Une récente visite de l'église de Ciboure au Pays Basque m'a fait découvrir le terme "cagot". Une plaque indicative de l'histoire du bâtiment plaquée sur l'un des murs extérieurs mentionne le fait qu'un cimetière réservé aux cagots était situé à proximité de l'église et que celle-ci comportait une porte d'accès qui leur était également réservée. Wikipedia renseigne abondamment sur les cagots et j'invite les curieux à se rendre sur la page de cet extraordinaire outil de connaissances (belle preuve de l'intérêt d'une démarche participative) en cliquant ici, mais également sur cet autre site là encore.
En bref, on peut avancer - bien qu'il existe encore de nombreuses zones d'ombres sur leur origine exacte - que les cagots sont nés de la conjonction de phénomènes de superstition populaire et de discrimination sociale, amplifiée par le pouvoir religieux et politique.
C'est au XIIIème siècle que l'on voit apparaître les mots de crestia ou crestian qui désignent des individus susceptibles d'être porteurs de maladies assimilables à la lèpre, sans qu'ils soient véritablement des lépreux. Du fait de la peur attachée à cette maladie, les crestias font l'objet d'une relégation dans des zones spécifiques (le plus souvent en marge des villages) et d'interdits multiples : ils ne peuvent pratiquer qu'un nombre très limité de métiers (principalement ceux en relation avec la construction), l'accès à certains lieux tels les églises leur est réglementé, ils ne peuvent se marier qu'entre eux. Toute infraction à ces règles orales ou même écrites est sévèrement punie.
Les chercheurs font remonter la dénomination cagots au XVIème siècle, quand la théorie sur l'origine de cette population de proscrits les associe aux goths plutôt qu'aux lépreux. Une hypothèse Auparavant et, malgré l'ordonnance de 1683 de Louis XIV qui en abolissait le statut (pour des raisons plus économiques qu'humanitaires, Colbert et le roi cherchant alors des ressources pour financer l'endettement du royaume), l'ostracisme dont ils furent l'objet a pu se perpétuer encore durant de nombreuses années, comme en atteste un quartier du village d'Arizkun (Navarre) qui leur était réservé jusqu'au début du XXème siècle.
Les cagots eux-mêmes avaient été précédés des
La superstition populaire affirmait qu'ils étaient porteurs de la peste (l'équivalent de notre Covid-19 !) ou tout du moins agents de transmission de la maladie. A cet effet, ils devaient être "confinés" dans des lieux spécifiques (le plus souvent en périphérie des agglomérations) et assujettis à un certain nombre de règles les excluant de la vie communautaire. Certaines hypothèses associent l'origine de leur relégation territoriale au fait qu'ils aient appartenu à une peuplade vaincue ou dissidente sur le plan religieux qui se serait réfugiée, pour sa survie, dans des lieux difficilement accessibles tels que les montagnes, les forêts ou des zones marécageuses.
Concernant la discrimination sociale, il s'agit d'une constante dans l'histoire des sociétés - voire même un facteur consubstantiel - de disposer d'une fraction de la population sur laquelle il est possible de faire porter la responsabilité des maux (maladies, guerres, crises économiques, crises sociales, etc.) qui affectent régulièrement lesdites sociétés. L'histoire contemporaine et l'actualité en multiplient les exemples.
L'amplification de ce type de phénomène par le pouvoir religieux et politique (souvent confondus dans l'histoire) constitue rien moins, pour le premier, que la nécessité de renforcer son emprise sur les consciences en trouvant une "raison" à ce qui pourrait être jugé comme "déraisonnable" (comment Dieu, omniscient et infiniment miséricordieux pourrait-il accabler l'Homme ?). Pour le second, elle correspond au besoin de trouver une justification soit dans l'échec d'une politique, soit dans sa raison d'être. Le nazisme en est un exemple parfait (si la dimension religieuse ne peut lui être associée, celle du "sacré" et de la charge symbolique associée au personnage du führer s'y substituent).