lundi 10 février 2025

Ce matin au kiosque 92 : Kessel, Couteraux, Mouchot et le Rallye

 « … cette haute steppe (…) était pour lui, (…), une grande feuille de sagesse à la surface de laquelle les plus faibles replis du sol traçaient les signes d'un alphabet éternel. »

Quelle phrase sublime ! Une, parmi des dizaines (peut-être des centaines) que renferme « Les cavaliers », le roman de Kessel publié il y a plus d’un demi siècle (1967), qui fait paraître bien pâles certains de nos romans actuels pourtant portés au pinacle des temples littéraires…

Je vous parle de ce livre, car je suis en plein dedans et que c’est un indicible bonheur que j’aimerais pouvoir faire partager à mes contemporains (tout du moins ceux qui se sont éloignés de la lecture ou n’y ont jamais été sensibles).

Et puis, évoquer un livre dans une chronique générée par un lieu où il est possible d’en acquérir ne devrait pas paraître si incongru ; n’en déplaise aux esprits chagrins qui préfèreraient retrouver la ritournelle de la météo et du casting de cet épisode.

Et puisqu’il s’agit d’une chronique un peu rebelle, deux mots d’un personnage qui aurait été surpris de se savoir figurer, à deux siècles de distance, dans pareil exercice d’écriture : François Couteraux (1740-1830). Ce lyonnais d’origine, maître-maçon, inventeur, architecte autoproclamé, écrivain et lobbyiste avant l’heure, appartient à la foule des précurseurs géniaux versés dans les oubliettes de l’histoire, comme Augustin Mouchot (1825-1912), inventeur du four solaire dont l’invention fut torpillé par des défenseurs des énergies fossiles. 

Couteraux n’eut de cesse dans la seconde partie de sa vie (une reconversion) que de vanter, par l’exemple et la théorie, les vertus de la construction en pisé. Nos aïeux étaient sans doute moins sots que nous qui n’avons jurés tout au long du XXe siècle (et encore maintenant, mais dans une moindre mesure) que par le béton et l’acier : des milliers de bâtiments de toute nature furent édifiés en pisé un peu partout dans le monde. La guerre de 14-18 qui décima la plus grande partie des ouvriers-piseurs réquisitionnés pour étayer le front de 800 km de tranchées, le développement des infrastructures routières et du marché du ciment, eurent raison de cette technique constructive à laquelle l’urgence d’une sobriété énergétique dans l’industrie de la construction devrait redonner des lettres de noblesse, au terme d’une amnésie de près d’un siècle.

Cette chronique, dont le lecteur fidèle aura relevé la fantaisie, ne peut oublier de mentionner la pierre blanche qui marquât ce samedi 8 février, puisque le conclave se fit, partiellement, hors les murs, au restaurant « Le Rallye », où quelques unes des célébrités de la confrérie des habitués se régalèrent d’un déjeuner à l’addition modeste (20€, entrée, plat et dessert). Je ne me joignis à la troupe que pour le café, insensible aux railleries qui voudraient prétendre que seuls les restaurants étoilés ont mes faveurs.

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