Ces deux petites nouvelles sont associées à Amok (Cf ante) pour constituer un triptyque que Stephan Zweig dédie en quelque sorte à la passion dont le destin ne peut être que tragique.
Toutes les vies sont anéanties par la passion semble vouloir dire Zweig.
Pourtant, son suicide le 22 février 1942 à Rio ne correspond pas à l'issue fatale d'un processus passionnel. N'était-ce pas la peur, une désillusion immense, une absence de confiance en lui-même poussée à son paroxysme qui furent les moteurs de son acte définitif ?
Ces trois nouvelles sont magnifiques. Extraits :
"J'aimais ces ruelles des villes étrangères, ce marché impur de toutes les passions, cet entassement clandestin de toutes les séductions pour les matelots qui, excédés de leurs nuits solitaires sur les mers lointaines et périlleuses, entrent ici pour une nuit, satisfaire dans une heure la sensualité multiple de leur rêves. Il faut qu'elles se cachent dans un bas-fond de la grande ville, ces petites ruelles, parce qu'elles disent avec tant d'effronterie et d'insistance ce que les maisons claires aux vitres étincelantes, où habitent les gens du monde, cachent sous mille masques." La ruelle au clair de lune
"C'est à mourir, cet hôpital ; tout vous y est étranger, étranger, étranger ; et nous nous regardions comme des étrangères, nous qui gisions là, solitaires et mutuellement pleines de haine, nous que seuls la misère et les mêmes tourments avaient contraintes à prendre place dans cette salle à l'atmosphère viciée, emplie de chloroforme et de sang, de cris et de gémissements. Tout ce que la pauvreté doit subir d'humiliations, d'outrages moraux et physiques, je l'ai souffert, dans cette promiscuité avec des prostituées et des malades qui faisaient de la communauté de notre sort une communauté d'infamie..."
Lettre d'une inconnue
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