samedi 15 janvier 2011

Le monde d'hier


Immense et ultime ouvrage de Stefan Zweig, écrit en 1941 quelques mois avant de se donner la mort au Brésil (février 1942), "Le monde d'hier" est un témoignage bouleversant sur une période exceptionnelle dans l'histoire de l'humanité qui a vu toutes les valeurs établies depuis plusieurs siècles - en particuliers sociales, humaines et économiques - basculer complètement à une échelle qui englobait plusieurs continents. Cette période, c'est celle qui va de l'enfance de Sweig en Autriche (il est né en 1881) jusqu'en 1941. Elle comprend donc la chute de l'empire millénaire Austro-Hongrois, la 1ère guerre mondiale, les crises économiques, la montée en puissance et la prise du pouvoir d'Hitler, l'antisémitisme exacerbé, la déportation des juifs et des opposants, et le début de la seconde guerre mondiale.
Ce n'est pas un livre d'histoire, bien qu'il évoque avec beaucoup de précisions de nombreux évènements historiques ; ce n'est pas non plus un livre sur la nostalgie ou "passéiste", bien que le chaos est charrié un océan de douleurs et d'atrocités.
C'est le livre d'un homme, d'un humanisme acharné, européen convaincu, d'une immense sensibilité (quand l'intelligence n'a plus besoin de démonstrations ?), pétri de culture et qui va observer, impuissant, au naufrage de cette culture balayée par la barbarie.
On y voit également un intellectuel proche d'autres très grandes figures du monde littéraire ou des arts, nourrit de ces multiples rencontres et des amitiés fortes qui s'y sont développées : Romain Rolland, Richard Strauss, Rilke, Hofmannsthal, Freud, Rodin, Verhaeren, etc.
C'est un livre qui interroge sur une certaine fatalité du cours de l'Histoire ; fatalité qui peut conduire à la désespérance, et certainement au suicide pour des personnages comme Zweig qui se sentent responsables, en partie, de ce naufrage.
Il interroge évidemment sur le futur de notre époque ; pouvons-nous nous croire raisonnablement à l'abri de tels inhumanités ? Des évènements dramatiques comme le 11 septembre 2001, les krachs boursiers, les enjeux écologiques ne sont-ils pas autant de signes qui montrent à l'évidence notre fragilité et devraient nous alerter ? Comme les hommes de ce "monde d'hier" ne savons-nous pas "voir" ? Ne saurons-nous pas agir ?

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