mais nous pouvions toujours nous voir l’un l’autre…
Mais enfin en pleine obscurité
Tes épaules, tes seins, tes hanches éclairaient les ténèbres.
Il faisait frais, mais tes bras étaient chauds
Et tes lèvres étaient brûlantes,
Et dans la cabane le lit étroit en bois
Était large et doux…
Peu à peu, la pluie s’est tue.
La pluie nous a quittés et s’ en est allée.
Et nous nous écoutions nous respirer dans ce silence.
Et nous sentions battre nos cœurs
Et ensuite, peu à peu, il a commencé à s’éclaircir,
A travers une petite fenêtre de notre cabane, la lune baissa les yeux
Et chuchotant elle a partagé avec nous ce secret :
“-Il n’y a rien de mieux ni de plus important
Sur la terre”…
Maintenant nous nous réveillons dans des villes différentes,
Eloignées par des centaines de kilomètres,
Dans deux villes différentes.
.
Nous nous réveillons au même moment, mais seuls :
Nous ouvrons les yeux sans joie.
Nous levons nos têtes d’un oreiller sans joie,
nous nous levons sans joie.
Et nous nous habillons.
Dans le même temps mais loin l’un de l’autre
Nous ouvrons nos fenêtres dans des villes différentes.
C’est une journée ensoleillée dans les deux.
Nous regardons par la fenêtre
Et voyons de différentes images
Dans deux villes éloignées par des centaines de kilomètres,
Nous voyons différentes choses,
Mais nous pensons à la même chose,
Nous nous sentons les mêmes,
Et nous nous rappelons les mêmes choses :
Nous nous sommes cachés de la pluie dans une cabane.
(Traduit du géorgien par Ketevan Kokozashvil)
Poème N°45, "Un poème pour mon pays", du poète du Malawi Franck Chipasla, né en 1949.
Je n'ai rien à te donner, mais ma colère
et les filaments de ma haine traversent la frontière.
Toi, tu en as tant vendus et forcés comme moi à l'exil.
Maintenant à court d'esprits précieux, tu te reposes sur
tout ce qui peut pousser pour construire ton image qui s'effrite.
Tes rues sont jonchées d'hommes menottés
et tes tambours les bruits sourds des bottes à clous des gardiens.
tu te tortilles en agonie tandis que les jumeaux terribles, Loi et Ordre,
entonnent leur air à travers l'épais tunnel des fils barbelés.
Ici, semaine après semaine, les murs se dissolvent et maigrissent,
le brouillard s'estompe et nous te voyons nu comme
un corps qui se met à rude épreuve pour se retrouver, mais n'y parvient pas,
et nos cœurs battent avec des impulsions de peur ou de désir
et nos rêves sont les chapitres carbonisés de ton histoire.
Mon Pays, souviens toi que je n'ai jamais fermé l'œil ni dormi,
Mon Pays, je n'ai jamais laissé ta vie glisser sur la mauvaise pente
je ne t'ai jamais regardé passivement te hâter de t'écraser
comme un tacot surexploité tandis que le chauffeur s'éjecte en route.
Les jours ont perdu leur chanson et leur sel
nous nous ennuyons sans nos rires et nos voix libres,
chaque jour à méditer les mêmes choses et écarter nos espoirs.
Tes jours sont bruyants, avec le cliquetis des menottes
sur les bras des hommes qu'on emmène au loin pour les laisser pourrir.
Je sais qu'un jour viendra, qui nettoiera ma douleur,
et émergera dans la nuit, réduisant tout en miettes d'une chanson
comme le soleil, balayant enfin toutes ces étoiles mauvaises.
(Traduction de l'anglais par E. Dupas)
Poème N°46 "Une rencontre en 2000 dans le Grand Khingan" de la poétesse taiwanaise Hsi Muren née en 1943 dans le Sichuan, d'origine mongole, culture qui est devenue son thème de prédilection. Ses parents ayant émigré à Taïwan, c'est dans ce pays qu'elle reçoit une formation à l'Ecole des Beaux-Arts.
(Poème trouvé sur l'admirable blog "Terre à ciel - Poésies d'aujourd'hui")
leur demandais-je affolée
bouleaux drus élancés dont jouaient au vent d’automne
les feuillages découpés et denses
jetant leurs éclats d’argent vague ou d’or tiédi.
C’est bien peu de chose répondent-ils en riant
Jadis aux meilleurs jours d’exploitation
en une simple matinée nous pouvions avant midi
raser à blanc
branches géantes et troncs entrelacés de lianes et de sarments
de pins et camphriers mêlés une forêt trois fois séculaire
Ainsi ne reste plus ici que moi
et un pauvre renard perdu nous observant de loin
et sur la cime nue poursuivant
lui sa quête têtue moi le souvenir opiniâtre
d’un pays natal à jamais disparu.
(Traduction d'Emmanuelle Péchenart)
mardi 9 novembre 2021
Pablo Hernando est un architecte espagnol reconnu, peut-être même une « starchitecte », honoré par la prestigieuse médaille du RIBA et pressenti pour le Pritzker, l’equivalent du Prix Nobel en architecture. Et puis un jour, pour une raison incompréhensible, il descend d’un train à la gare de Pozonegro, une ville sinistré par la fermeture de sa mine, la Titane, et il achète dans l’urgence un appartement minable avec vue directe sur la voie ferrée. L’immeuble décati est occupé par 3 autres locataires dont Raluca, une belle jeune trentenaire, caissière au supermarché du coin, que l’arrivée de cet homme élégant et cultivé ne laisse pas indifférente …
Quel est le mystère que Pablo Hernando porte sur ses épaules comme un fardeau ? Quels sont ces « affreux » néo-nazis qui le font chanter ? Pourquoi cette volonté de tout abandonner au sommet de sa gloire ? Rosa Montero apporte la réponse à chacune de ces questions (et à plein d’autres) avec un sens du détail et de la digression (apparente) remarquable, dans un style vif qui entretient le suspens et décrit à merveille les situations et les personnages (on est dans l’appartement crasseux, on subit la canicule, on partage la trouille de l’architecte, …).
Et en plus, il y a une belle histoire d’amour ! (Que demande le peuple-lecteur ?)
Poème N°47 "Contre vents et marées" du poète haïtien René Depestre né en 1926 (94 ans).
Il s'opposa au régime des "Tontons macoutes", fut proche de Che Guevara et de Fidel Castro au régime duquel il reconnut des qualités dans son combat pour la décolonisation en Afrique ou l'abolition du racisme institutionnel à Cuba, mais dont il critiqua l'absence de liberté d'expression ce qui lui valut d'être mis à l'écart et en résidence surveillée. Il parvint à fuir l'île et s'installe à Paris en 1978. Plus tard, il se reconciliera avec Cuba, reconnaissant « des acquis sur le plan de la santé, de l’éducation, de l’émancipation des femmes", mais avouant : « C’est difficile, pour un poète, d’être un bon stalinien ».
Il a publié également des romans dont "Hadriana dans tous mes rêves" qui reçut le Prix Renaudot en 1988. Sa poésie fut couronné de plusieurs prix. Il poursuit son œuvre dans le village de Lézignan-Corbières, près de Narbonne, où il s'est installé dans les années 1980.
Je reste un virtuose de mes chagrins
quand s'abat sur mes souvenirs
le temps de la mère pluie de mon enfance
qui continue à prier pour moi :
elle unit mes vieux os à l'énigme
à tous les hommes aux femmes et à leurs enfants émerveillés
à la fumée qui protège au soleil mon ombre
dans tous les lieux-assassins sans foi ni loi
où se sont égarés mes rêves de toute la vie.
Le dernier roc où s'arc-boutent mes années
sait que la vie est bien trop courte
et trop long l'espoir en mon esprit
et trop vive dans mes racines
la mémoire des femmes-jardins
qui ont porté jadis mes flammes
sur tous les fonts baptismaux.
Publié sur FB le 17 février 2021
Poème N°48, « La couche de culture* », du poète lettonien Jānis Rokpelnis, né en 1945.
Ce poème a été publié en 1981 à la fin de l’ère Brejnev, époque du réveil national letton. Poème peut-être prophétique de ce qui se passera plus tard à Tchernobyl et qui fut déterminant pour les peuples baltes dans leur volonté d’en finir avec le régime de type soviétique. Ce que nous savons très peu, en Occident, c’est que les mouvements indépendantistes des années 80 au-delà du rideau de fer avaient toujours une très forte composante écologiste.
L'œuvre de Jānis Rokpelnis a été récompensée, entre autres, par le prix de l’Assemblée Balte en 2000.
(*j'ai pris la liberté de transformer "culture" en "nourricière" dans le corps du poème car ça me semblait mieux. Les commentaires plus haut et la traduction sont d’Alain Schorderet, avec quelques apports personnels donc).
Un jour l’un de nos descendants ouvrira les vantaux de la terre,
Quand nous ne serons plus qu’une couche nourricière.
Sous les pommiers et sous les palus,
Parmi les gratte-ciel en miettes,
Dans la couche nourricière, étendus,
Nos paroles seront muettes.
Le lointain descendant alors ouvrira grand la bouche
Tellement de culture sera composée cette couche.
Quelques empans nous ont été offerts
Dans lesquels tout sera défeuillé …
Il faut savoir devenir couche de terre,
Aussi bien qu’à la surface séjourner.
Poème N°49 " Balaji" du poète népalais Bhanubhakta Achayra (1814-1868).
Il s'agit d'un extrait d'un très long poème et une traduction (très) libre car Google est encore novice en népalais et qu'il faut bien faire acte de création poétique !
Donc, c'est plutôt une écriture franco-népalaise. En espérant que Bhanubhakta Achayra ne se retournera pas dans sa tombe, et qu'il me pardonnera ces licences poétiques qui résonnent tout particulièrement en ces temps compliqués.
Je post ici une série de poèmes que j'avais posté sur Facebook. celui-ci date du 20 février 2020.