Le musée gallo-romain de Lyon fut la dernière grande commande de Bernard Zehrfuss (1911-1996) et vraisemblablement son chef d’œuvre. Tout à déjà été dit sur cette œuvre et son architecte, qualifié par la journaliste Christine Desmoulins « d’architecte de la spirale du temps », évoquant par-là, à la fois la rampe hélicoïdale qui serpente dans l’espace du musée et le parcourt du visiteur qui traverse le temps, selon plusieurs thèmes, des premières colonies romaines jusqu’à l’apogée de Rome. La visite de cette « cathédrale de béton » enterrée est certainement, pour tout étudiant architecte ou ingénieur, un passage obligé afin d’appréhender, au plus profond de ses sens, l’harmonie entre espace, œuvre et technique. On peut ajouter le temps puisque celui-ci, contrairement à de trop nombreux édifices du XXe siècle, n’a, en presque 50 années, non seulement pas malmené cette architecture, mais semble avoir tissé un lien secret avec elle. Et puis le temps de l’histoire bien sûr, avec la confrontation entre des matérialités et des civilisations, distantes de plusieurs siècles.
À Lyon, la dizaine de portiques qui scandent le parcours et l’intersection savante des structures en béton, dressent un réceptacle puissant qui répond à la force de certains blocs de pierre gravés et peut-être plus encore, de manière indicible, à la puissance de la civilisation romaine dont on peut observer le raffinement tant artistique que cosmogonique.
Bernard Zehrfuss parlait de ces portiques modernes comme « un hommage à la civilisation romaine qui sut en construire de si majestueux. »
Une tribune du journal « Le Monde », daté du 17 et 18 décembre 2023, « Les musées doivent pleinement jouer leur rôle dans le débat écologique », évoque l’impérieuse nécessité pour les musées de faire œuvre de pédagogie au regard de l’environnement et de la crise climatique. Le musée de Zehrfuss montre l’exemple en la matière : respect du lieu par son enfouissement, végétalisation d’une partie de la toiture et de la façade, qualités d’inertie thermique, matériau brut sans revêtement coûteux, …
Et si, au-delà de la seule question d’ordre technique, les musées doivent « assumer un rôle social et citoyen, en résonance avec les préoccupations de notre temps. Reflets de la société, (permettre) une ouverture sur le monde et sur les autres et un questionnement sur notre monde contemporain », alors, le musée gallo-romain de Lyon répond une nouvelle fois à ce critère. Car, comment ne pas s’interroger sur notre civilisation et son avenir quand on peut observer, avec une telle pertinence dans la présentation, les vestiges de la civilisation romaine témoignant d’une grandeur, sans doute imaginée comme éternelle en son temps, et livrée en quelques années à la ruine ?
Je ne saurais conseiller que la lecture de l’article d’AMC consacré à ce musée, « le plus beau du monde » comme l’avait écrit Claudius-Perit.
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