mardi 20 septembre 2022

Le Trésorier-payeur


J'aurais envie de proposer un sous-titre au dernier ouvrage de Yannick Haennel : "Dans la peau de Yannick Haennel". 
D'abord, parce qu'il nous y invite en nous faisant complice de sa façon d'inventer un roman : il ne cache rien de ses inspirations, des éléments du réel qu'il va transposer dans sa fiction et puis, à un certain moment, comme si les "ingrédients" de base étaient réunis, il se lance dans son récit tout en prenant soin, par moment, de faire savoir au lecteur qu'il (le lecteur) participe d'une expérience de construction romanesque. 
Et puis, parce que le personnage central du roman, ce Georges Bataille - homonyme de l'écrivain-poète aux mille facettes dont on sait combien Haennel a lu avec attention les travaux -, ressemble à bien des égards à l'image que l'on peut se faire - par la lecture ou l'écoute d'interviews - de Yannick Haennel lui-même (mais c'est peut-être pure spéculation de ma part).

Le Trésorier-payeur est une histoire totalement improbable d'un banquier anarchiste et iconoclaste, écrivain compulsif et hédoniste de la chair, dépressif et généreux, qui se retrouve dans une ville de province sinistrée - Béthune -, qui découvre qu'un tunnel a été creusé jadis par un trésorier-payeur, lequel a habité la maison qu'il occupe aujourd'hui, et que ce tunnel lui permet d'accéder à la salle des coffres de la banque. On peut avoir l'impression d'être dans un scénario proche du Locataire de Polanski. Ce tunnel va devenir l'une des obsessions du personnage (Mais ne vit-il pas lui-même que d'obsessions ?).

Le style est d'une élégance tout sauf improvisée. L'écriture est riche ("trop de notes" pourraient dire certains ? ce qui est un compliment, bien sûr dans ces temps de "sobriété" stylistique),  très souvent onirique et poétique. Conte philosophique autant qu'érotique, leçon d'amour et de vie, Le Trésorier-payeur est un livre que l'on a envie de relire et de déguster avec application, et auquel il faut souhaiter un grand parcours littéraire.  

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire