dimanche 20 décembre 2009

Premier amour


Découverte d'un très grand texte et confirmation d'un très grand acteur...comme quoi, en France, il n'y a pas que les trains, les bibliothèques et Paris qui sont très grands...!
Sami Frey, seul en scène pendant 1H15, dans la peau d'un homme qui raconte son premier et seul amour, et navigue à vue dans une réalité objective autant qu'absurde. Il y a une peu de l'étranger de Camus dans ce personnage. Est-il mort ? Est-il dans un asile ? Il promène sur lui et le monde étroit qu'il a connu le regard solitaire d'un misanthrope obligé. Chassé par sa famille à la mort de son père - dont le visage mortuaire lui "avait fait entrevoir la possibilité d'une esthétique humaine" - il se met en ménage un peu malgré lui avec Lulu, une prostituée, qu'il aime d'un amour qui ne peut être qu'un "exil avec de temps en temps une carte postale du pays". Le texte s'achève sur ces phrases : "Il m'aurait fallu d'autres amours, peut-être. Mais l'amour, cela ne se commande pas."
On rit souvent, on s'interroge. Certaines formules sont un régal : "...aurais-je senti sous mon crâne ses cuisses palpiter comme deux traversins possédés ?" Et on est intrigué par une mise en scène dépouillée à l'extrême où surgit par moment une alarme stridente, associée à un clignotant rouge, comme un rite auquel le personnage doit se soumettre. Peut-être comme le signe inéxorable que la liberté est un concept définitivement utopiste dans ce monde où "l'enfer c'est - forcément - les autres".

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire