jeudi 27 avril 2017

Préface pour le livre à paraître sur le TGI de Strasbourg



Donner à l’esprit l’occasion d’exister

 Tout projet d’architecture recèle une histoire. Il existe, dans celui de la rénovation du TGI de Strasbourg, un chapitre qui n’est pas visible dans l’intelligence de la composition des espaces et leur spatialité, ni dans l’attention au genius loci, pas davantage dans le jeu subtil des matérialités ; dans tout ce qui participe habituellement de la qualité d’un projet architectural et qui, précisément, pour cet ensemble construit à la fin du 19ième siècle par l’architecte Skjöld Neckelmann, est révélé par la qualité de l’intervention de l’agence barcelonaise Garces-Daria-Bonet.

Mais parlons d’abord d’architecture. Les architectes ont pris ici la mesure de l’ombre pour amplifier la lumière, de l’exiguïté pour libérer l’espace, de l’épaisseur pour apporter la légèreté, de la matière originelle pour introduire la modernité.Ils l’ont fait grâce à un travail minutieux sur la mémoire afin d’écrire, comme le rappelait Paul Ricœur, l’indispensable récit sans lequel l’architecture se confondrait avec la construction. Un de ces récits justes qui révèle au visiteur, de manière indicible, tout le sens du questionnement d’Eupalinos : « N’as-tu pas observé, en te promenant dans cette ville, que d’entre les édifices dont elle est peuplée, les uns sont muets ; les autres parlent ; et d’autres enfin, qui sont les plus rares, chantent ? »


Le « chapitre » qu’il m’est donné d’évoquer ici en quelques lignes n’est pas gravé dans la pierre du grand escalier aux sphinx de la salle des pas perdus. S’il a contribué au succès de cette opération, c’est presque anecdotique ; et pourtant ! C’est l’histoire d’une rencontre fortuite entre des personnes, autour d’un projet et au-delà. Passions partagées, attentions échangées, dans la douceur de Barcelone, l’enchantement de Venise, la lumière de Paris. Une rencontre qui aurait pu se limiter à une simple fréquentation, occasionnelle et obligée,comme il en existe de multiples dans notre métier, mais qui s’est accomplie en une amitié chaleureuse, profonde, et pour reprendre un terme de Jordi, « magnifique ». Jordi qui, avec son associée et complice Daria, par leur architecture et leur humanisme, permettent de « donner à l’esprit l’occasion d’exister. »

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