On ne vous en parlera pas dans les guides. Veinard(e)s !
Ici on tente de s'exercer à écrire sur l'architecture et les livres (pour l'essentiel). Ça nous arrive aussi de parler d'art et on a quelques humeurs. On poste quelques photos ; celles qu'on aime et des paréidolies. Et c'est évidemment un blog qui rend hommage à l'immense poète et chanteur Léonard Cohen.
samedi 30 avril 2011
Regards d'architecture à Valencia
Je vous l'assure : il existe une vie architecturale contemporaine de qualité en dehors de Santiago Calatrava à Valencia !
Si le talentueux architecte-ingénieur du pays a conquis les couvertures des prospectus touristiques, tant est si bien que le symbole de Valencia est devenu la Cité des arts et des Sciences - un vrai "Calatravaland" -, d'autres architectures méritent d'être évoquées. Certaines sont médiatiques comme le "Pavillon du vent et de la voile" de David Chipperfield, d'autres sont plus discrètes, d'auteurs inconnus, mais infiniment sensibles, précises et justes. Propositions :
Si le talentueux architecte-ingénieur du pays a conquis les couvertures des prospectus touristiques, tant est si bien que le symbole de Valencia est devenu la Cité des arts et des Sciences - un vrai "Calatravaland" -, d'autres architectures méritent d'être évoquées. Certaines sont médiatiques comme le "Pavillon du vent et de la voile" de David Chipperfield, d'autres sont plus discrètes, d'auteurs inconnus, mais infiniment sensibles, précises et justes. Propositions :
vendredi 29 avril 2011
Valencia ou l'interrogation sur le bien-fondé (parfois) du radicalisme
En 1957 eurent lieu à Valencia des inondations dramatiques dues au débordement sauvage du Rio Turia. Une décision radicale fut prise : assécher définitivement le cours du fleuve qui passait au coeur de la ville en réalisant un canal de dérivation contournant la cité.
Près de 50 ans plus tard, le lit du fleuve aménagé offre à Valence une coulée verte que pourrait lui envier nombre de grandes métropoles, à commencer par Paris.
Mais cette décision "contre nature" pourrait-elle se prendre encore aujourd'hui, dans le contexte ultra-sensible du développement durable et son corollaire : une harmonie entre développements humains (et celui de la ville en est évidemment un) et cycle de la nature ?
Il est très probable que non.
Il ne faut néanmoins pas oublier que le Rio Turia n'est pas la Seine. Le cours du premier est capricieux ; le cours du second participe de la vie économique et n'est pas sujet à des variations aussi aléatoires. Il y a à Paris une relation organique entre le fleuve et la ville qui ne s'impose sans doute pas avec autant de force à Valence.
S'il est indéniable que la cité originelle de Valence s'est édifiée en prenant en compte l'opportunité de la présence du Rio Turia, le développement moderne de la ville peut, compte tenu du faible impact du fleuve sur la cité (en dehors de l'aspect catastrophe), se réaliser sans lui.
Aujourd'hui, 30 ans après que cette décision ait été prise, il est probable que des dispositifs techniques permettant au Rio Turia d'exister tout en étant "raisonnable" auraient été pris.
Alors, en plus de cette très belle promenade verte qui enveloppe la ville, il y aurait sous les 17 pont de Valence une vraie rivière, petite fille assagie du redoutable Rio Turia. L'agrément aurait été encore plus fort (des fâcheux évoqueront les moustiques).
Ce qui est intéressant, c'est de reconnaître que le radicalisme peut, dans certaines circonstances, représenter une alternative vertueuse (ce qui n'est évidemment pas le cas des cultures intensives de coton sous Staline ...). A méditer (si on veut).
mercredi 27 avril 2011
Christian Hauvette tire sa révérence
Christian Hauvette, Grand Prix National d'architecture, dont les œuvres conjuguaient élégance et rigueur, est parti vers le paradis des créateurs ce week-end.
Nous nous croisions parfois - trop rarement - à l'occasion de ces manifestations qui réunissent les architectes et les amateurs d'architecture, au Pavillon de l'Arsenal ou à la Cité de l'Architecture et du Patrimoine. Je le saluais, quand il m'était possible de le saluer ; c'est à dire quand je jugeais que je n'allais pas le déranger. Non que Christian Hauvette fasse partie de ces architectes qui se drapent dans leur notoriété afin de s'entretenir qu'exclusivement avec leurs pairs ou des personnes influentes (on en connait !) ; mais il y avait chez cet homme que j'aurais aimé connaître d'avantage, une certaine réserve, et, quand j'étais en sa présence, je ressentais une impression de justesse, de précision, de culture qui n'invitait pas aux propos superficiels.
Je me souviens tout particulièrement d'une petite discussion en présence (rarissime) d'un professeur agrégé de mathématiques. Contrairement à nous tous qui ne nous intéressons trop souvent qu'à notre "champ de manoeuvre", il s'était longuement entretenu avec cette personne, l'interrogeant sur ce métier qui fait souvent débat (souvent "pauvre débat"), de l'importance des mathématiques - matière de la précision, du concept et, in fine, de l'élégance (encore). Cette discussion nous avait amené sur les terrains de la musique et de l'art. Le tout en quelques minutes, par une grâce indicible.
J'ai écrit sur le vaisseau très pur qu'il a posé près de la gare d'Austerlitz, presque (on peut regretter ce "presque !) sur les berges de la Seine. Je ne manque jamais de regarder son grand bâtiment de logements en bordure du périphérique près de la Porte de la Chapelle, dans lequel il a introduit, avec beaucoup de délicatesse, quelques touches de bleu profond.
Le marin qu'il était a pris un cap vers l'horizon.
Nous sommes nombreux à être tristes.
dimanche 24 avril 2011
Indignation de Philip Roth
"Indignation" est le titre du 29ème et dernier roman de l'auteur de "Pastorale américaine". Il résonne tout particulièrement à l'heure du succès médiatique de l'opuscule de Stephane Hessel. On pourrait s'exercer à tracer quelques lignes d'analogie entre ces deux écrits : ils traitent, chacun à leur manière, du rapport entre la jeunesse et le monde des adultes.
Marcus est un jeune homme sérieux et studieux qui a choisi, à l'entrée à l'université, de mettre une certaine distance d'avec un père, boucher casher, devenu tyrannique par l'inquiétude maladive qu'il nourrit à l'endroit de son fils unique. Jeune homme indépendant et libre, Marcus va s'apercevoir que la société américaine de 1951 voudrait le contraindre à partager ses valeurs conservatrices étriquées.
La rencontre plutôt "chaude" avec Olivia, une jeune et très belle étudiante au passé complexe, le bouleverse ; ce premier amour passionné va également se heurter à la pudibonderie de l'institution universitaire. Pour Marcus qui cherche à obtenir la meilleure place de sortie afin d'éviter d'être envoyer comme chair à canon sur le front de Corée, mais refuse de se laisser dicter sa conduite sur le plan moral, la voie est étroite.
Roth livre une attaque en règle contre une société confite dans la religion et les préjugés.
Il fait l'éloge de la libre pensée et d'un humanisme qui n'a besoin d'aucune forme de pensée transcendantale pour s'accomplir.
C'est un livre profond, surprenant, engagé qui plaira (particulièrement) à tous ceux qui pourraient reprendre les mots de Marcus : "Je n'ai pas besoin des sermons des moralistes professionnels pour me dicter ma conduite. Je n'ai certainement pas besoin d'un Dieu pour cela. Je suis parfaitement capable de mener une existence morale sans en attribuer le mérite à des croyances impossibles à prouver, défiant la raison, des croyances qui, pour moi, ne sont rien de plus que des contes de fées (...)"
Très tôt dans le roman, mais sans que cela nuise à l'intérêt du lecteur, Roth nous informe de la situation tragique de Marcus ; le jeune homme n'a que 19 ans et il nous parle de son histoire depuis un lieu insolite : "l'antichambre de l'oubli".
Magnifique et émouvant. Un roman de rage.
Magnifique et émouvant. Un roman de rage.
mardi 19 avril 2011
Solaire
Moyennement lumineux ce dernier livre de l'anglais Ian McEwan. L'histoire d'un Prix Nobel de physique, marié 6 fois, invétéré coureur de jupons, lubrique, gras du bide, velléitaire, capable de vivre dans une crasse procrastinatique, escroc et plagiaire qui s'entiche de développement durable . C'est bien écrit mais sans fulgurance. On rigole bien trois ou quatre fois sur 389 pages (et c'est plutôt au début) ; l'Angleterre est égratignée par endroit et l'histoire s'achève en queue de poisson. C'est maigre pour quelqu'un qui est "considéré comme l'un des écrivains anglais les plus doués de sa génération"*! Dans le style "histoires loufoques", on peut lui préférer Paasilinna.
* c'est pas moi qui le dit mais son éditeur en 4ème de couverture...
Extrait (1ère phrase du roman) :
"Il appartenait à cette classe d'hommes - peu avenants, souvent chauves, petits et gros, intelligents - que certaines belles femmes trouvaient inexplicablement séduisants. Du moins le croyait-il, ce qui semblait suffire à en faire une réalité."
Syracuse : la Mecque de l'architecture contemporaine !
jeudi 7 avril 2011
Le top ten
...des oeuvres architecturales (20 et 21eme siècles) vues par Pergame :
- Le pavillon de Barcelone (Mies van der Rohe)
- La Villa Cavrois (Robert Mallet Stevens)
- Le Marques de Riscal (Franck Gehry)
- La Vitra House (Herzog et de Meuron)
- La Fondation Bayeler (Renzo Piano)
- Le MacCormick Tribune Campus Center de Chicago ( Rehm Koolhaas)
- La Villa Savoye (Le Corbusier)
- L'immeuble Tod's à Tokyo (Toyo Ito)
- Le Crysler Building à New York
- la Neue Nationalgalerie à Berlin (Mies van der Rohe)
Nota : le jeu consistait à se limiter à 10...
- Le pavillon de Barcelone (Mies van der Rohe)
- La Villa Cavrois (Robert Mallet Stevens)
- Le Marques de Riscal (Franck Gehry)
- La Vitra House (Herzog et de Meuron)
- La Fondation Bayeler (Renzo Piano)
- Le MacCormick Tribune Campus Center de Chicago ( Rehm Koolhaas)
- La Villa Savoye (Le Corbusier)
- L'immeuble Tod's à Tokyo (Toyo Ito)
- Le Crysler Building à New York
- la Neue Nationalgalerie à Berlin (Mies van der Rohe)
Nota : le jeu consistait à se limiter à 10...
Ai WEI WEI arrêté
Il y a quelques mois, nous avions livré à vos orbites cruelles quelques travaux de cet immense artiste Chinois.
Une étonnante installation de chaises dans l'espace à la biennale de Venise, en collaboration avec les architectes Herzog et de Meuron,
et une formidable exposition à la Tate Modern composée d'un million de petites billes de céramique, ovales et peintes, imitant les graines de tournesol.
Aujourd'hui, seules ses œuvres peuvent encore parler de Liberté.
Liberté est un mot qui est devenu tellement banal et pauvre de sens pour nous que l'on ne mesure pas vraiment la portée de son absence. Nous vaquons dans une hypnose béate, et notre société ressemble à ce groupe d'aveugles de Bruegel qui se précipite dans l'ornière.
mardi 5 avril 2011
Le destin du touriste de Rui ZINK
Bien que son nom ne l'indique pas à première vue, Rui Zink est portugais. Mais son nom n'indique pas d'avantage qu'il a 50 ans, qu'il est professeur de littérature portugaise à l'université de Lisbonne et auteur de nombreux romans dont "Le destin du touriste" fraîchement - ou chaudement - sorti des presses de Métaillié en mars de cette année. A qui donc se fier ?
C'est un livre qui n'est pas racontable pour 2 raisons :
1) si vous levez un voile sur l'histoire, ça n'avancera à rien
2) si vous levez le voile un peu plus ; ça n'avancera à rien non plus
Évidemment, si je me mets à tout vous raconter, ça n'a plus de sens.
Je vais vous dire : c'est un livre qui mérite qu'on le relise ! C'est déjà une promesse d'intérêt.
Alors je vais me contenter de vous donner des mots-clés : zone, développement durable, touriste (bien sûr), Lara Croft, dinosaure, philippins, suicides, "Passez vos vacances de rêve dans un lieu de cauchemars", mise en scène, "il ne faut jamais confondre tourisme et immigration",...
Extrait :
"Deux soldats enfilèrent un sac sur la tête de chacun des condamnés. Un troisième, plus vieux, l'air d'un sergent, monta sur l'échafaud, brandit un magnétophone sans piles, juste une espèce d'énorme entonnoir tourné à l'envers, et fit un bref discours, incompréhensible, énergique, qui dut plaire à la foule, étant donné que celle-ci-applaudit. L'ambiance était à la fête : éclats de rire, électricité dans l'air, tension quasi érotique. On aurait dit un concert.
Le sergent fit signe à ses camarades et descendit de l'échafaud.
Des dizaines de bras se levèrent en l'air à l'unisson.
Greg ne comprit pas.
Puis, il comprit.
Et fit comme les autres - il filma cet instant. Le portable à la main devenu petit livre rouge du président Mao (...) il émit et mit à exécution, en une belle synchronie avec la foule, un mandat de capture de cet instant."
Merci une nouvelle fois à PLC pour cette découverte (et en + la couverture est de lui !)
dimanche 3 avril 2011
Le genre humain, menacé
"...répondre à la crise écologique est un devoir moral absolu. Les ennemis de la démocratie sont ceux qui remettent à plus tard les réponses aux enjeux et défis de l'écologie." Dernière phrase de la tribune signée par Michel Rocard, Dominique Bourg (professeur en géosciences de l'environnement), et Floran Augagneur (philosophe et enseignant à Science-Po), elle conclut un texte grave - voire alarmant (mais pas alarmiste !) - à propos de l'avenir de nos sociétés démocratiques face à la menace écologique. Qui l'ignore aujourd'hui ? Ceux qui veulent l'ignorer ; par cynisme, par intérêt ou par négligence égoïste (états ou individus). Il y a une urgence à laquelle jamais notre humanité n'a été confrontée. Mais comment cette urgence peut-elle être prise au sérieux quand notre monde surfe sur le scepticisme (et en particulier vis-à-vis de la science) et que l'horizon des consciences est trop souvent celui proposé par une culture de l'image télévisuelle ?
Qui sait qu'aujourd'hui l'écart des revenus sur la planète est 428 fois plus important qu'à l'époque des Lumières ? Qui se rend compte que cet écart traduit l'échec de l'"idéologie du progrès" ? Qu'en conséquence, ce n'est pas ce dernier ni ses avatars - toujours plus de croissance, culte de la compétitivité - qui vont nous permettre de "transformer la menace en promesse désirable et crédible . ?"
"Nous ne pouvons attendre et tergiverser sur la controverse climatique", (...)"Lorsque les océans se seront réchauffés, nous n'aurons aucun moyen de les refroidir."
La démocratie - en tant que lieu véritable du débat d'idées et d'une certaine conscience de la solidarité - est sans doute l'ultime rempart face à la catastrophe annoncée. Mais la démocratie est fragile : "Lorsque l'effondrement de l'espèce apparaitra comme une possibilité envisageable, l'urgence n'aura que faire de nos processus, lents et complexes, de délibération. Pris de panique, l'Occident transgressera ses valeurs de liberté et de justice."
C'est un appel à l'adoption d'un nouveau paradigme auquel nous exhortent les auteurs de ce texte. "Nos démocraties doivent se restructurer, démocratiser la culture scientifique (NDR : un vrai défit à une époque où le seul viatique est le cursus des écoles de commerces !...), et maîtriser l'immédiateté qui contredit la prise en compte du temps long.
Un texte fondateur ?
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