dimanche 12 février 2012

Dominique Perrault à Barcelone ou l'hommage à Mies

L'hôtel-tour ME Barcelona est situé sur l'avenue Diagonale, perspective majeure du plan de la ville conçu par Cerda*, longue de 11 km, orientée nord-ouest / sud-est, reliant le quartier de l'Illa à celui de Diagonal Mar et Forum, le nouveau port de Barcelone. 
Elle est édifiée dans un quartier dont le tissu urbain est dense, comprenant un grand nombre de bâtiments dont les façades laissent deviner un passé d'activités liés à la mécanique ou la petite industrie ; les hauteurs des immeubles d'habitation sont relativement faibles (6 ou 7 niveaux au maximum).
L'architecte a voulu composer un bâtiment qui réconcilie la ville horizontale - traditionnelle - et la ville verticale - la Barcelone moderne. Ce défi, il l'a relevé en proposant une tour d'une très grande finesse comportant, dans sa partie basse, un retrait d'une hauteur correspondant sensiblement à celles des corniche supérieures des constructions existantes voisines.
Ce retrait engendre un porte-à-faux qui constitue l'un des aspects les plus caractéristiques du bâtiment. L'autre aspect, l'autre signature de cet édifice, relève du traitement de la façade. Il n'y a pas ici de démonstration spectaculaire. Perrault a du se souvenir que s'il était dans la ville de Gaudi, il était aussi dans celle qui abrite l’œuvre de Mies van der Rohe ; icône du minimalisme et de l'élégance. 
Comme souvent dans ses projets (Très Grande Bibliothèque, Cour Européenne des Droits de l'Homme), l'architecte a fait appel à un produit issu du monde industriel (il faudra qu'un jour un étudiant fasse une thèse sur cette fascination que Perrault a pour l'univers de l'industrie...). Donc, il a pris une tôle en aluminium micro-perforée, comme celle utilisée dans les bardages des usines pour leur cloisonnement intérieur, et il l'a placée entre deux vitrages.
Le module élémentaire de sa façade étant ainsi constitué, l'architecte peut ensuite jouer sur un nombre réduit de paramètres : transparence (totale, opacité, semi-transparence), tailles de module (2) et alternance de ces derniers. La modénature donne une impression de simplicité, de précision et d'une très grande clarté.
Structurellement, le bâtiment est constitué aux deux tiers en béton et, pour le tiers suivant correspondant à la partie en porte-à-faux, en métal matériau beaucoup plus léger.
Le pignon de la tour est souligné par une bande verticale plus sombre, d'une largeur égale à quatre modules, et aux allures de galon de smoking (image de l'architecte). Au sommet de la tour, un très chic restaurant avec terrasse permet de contempler la mer et la montagne.
L'ensemble hôtelier est complété, sur l'arrière, par un immeuble plus bas, reprenant le même dispositif en termes d'enveloppe. Au dernier étage de celui-ci se trouve une piscine.

A proximité immédiate, le promoteur américain Hines a confié à Dominique Perrault la conception de "Diagonale 123" un ensemble de bureaux. L'architecte joue le dialogue subtil avec le voisin et produit une sculpture géométrique de verre, habillée de noir, avec de très fines rayures horizontales brillantes et réfléchissantes.
Du grand art !
Merci à JG et DdS - qui se reconnaîtront s'ils viennent jusqu'ici - pour leurs commentaires éclairés, et leur très grande disponibilité...

* Ildefons Cerdà i Sunuyer (1815-1876) était (excusé du peu) : Ingénieur des Ponts, Urbaniste, Architecte, Juriste, Economiste et (accessoirement ?) homme politique catalan

Note : j'ai été très surpris d'apprendre que Dominique Perrault (de son aveu-même) n'avait jamais mis les pieds en Espagne - et donc à Barcelone - avant 1997, année où il reçut le Prix Mies van der Rohe...

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