mercredi 20 juillet 2011

Stade de Bordeaux (le clip)


On connait donc depuis hier le lauréat "pressenti" du concours en PPP (Partenariat Public Privé) pour la réalisation et l'exploitation du nouveau stade de Bordeaux. On peut même voir sur le web un "clip" présentant "ce bol entouré de coursives qui donnent à voir le stade d'un côté, le ciel de l'autre" (dixit Pierre de Meuron, l'architecte). Ou comment le sport et les ustensiles de cuisine - jadis on parlait de "chaudron" - poursuivent leur correspondance ; à quand "la passoire", "le chinois", et évidemment "le faitout", puisque le destin de ces stades est d'être "mutables" en salle de spectacles (concerts et shows en tout genre) ? Revenons sur ce "clip". Pas simple de se faire une idée précise de l'architecture (mais est-ce bien le sujet ?). On l'entrevoit en travelling lent entre plusieurs scénettes sensées montrer un échantillon représentatif (mais trié sur le volet) des futurs consommateurs de l'équipement. Un enfant qui trottine dans les hautes herbes, une jolie jeune femme qui se regarde être filmée dans les rues de Bordeaux et un jeune homme VIP aux lunettes façon jeune UMP content de lui dans son cabriolet (c'est du Sardou qui passe sur sa chaine HiFi ?). Le gamin et la jeune femme vont assister à un match de foot (on n'arrive pas à y croire pour la seconde). L'autre icône, le foot c'est pas son truc (ça se voyait dès le début du clip ; il a plutôt une tête à payer 150€ une place pour Johnny). Effectivement, on le voit aller à un concert. Dans les deux cas, la foule est en délire.
De l'architecture elle-même on saisira au passage une forêt dense de "piliers" élancés (plus probablement des tirants) façon péristyle revisité, la sous-face du "bol" dessinée en négatif des gradins et qui affiche ainsi sa fonction (note pour les étudiants : "form follows function"), et le rectangle parfait, d'une finesse exemplaire, de la toiture (faites pas ch.. les ingénieurs !). Les vues générales de l'ouvrage sont nocturnes.(A noter : toujours se méfier des vues nocturnes en architecture !). Dommage, on avait cru distinguer sur un autre clip, à la télé cette fois, une pliure assez délicate aux angles de la toiture façon origami (avions-nous rêvé ?).
Bon, donc pas grand chose à dire sur l'architecture : sage ? fine ? réglée ? propre ? On est assez loin de la fulgurance du "nid d'oiseau" de Pékin, inspiré par Ai Weiwei, ou de celle de l'Allianz Arena de Munich. Mais vous me direz (façon Arletty) : "fulgurance, fulgurance, ...".
Autre chose (la dernière), la fin du clip est symptomatique de la dérive de l'architecture des grands projets aujourd'hui : les noms des deux groupes de BTP apparaissent en gros, au-dessus d'un "et l'agence d'architecture Herzog et de Meuron", en nettement plus petit... Basta. Les ingénieurs qui font tenir tout ça comptent pour du beurre, mais c'est une habitude. Dans le monde du cinéma, le plus mauvais des films n'omet jamais de dérouler un générique dans lequel le dernier des stagiaires accessoiristes est nommé. L'architecture qui se fait maintenant son cinéma pourrait en prendre de la graine...
Ceci étant, j'ai toute confiance dans le talent des deux compères pour faire de ce "bol", sinon une "coupe", du moins un objet architectural de qualité dont la destination sera d'accueillir les productions de la société du spectacle.
Question subsidiaire : quels sont aujourd'hui les "vrais" sujets de l'architecture dans son rôle de création du lien social ? Réponse : les centres commerciaux et les stades !
(réponse inspirée d'une conversation datant de plus de 10 ans avec l'un des "grands" architectes français).

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