Ici on tente de s'exercer à écrire sur l'architecture et les livres (pour l'essentiel). Ça nous arrive aussi de parler d'art et on a quelques humeurs. On poste quelques photos ; celles qu'on aime et des paréidolies. Et c'est évidemment un blog qui rend hommage à l'immense poète et chanteur Léonard Cohen.
lundi 6 avril 2009
L'hirondelle avant l'orage
Les déportés que les tchékistes entassaient dans des wagons à bestiaux à destination de la Kolyma faisaient 2 choses étonnantes durant leur voyage :
1) ils tentaient d'écrire quelques mots (ultimes le plus souvent) sur des morceaux de papier arrachés à des livres qu'ils étaient parvenus à sauvegarder ; pliaient ces "lettres" sur lesquelles ils inscrivaient une adresse (un être cher, un parent), puis les glissaient par le trou des cabinets du wagon afin qu'elles tombent sur les rails et soient ramassées par hasard par un inconnu qui - peut-être - réussirait à les faire parvenir à leur destinataire. A l'époque des colonies pénitentiaires des tsars, les condamnés à l'exil transportés dans des wagons similaires pratiquaient déjà cette "technique" ; il était également d'usage pour les paysans d'aller ramasser ces petits feuillets sur les voies ferrées...
2)au passage dans les villes ou les villages, les femmes accrochaient aux jours des portes des wagons ou entre les planches, des lambeaux de sous-vêtements qui flottaient ainsi au vent et devaient indiquer aux populations des zones traversées quelle était la véritable nature de la cargaison enfermée dans ces wagons...
"L'hirondelle avant l'orage ", titre du nouveau roman de Robert Littell, est tiré d'un vers du poète Ossip Mandelstam assassiné par les sbires de Staline.
Mandelstam est au centre du réçit. Il est entouré de sa femme, de sa maîtresse, d'autres poètes ; il croise sur son chemin de croix un hercule de cirque, le garde du corps de Staline, l’écrivain Boris Pasternak (futur auteur du Docteur Jivago), et bien entendu celui qui conduit ses interrogatoires. Chaque personnage parle à tour de rôle et raconte un morceau du réçit. Mandelstam prétend que la poésie peut tuer un tyran, et compose un épigramme pour dénoncer cette barbarie.
Il y a un jeu de fascination réciproque entre le poète et le dictateur qui se rencontrent 2 fois (fiction ou réalité ?).
C'est évidemment la question de l'engagement de l'artiste qui est également au centre de ce livre. La folie du poète Mandelstam peut-elle servir la cause de la vérité ? "On ne peut parler d'art comme s'il s'agissait d'un tuyau d'écoulement ou d'un chantier de construction et le réduire à une question technique. Parle de la technique de l'écriture poétique, c'est parler de la technique de création du désastre. Il ne faut pas oublier qu'on doit prendre des risques ; rien n'existe sur terre sans prise de risque." dit-il.
La solution pour abattre Staline n'était-elle pas de commettre véritablement les crimes dont la police politique va vous accuser ?
"Personne n'est innocent", proclamait Staline.
Fascinant....
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