Kengo Kuma, architecte japonais de 61 ans, introduit sa conférence en évoquant l'essence de sa démarche qu'il fonde sur la notion de "circulation" et de particules ; ces dernières constitutives d'un tout représentant les composants qui nous entourent et dont le mouvement correspond à la vie. Il évoque les travaux du philosophe et sociologue Bruno Latour*.
Le bois est l'un de ses matériaux de prédilection qu'il s'ingénue à travailler à la manière du Chidori, le "Kapla japonais", sans clou ni colle.
Attentif à la relation entre la nature et les artefacts - dans l'esprit des estampes d'Hiroshige - il attache une importance extrême à privilégier les matériaux disponibles sur le site du projet. Son architecture se lit comme une composition de modules qu'il décline dans des arrangements précis voire précieux (trop précis et trop précieux eu égard le degré de qualité de l'exécution française ?).
Il puise son inspiration dans une curiosité qui semble être en éveil permanent, qu'il s'agisse de la topographie du site ou de sa nature géologique, jusqu'à - plus insolite - des accessoires du quotidien tels que des parapluies qu'il peut astucieusement combiner, selon le principe de tenségrité, pour former un abri provisoire, ou encore ces jerrycans en plastique dont le détournement et l'assemblage lui permettent de réaliser des parois dans lesquelles il fait circuler de l'eau à différentes températures qu'il teinte et qu'il éclaire, produisant une dynamique colorée surprenante.
Kengo Kuma est un architecte du détail, plutôt de la petite échelle (comme la plupart des architectes japonais ?), de l'assemblage étudié avec un soin maniaque, du dispositif mécanique minimaliste générant un système constructif, de la recherche d'efficience esthétique (son travail sur les parois légères isolantes).
Il a la tentation de l'origami à l'image de ses deux projets parisiens, le musée Albert Khan et le bâtiment scolaire McDonald. Il n'a pas présenté son projet lyonnais réalisé sous le commandement d'un promoteur, et il a eu raison, car il n'est certainement pas un "architecte de promotion". Son travail s'inscrit dans une démarche porteuse de sens ; celui d'une certaine communion entre l'homme et la nature, une complicité qui relève de l'intime. Mais une démarche porteuse aussi d'une vérité puisée dans les règles du passé, la légitimité du temps et de la matière, appliquée à l'exigence du présent ; une architecture mystique en quelque sorte, mais qui n'hésite pas à tenter le grand écart en se mettant au service d'une marque comme Starbucks.
En définitive, ce travail n'est-il pas représentatif d'une certaine vision - réaliste ? positive ? - de la modernité ?
* Lire à ce propos le texte "Donnez-moi un fusil et je ferai bouger tous les bâtiments" : Le point de vue d'une fourmi sur l'architecture.
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