mercredi 31 mars 2010

Piano à Arc en Rêve (Bordeaux)


Doit-on être déçu par cette mini exposition pour un maxi architecte ? Un peu, si on la compare à l'exposition qui lui avait été consacrée à Beaubourg il y a quelques années (mais les surfaces n'étaient pas comparables). Scénographie timide aussi. Est-ce une volonté par opposition à la surenchère d'effets qui peut être la marque de notre époque ? Une volonté de ne montrer que l'essentiel ? Et la question est là : c'est quoi l'essentiel pour Piano ?
1) L'écoute des acteurs du projet ; ses commanditaires, les gens du lieu (admirables photos des villageois d'Otranto),

le dessin commenté par les intentions, les objectifs (les A4 épinglés qui traduisent l'élaboration du Monastère des Clarisses à Ronchamp). "Pour savoir construire, il faut savoir écouter." Mais l'écoute ne signifie pas l'obéissance. Curiosité, désobéissance et imprudence sont les vertus cardinales pour Piano.
2) L'ambivalence de la matière : vérité du matériau et détournement de son potentiel physique comme une déclinaison de la fonction "temps" (ancrage historique et modernité). Une des plus belles et plus simples phrases que j'ai pu retenir de Piano est : "La modernité a un coeur ancien."). "Mon père était capable de transformer la matière", dit-il également.

3) La "praxis" et seulement elle : Piano la réinterprète, comme une intimité entre la théorie et l'action, une continuité entre l'abstrait et le concret, le programme et l'usage ; on a envie de dire, que "praxis" pourrait être un autre mot pour signifier "architecture". Et ce lien entre l'idée et sa matérialisation, qu'il s'agisse d'un élément de la construction ou de la construction elle-même, c'est la technique. Piano est certainement l'architecte le plus ingénieur des grands architectes contemporains. Il fut d'ailleurs associé de longues années avec Peter Rice (à lire "Mémoire d'un ingénieur", obligatoirement).
La visite de l'agence de Piano, rue des Archives - dans l'ombre de Beaubourg - est un instant de bonheur (voir description déjà faite ici). J'imagine comment la culture de la chose construite peut s'instiller chez les architectes qui travaillent dans cet espace meublé de maquettes, d'échantillons de matériaux, de pièces moulées, etc.



L'œuvre de Piano démontre qu'il n'y a pas de "petits projets" ; pour peu qu'il y ait une sorte "d'âme" ou une grâce qui les porte. En 1977, Piano venait de devenir célèbre en livrant, avec son compère Rogers, le Centre Georges-Pompidou. Deux ans plus tard, on le retrouve concepteur d'un pavillon mobile en toile tendue et structure légère métallique de 4 à 5 m2 de surface pour la ville d'Otranto !

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