vendredi 3 décembre 2010

Nagasaki


Tiré d'un fait divers réel qui s'est passé au Japon - une femme a vécu plus d'un an cachée dans la maison d'un célibataire avant que celui-ci commence à avoir des soupçons - Eric Faye, qui a obtenu le Prix du Roman de l'Académie Française, a écrit un livre court mais riche de questions sur une société contemporaine qui impose à certains de se cacher pour survivre "condamnés à errer dans un entre-deux de l'existence", qui a perdu jusqu'à "l'idée de sens (qui) a été inventée par l'humanité pour mettre un baume sur ses angoisses". Alors contre cette "farce", "cette pièce de théâtre absurde" à laquelle les plus fragiles finissent par être condamnés, "il faudrait inscrire dans toutes les constitutions du monde le droit imprescriptible de chacun à revenir quand bon lui semble sur les hauts lieux de son passé."
Relation intime et indicible de l'homme aux lieux de son passé, survivance d'une mémoire permanente attachée à des espaces de vie même s'ils ont été détruits ; ce livre doit parler profondément à tous ceux pour qui visiter un lieu désaffecté où subsiste les traces ou le souvenir d'une vie antérieure (usines en déshérence, maison abandonnée,...)déclenche dans leur imaginaire toutes sortes d'émotions.
J'ai en particulier le souvenir d'un très ancien lieu de culte sur l'île de Bréhat avec une chapelle et un lavoir, désormais colonisé par une nature barbare, où furent condamnés à l'isolement des centaines de pestiférés ; il me semble que leurs âmes torturées - ou quelque chose y ressemblant - subsistent dans l'arbre au tronc difforme dont les branches et les racines envahissent le lieu.

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