vendredi 6 septembre 2024

Ce matin au kiosque (ou presque) 50 - Travaux de vacances, BaRNier, Gare Montparnasse et Pepito

La cinquantième ! Ça devrait s’arroser ! Encore faudrait-il que je ne sois pas abonné à un nomadisme chronique !…

8h00. Jean-Michel est (enfin) à son poste. D’aucuns se vantent d’avoir « fait » Bali ou les parcs des US ; notre passeur est resté sagement chez lui pendant ses vacances d’été - soucieux qu’il est de son empreinte carbone -, et il s’est consacré à des travaux domestiques (démoussage de son toit, rangement du grenier et mise en étagères de deux fois cinquante ans de lectures). 

Nous avons bien entendu échangé sur la nomination à Matignon de Michel Barnier, fringant sexagénaire, porte-drapeau d’une « France éternelle » : Notre président à une nouvelle fois confirmé ses talents de visionnaire autant que son mantra néo-lampédusien : « Pour que rien ne change, il faut que rien ne change. »

Nous avons évoqué Raoul Minot (forcément). Jean-Michel m’assure qu’il se fera le porte-parole consciencieux auprès de Mme Peney, maire-adjointe à la culture, de l’impérieuse nécessité de rendre hommage à l’ex-anonyme qui vécu rue du 22 Septembre et légua plus de 700 photos d’un autre visage de la « France éternelle », celui en noir et blanc de l’occupation. Lui apprenant que notre héros Beconnais fut dénoncé auprès de la gestapo et des services de police vichyssois par une lettre anonyme (une parmi les 4 à 5 millions émises par de « bons français » durant cette période), il a eu cette réplique frappée au sceau du bon sens autant que de la résignation : « Et tu crois qu’aujourd’hui…? ».

Après moins de 24H en région parisienne, je déserte une nouvelle fois Bécon pour des territoires plus maritimes et insulaires. J'ai effectué un aller-retour Ile de Ré - Ile de France, juste pour assister à un concert de rock de potes qui vont prendre leur retraite. 

Assis à présent dans un espace d’attente de la Gare Montparnasse, j’observe mes voisins : une dame d’un certain âge (mais il est probable que je sois son ainé) - cheveux blancs jaunâtres longs et lâchés en mèches sales, pieds minuscules chaussés de curieuses bottines roses délavées - tricote avec une application de greffière, sous le regard de son chat encagé (Pépito), les premiers rangs d’un chandail que l’on imagine conçu, exclusivement, pour affronter les CRS lors des prochaines manifs de la CGT ; un asiatique en costume gris sombre traite au téléphone, avec une conviction menaçante, une probable très grosse affaire ; un couple de noirs, elle ultra maquillée, les pommettes généreuses et hissées à une hauteur défiant les lois de la pesanteur, lui, sapé tel un sapeur, évoque à grands renforts de rires des anecdotes dont j’ignorerai jusqu’à ma mort les thèmes hilarants ; une silhouette encapuchonnée dans un survêtement blanc semble sommeiller tout en se grattant les pieds, etc. 

Enfin, dans cet espace anonymisé, une dame de service passe la serpillière entre les voyageurs dont la plupart scrutent l’écran de leur smartphone, tandis que les haut-parleurs diffusent une litanie de sacs et de valises abandonnés que les services de sécurité s’apprêtent à faire exploser. 

C’est ainsi que les hommes vivent.