samedi 30 novembre 2024

Yes we can ? 6 : Fin du monde et petits fours

Voilà un bouquin recommandable qui raconte comment les ultra-riches, non seulement pourissent la planète, mais se démènent pour tirer encore du pognon de la crise environnementale en investissant dans « l’énergie verte » et la merchandisation des compensations carbone.

J’ai choisi cet extrait qui me paraît bien illustrer la difficulté d’atteindre un public avec de belles démonstrations sur l’humanisme et/ou les valeurs universalistes.

L’époque est, depuis le triomphe des réseaux sociaux, à la « concision élémentaire » qui conjugue 3 critères : un minimum de caractères (280 pour X), un thème immédiatement assimilable, la possibilité de répondre instantanément et sans réflexion dans une forme identique au message précédent.

Dans cet extrait, David Fenton est un « gourou » progressiste américain de la com.

« En important les méthodes de la communication de masse au sein du mouvement environnemental, Fenton et les autres ont diffusé l'idée que la forme est autant, sinon plus, importante que le fond. Selon Fenton, la politique ne pouvait plus se définir par la bataille d'idées mais par « une bataille entre avocats et professionnels du marketing. [...] Les avocats croient que les faits et les arguments suffisent à régler les problèmes. Les professionnels du marketing savent que ce pays [les États-Unis] ne fonctionne plus comme ça'' „. Se revendiquer des faits ne suffisait plus. Il fallait les vendre au plus grand nombre. Les consommateurs se sont substitués aux citoyens. Cela passait notamment par la promotion de messages simples. « Nos adversaires », a expliqué Fenton « ont des messages simples que nous utilisons tous.
Nous, nous avons la complexité. Comment allons-nous gagner avec cela? » 
Le cerveau « n'absorbe que les messages simples et répétés ». Cette simplification du message entraîne la dépolitisation de l'enjeu : on est soit « pour» ou « contre » le climat, « en faveur » ou « opposé » à l'action, « pro» ou « anti » science.
Ce cadrage binaire a certes permis de populariser l'enjeu et de creuser un fossé entre ceux qui refusaient la science et ceux qui l'acceptaient, mais il a également eu pour double effet de favoriser le « greenwashing» en permettant à des entreprises climaticides et de se dépeindre comme des acteurs « positifs » du débat, et d'étouffer toute velléité critique au sein du mouvement climat lui-même. 
Au lieu de clarifier les choses, la division binaire entre « pro» et « anti» a créé de la confusion; une
confusion qui a permis l'inclusion d'acteurs économiques aux idées et activités dévastatrices pour la planète et l'exclusion de voix hostiles au capitalisme vert. »

Ce matin au kiosque 65 : Saveurs, Black-bass, Stendhal et Guy Gilbert

Mais qui est cette personne du sexe dit faible qui, ce matin, a meurtri l’âme sensible de notre passeur au prétexte qu’il arborait son air bougon (sans lequel nous ne le reconnaîtrions plus), et qui lui a dit qu’elle ne reviendrait que lorsqu’il serait parti à la retraite en lui souhaitant la plus misérable qui soit ? Figurez-vous que JM a été suffisamment affecté par les propos vénéneux de la dame, qu’il s’est jeté de manière compulsive dans la lecture des recettes de cuisine du magazine « Saveurs » et, de dépit, il n’est pas impossible qu’il se soit préparé en rentrant chez lui, en guise de consolation, une soupe aux potimarons, dattes et cumin ! Bon, c’est un homme solide et il devrait survivre à cette recette !

La matinée a commencé, non pas sur le parvis, mais à l’angle des avenues Galliéni et Pasteur, par ma rencontre avec Patrick. Nous nous saluons et il me confie qu’écoutant hier « Les grosses têtes », il y avait une question portant sur une œuvre de Stendhal dont le titre serait « Le rose et le vert ». J’ai pensé à un canular. Lui aussi. Figurez-vous qu’il n’en est rien et que Stendhal a bien écrit un ouvrage sous ce titre, paru à titre posthume ! Sans doute une histoire d’amour entre un socialiste et une écologiste.

Et voilà comme quoi, les trottoirs de Bécon font office de dernier salon où l’on peut s’instruire ; une sorte d’antichambre du salon plus officiel : celui du parvis de la gare, bien sûr !

A ce propos, voilà une belle tablée avec, dans le sens des aiguilles d’une montre et en commençant par la benjamine : Amélie, Christiane, Jacques le Biker et Utah, Paul le spécialiste en mécanique des fluides, Robert des établissements Chausson et Jacqueline (Guy, le Poulidor de Bécon nous a rejoints en pratiquant des son arrivée des exercices de musculation par des levées de table intempestifs dont j’ai eu du mal à percevoir la raison). 

Amélie m’a complimenté : d’abord sur mon recueil de poèmes qu’elle a lu en intégralité, puis sur mes chaussures qu’elle pensait neuves. Concernant les poèmes, je l’ai remercié et lui ai dit qu’il était peut-être préférable de ne pas les lire en une seule fois. (Chacun fait ce qu’il veut quand même…). Concernant mes chaussures, j’ai montré mes semelles au prix d’un exercice de contorsion risqué pour mon âge, afin de lui prouver qu’il n’en était rien et qu’elles avaient quelques heures de marche. (Je dois avouer que je n’ai pas, à cet instant, le sentiment d’écrire des choses palpitantes). 

J’ai saisi quelques bribes de conversation entre Robert et Guy, visiblement des experts en science halieutique, qui débattaient de la qualité gustative du sandre et de la voracité du black-bass aussi appelé Achigan à grande bouche ou perche d’Amerique (ou pour les forts en thème : Micropterus salmoides), une espèce très recherchée et élevée pour la pêche de loisir précise Wikipedia (séquence « Science du vivant »).

Guy atteste de sa voracité (celle du black-bass, pas la sienne) car il est possible de le pêcher en plaçant un bouton sur un hameçon et l’animal mord instantanément à l’appas (à condition qu’il soit dans les parages du bouton).

Christiane qui aime rien tant que se moquer de la Maire de Paris a évoqué la vidéo qui tourne en boucle virale, dans laquelle l'édile présente celui qu’elle désigne comme son successeur en commettant le lapsus de l’appeler par le nom de son concurrent. Le bain dans la Seine olympien s’est alors invité dans la discussion (petits sourires moqueurs à nouveau). Laurence a confirmé qu’elle s’y baignerait prochainement. Jacques a parlé des silures de 2,50 m qui chopaient les pigeons sur les berges du fleuve parisien (séquence « Fantastique »). Paul, qui était seul et pensif, a juste précisé que son épouse était chez le dentiste pour un détartrage (séquence « Médecine bucco-dentaire). Nous avons tous été rassurés car il avait fait la mauvaise blague auparavant de nous dire qu’il l’avait vendue. 

Un débat fondamental s’est engagé sur la possibilité d’être, tout à la fois, et de gauche et catho. Débat vite clôt car il a été fait mention du curé des loubards, Guy Gilbert, 89 ans, que Jacques a bien connu (il voulait même lui baptiser sa Harley !… ce qui est un marqueur de gauche ou je ne m’y connais pas). 

C’est ainsi que vivent les hommes (et les femmes d’ailleurs).

jeudi 28 novembre 2024

Ce matin au kiosque 64 : Croix de Feu, Soleil et Poesie

 

Vous voulez encore une autre bonne nouvelle ? Les rayons du soleil caressent les visages des habitués de la terrasse du parvis du kiosque de la Gare de Bécon les Bruyères (TPKGBLB pour les amateurs d’acronymes) à l’heure un peu tardive (11H) où je m’invite à la table de ces privilégiés. 

La canne de Bernard est restée dans une position qui me fait penser à un fusil dont le canon serait orienté vers moi. Je la décale légèrement car certaines cannes peuvent cacher des armes ; comme celle de mon grand-père, Croix-de-feu, qui se vantait d’avoir sectionné avec elle, les jarrets des chevaux des forces de l’ordre lors de la manifestation des milices de droite de février 34. Voilà pour la séquence « Histoire » de cette chronique. 

Pour ceux qui sont face à l’astre solaire, la casquette et les lunettes de soleil sont impératives. Les propos qui suivent (Robert) évoquent les armes qu’il a fallu remettre à la préfecture il y a quelques années ; lesquelles ont fini broyées par un rouleau compresseur. On passe ensuite aux manouches qui ont mis au point (dixit Robert encore, mais Jacqueline semble en connaître un rayon) un véritable vocabulaire basé sur des petites entailles effectuées sur les portes des maisons indiquant, selon leur nombre et leur disposition, si la maison a été ou non déjà visitée, si la propriétaire est avenante, s’il y a quelques dangers, etc. 

Jean-Michel sort de son bunker pour lire ma prose d’hier. Il informe Jacqueline qu’elle figure désormais dans le blog et que l’on sait (le monde entier) que sa vie a été bouleversée par la lecture de « Théories de la surveillance » et l’enseignement de son auteur ; bouleversement qu’elle relativise immédiatement.

Le souffle de la discussion s’essouffle (ça arrive !) et plusieurs songent à quitter le cénacle. Je me permets de leur demander si je peux leur lire un poème. Il n’y a pas d’oppositions et plutôt un certain enthousiasme (ils sont formidables !). Je pioche dans mon sac et j’ouvre le recueil de Jean-Pierre Siméon, acquis hier, en précisant à ma petite assemblée que s’ils ignorent qui est ce Mr, je n’ai que 48H d’avance sur eux… (et il voudrait se dire poète !).

Je lis donc, le soleil aidant, le premier poème du recueil « Avenirs » : « Donnez-vous un soleil ». A la fin de ma lecture, j’ai le sentiment que tous ont partagé la beauté de ce texte, plein d’espoir.

Jean-Michel propose d’afficher un écriteau indiquant « Instant poétique, chaque jour, à 11H ». Pourquoi pas ? Dans tous les cas, j’apporterai un poème dans ma besace chaque matin où je viendrai au kiosque. On le lira, on le lira pas. Ce sera selon.

Mais à tous ceux qui pensent que la poésie est quelque chose d’évanescent, une rêverie plaisante, il faut rappeler les paroles du poète allemand, Novalis :  « la poésie est le réel absolu. Ceci est le noyau de ma philosophie. Plus une chose est poétique, plus elle est réelle. »

Avec Jean-Michel, un peu plus tard, nous avons échangé sur nos amours d’enfance par le truchement du hasard de nos conversations : des illustrations de poèmes, un ami rencontré en vacances et brillant dessinateur, Jonzay près de Rennes où il s’est établi après son divorce, Rennes où j’avais une petite amie au corps délicieux qui faisait des études de médecine, … Ce diable d’homme (JM) a commencé alors qu’il n’avait que 3 ou 4 ans. Je fus moins précoce. Mais là s’arrête mon récit pour aujourd’hui car tout le reste relève de nos «  secret lives », pour paraphraser Leonard Cohen.


mercredi 27 novembre 2024

Ce matin au kiosque 63 : Une rencontre franco-écossaise (et c'était pas le tournoi des 6 nations)

Vous voulez une bonne nouvelle ? Jean-Michel n’a vendu que 2 exemplaires du bouquin de Bardella ! Ça ne peut pas être la mine tous les jours… Et, justement, aujourd’hui, une belle rencontre. Mais auparavant, je dois signaler que JM a pris le sigle FFF arboré sur la casquette d’un jeune homme pour celui de la fédération de fist-fucking ! Par ailleurs, il m’a avoué ne plus avoir le temps de lire comme lorsqu’il était à la librairie technique, rue Lavoisier. Les raisons : il lisait durant ses trajets en train des Andrésis à Paris et, aujourd’hui, le temps semblent s’être comprimé, certainement parce que certains arrêts ont été supprimés. Mais je lui propose une autre raison : en prenant de l’âge, le temps semble s’accélérer. L’espace se dilate et, fatalement, le temps se contracte afin de rester dans une équation espace-temps équilibrée. J’ajoute que nous sommes entièrement, dans ce kiosque, avec notre discussion, dans la Théorie de la Relativité de Mr Einstein. Bon, c’est assez farfelue comme explication ; mais sans doute moins que les vérités alternatives Trumpistes !

Bon, revenons à cette rencontre.

Voilà une jeune femme dans la quarantaine établie qui s’avance avec entrain  vers le comptoir du sieur JM. D’entrée, elle taquine notre passeur avec un solide accent des îles britanniques et m’invite dans le show. Pas toujours facile de décrypter son flot de paroles car, entre l’accent et le rire dont elle ponctue chacune de ses petites phrases… Mais l’impression d’ensemble s'avère très sympathique. Elle se rapproche de moi pour prendre son café allongé (sans e à allongé !) et m’interroge sur la couleur de mes yeux. Verts. Comme moi dit-elle. Elle veut absolument que JM ait les yeux bleus alors qu’il affirmerait sous la torture qu’il les a marrons. Comme mon mari ! dit-elle avec enthousiasme. Je lui suggère dans ces conditions de changer de mari. Elle nous fait un aveu : elle en changera quand ils seront morts tous les deux. (Rires). Elle aime toujours son mari après 26 ou 27 ans de mariage. D’humeur badine, je lui dis que ça ne devrait pas durer. « Mon mari, le plus mervellous du monde », ajoute-t-elle pour sa défense. Je finis par lui demander l’origine de son accent. Écossais ! De Glasgow. Nous les français, nous avons une bonne opinion des écossais (Ah ! l’alliance séculaire franco-écossaise, whisky et panse de brebis farcie !). Je me souviens d’un week-end à Édimbourg pour un match de rugby contre l’Ecosse. Quelle fête ! Et puis mon beau-père (qui mérite de figurer dans ces chroniques) qui allait chasser la grouse dans les highlands couvertes de bruyères !    

Je suis sorti et nous poursuivons debout  notre tête-à-tête franco-écossais sous le regard jaloux de JM (il me l’avouera plus tard). Je découvre alors une femme pleine d’humour et d’enthousiasme, excessivement positive. Elle me parle de la beauté de la diversité (les oiseaux, les fleurs, les humains avec leurs couleurs de peau si différentes), du soleil, de la vie, du fait que nous sommes tous frères et sœurs, qu’il n’y a pas de différences entre un insecte et nous, pas plus qu’entre elle et moi (sur ces 2 derniers points, je marque un léger désaccord, mais je la laisse poursuivre). Elle évoque les milliardaires dont les squelettes ne vaudront guère plus que les nôtres quand nous serons sous terre (je suis bien d’accord). Elle considère qu’il faut se méfier de paraître trop intellectuel au risque de frustrer les autres (encore d’accord bien que je lui fasse part du fait que l’on peut être intellectuel et tenter d'être proches des gens… j'allais dire les gueux, on ne se refait pas !). C’est à son tour d’être d’accord avec moi et d'ailleurs elle me gratifie d'un compliment : "Vous semblez être une personne très ouverte", qu'elle justifie par le fait que j'ai encore pas mal de cheveux; Et bien sûr, quand on évoque les cheveux ou leur absence, on en vient au boss : JM et un air bougon au 1er abord, mais si on prend l’image du chat et du chien. Le chat qui ne se livre pas immédiatement mais qui fait ensuite des câlins et le chien servile qui vient vous mordre. La démonstration est imparable. L'évidence saure aux yeux : JM est un passeur doublé d’une psychologie de chat. (Je dénonce une nouvelle fois : je l'ai vu ce matin faire les yeux doux à une certaine Nicole...).

Sur ces entrefaites, Jacques se pointe avec Utah qui ressemble à un mouton astrakan. Ses poils (ceux d’Utah, pas de Pascal) ont un moiré splendide qui rappelle celui de certains tissus Fortuny de Venise (Mariano Fortuny, génial créateur tant en art qu'en technique et inventeur de la célèbre lampe encore opérationnelle sur les plateaux de tournage). Pascal (qui a voyagé) me confirme que la panse de brebis farcie, c’est un régal. Admettons.

Sophie arrive alors que je dois partir pour le marché. Bises et désolé, je dois partir… 

Kate - c’est le prénom de ma pétulante écossaise - me dit à bientôt pour un café ensemble. Bien sûr. 

Étonnant : depuis le temps que je viens ici, je n’avais jamais croisé Kate.

Pour finir, quelques fragments d’un poème de Jean-Pierre Siméon qui résonnent avec l’enthousiasme de mon écossaise : 

Donnez-vous un soleil,

Je vous en prie

Donnez-vous un soleil

Fût-ce à l’instant du départ 

Fût-ce sur la ruine du paysage

Fût-ce pour éclairer 

L’échec de l’amour et de la raison

Donnez-vous un soleil…


mardi 26 novembre 2024

Ce matin au kiosque 62 : Mécanique des fluides, Travail à la chaîne et héliothérapie fugace

Point météo ce matin : pas de pluie mais refroidissement significatif sur le parvis de la gare de Bécon les Bruyères. Petit café et échange sympathique avec JM. Des inexactitudes dans ma dernière chronique. Mais, après tout, ne suis-je pas romancier et donc, quelques entorses avec la vérité… ? (sans sombrer dans la fake News). Il me parle à nouveau de ce mystérieux photographe (le fantôme de Raoul Minot ?) qui pourrait illustrer mon recueil de chroniques. Il faut impérativement qu’il nous organise une rencontre. Mais l’homme a déjà essuyé un revers : les « habitués » ont refusé qu’il les prennent en photo !

J’ai oublié de mentionner qu’hier j’avais offert mon 3eme recueil d’Apprentissage à Amélie. Elle m’a dit que ça la touchait beaucoup. Nous avons fait un « Check » et je me demande si ce n’est pas le 1er que je fais (quel boomer !). Je suis même allé jusqu’à lui prodiguer quelques conseils d’écriture en matière de poésie : Se libérer de la rime et des « pieds » ; on ne peut rivaliser sur ce terrain avec des Baudelaire ou des Verlaine ; la poésie doit être une expression libre. Bon, ça c’était hier.

Ce matin, autour de la table, une belle compagnie (comme toujours) : Geneviève, Jacqueline, Jacques, Paul, Bernard et Robert. Guy (le cycliste) est venu nous rejoindre. Bref : que du beau monde. Il manquait Sophie qui, comme tous les mardis, devait être aux Restos du Cœur.

Jacqueline (rappelez-vous, c’est la dame qui s’était exclamée qu’on lui cachait tout quand quelqu’un m’a présenté comme l’auteur d’un roman), je la découvre. Je m’assois à côté d’elle et elle me demande si je suis celui qui signe des petits post-It sur les livres. Je lui réponds que pour la plupart des post-it, non. Mais elle poursuit en précisant qu’elle voulait parler du livre sur la télésurveillance informatique (cf chronique No 24). Celui-là, oui, c’est bien moi. Elle m’apprend alors que son auteur, Olivier Aim, a été son professeur quand elle a passé, tardivement précise-t-elle, un master en communication. Elle a d’ailleurs un autre master et, si elle s’écoutait, elle n’arrêterait pas de faire des études. Son frère un jour lui a dit que sur sa tombe il graverait Master No1, No2, No3, etc. Délicate attention… Remarquable professeur ajoute-t-elle ; il a changé ma perception de la société et notamment de tout ce qui a un rapport avec le panoptique de surveillance. Je lui confirme que j’ai trouvé le bouquin remarquable et que j’aime bien échanger avec lui quand il vient prendre un café. On pourrait penser qu’il snobe certains, mais c’est faux : c’est un homme réservé. Je devine par la suite que Jacqueline doit être en arrêt de travail. Elle est encore fatiguée. Je n’en saurai pas plus.

Je vais me concentrer à présent sur 2 sujets qui ont retenu mon attention. Figurez-vous que nous avons eu un topo de haut-vol et à 2 voix sur la mécanique des fluides, les châteaux d’eau - leurs systèmes de pompage et de redistribution gravitaire, le calcul des volumes d’eau tenant compte des variables que sont les besoins et leurs fréquences, etc. Les orateurs : Bernard (casquette de golfeur noire vissée bien à fond à la Trump) qui représentait le privé et Paul (bonnet en laine) le public. J’ai compris qu’ils faisaient tous les 2 les mêmes choses, mais que l’un a gagné 3 fois plus que l’autre. C’est beau le capitalisme !

Le second sujet avait trait à nos expériences de travaux de jeunesse ou à la chaîne. J’ai fait valoir que j’avais posé des bordures de trottoirs et que j’y avais appris à confectionner des avaloirs et à dessiner des courbes qui relient des droites avec un rayon progressif. Jacques a serti des cosses de batterie. Paul a posé des rails et des traverses de chemin de fer dans le métro. 

Geneviève, qui n’avait pas de souvenirs de cet ordre à nous proposer, nous a fait remarquer qu’elle avait certainement été la seule à remarquer un rayon de soleil timide qui était venu s’inviter furtivement à la table. La poésie s’invite !

Robert m’a confirmé qu’il avait fait des recherches sur les points d’attache de sa famille dans l’Yonne et en Puisaye (le pays de Colette), que l’un de ses cousins était un habile financier qui avait monté sa boîte de conseil en investissements après un séjour aux US, alors qu’il était étudiant. Le cousin (Cristobal ?) a fait fortune, ce qui lui a permis d’acquérir en Angleterre l’un des 3 modèles d’un petit cabriolet conçu par les établissements Chausson avant guerre. Il devrait en faire don au musée de Compiègne. Je lui ai confié que j’avais consulté l’histoire des établissements Chausson sur Wikipedia. Je n’ai pas évoqué le fait que j’ai appris que cette histoire - florissante - s’était achevée par un dépôt de bilan dont les raisons semblent relever d’erreurs stratégiques et d’une mésentente entre héritiers.

Un tour de table a été effectué pour savoir s’il fallait tondre ou non Utah. Les avis étaient partagés. Jacques, son maître, étant pour, Utah va donc passer chez le coiffeur !

J’ai appris que des ados s’étaient tués en faisant du rodéo en mobylette. Info du Parisien probablement. Jacques le biker n’est pas surpris : les engins développent 180 CV et ne pèsent que 250kg ; on appuie un peu et la roue avant se lève sans efforts. Alors, c’est fatal…

Pour finir, mais ça n’a rien à voir ou presque avec l’objet de cette chronique : Je vous conseille la lecture du dernier No de l’heddo 1 sur le thème d’où va la Gauche ? Et l’achat (5€) de l’opus « Résister » de la journaliste Salomé Saqué, rédactrice en chef de Blast. (Voilà pour ma petite propagande de gaucho-wokiste). 

lundi 25 novembre 2024

Yes we can ? 5 : Everybody Konws

Avec cette chanson sortie en 1988 - il y a près de 40 ans - Leonard Cohen fait figure d’oracle. 

J’ai tenté ici, non pas une interprétation littérale des paroles (encore que, souvent, les mots résonnent avec beaucoup d’acuité et que la métaphore se fait très réelle), mais un « parcours de pensée ».

Je ne pouvais pas ne pas me remémorer les paroles de Cohen lors d’une interview, quand il dit que « la poésie est un reportage sur la vie réelle ». Ici, il regarde plutôt en avant, mais avec beaucoup de lucidité.


Le titre, « Tout le monde sait », (qui est aussi le nom de mon blog…), nous renvoie au « On ne pourra pas dire qu’on ne savait pas » qui nous met face à nos responsabilités.


La chanson s’engage sur un constat : Les dés sont pipés et on avance en croisant les doigts ; autant dire : nous ne pouvons rien à la marche du monde, ça nous échappe et le mieux à faire est de croiser les doigts (ou de prier). Combien de fois avons-nous entendu cette résignation face à une marche du monde qui nous dépasse ?

Autre résignation lucide quand Cohen poursuit avec la défaite des types biens et le constat que la « guerre » (ou la lutte) a été truquée, car les pauvres restent pauvres et les riches s’enrichissent encore davantage. N’est-ce pas une image pertinente de notre époque ? « C’est comme ça que ça se passe » et « Tout le monde le sait » (personne n’est dupe).


Dans le second couplet de la chanson, Cohen évoque un navire (notre société) qui prend l’eau, le patron qui a menti (difficile de ne pas penser à Trump, mais à d’autres : Bush, Blair, Macron, Poutine, etc.), un sentiment d’une blessure au plus profond de nous-mêmes, mais que nous ne voulons pas affronter si bien que nous nous réfugions dans le dérisoire (une boîte de chocolats, une tige de rose).


Dans les 3eme et 4eme couplets, on a affaire à du Cohen pur dans son personnage de « lover » désabusé : Tu m’aimes et tu as raison de m’aimer, nous avons eu à nous une ou deux nuits, mais tu en as passées tellement avec d’autres…

Et puis, la noirceur du personnage se fait plus évidente quand il évoque les rails de coke, une époque pourrie dans laquelle l’esclavagisme est encore présent pour servir notre superficialité (« Old Black Joe's still pickin' cotton/For your ribbons and bows »). Comment ne pas penser aux ravages de la drogue, aux cartels et autres mafias, et aux populations pauvres qui produisent des objets de consommation pour les sociétés riches ?


Dans le 5eme couplet, la noirceur de Cohen se fait encore plus profonde puisqu’il annonce la déferlante d’une catastrophe (ici la peste, mais on peut penser aux pandémies ou au dérèglement climatique). Plus personne ne croit en un âge d’or possible, une certaine pureté naïve (celle d’Adam et Ève) qui appartient à un mythe du passé. Nous vivons dans le présentisme et notre « horizon d’historicité » est réduit à l’incrédulité ou la peur (le repli sur soi).


Le 6eme couplet m’apparaît comme moins évident à comprendre. Cohen fait état d’une vérité qui sera découverte à notre mort. Peut-être veut-il évoquer le fait que ceux qui se pencheront dans le futur sur notre époque identifieront parfaitement nos troubles ainsi que le fait que nous ne pouvions ignorer l’état de la situation ?


Dans le dernier couplet, Cohen revient à la dimension mystique des choses. Entre la croix de Jesus et la plage de Malibu, il y a cet espace infini qui couvre le monde et réunit le tragique et le superficiel. Mais, n’est-ce pas la vérité du monde ? Cohen, enfin, nous exhorte à regarder avec lucidité, en étant inspiré par une certaine transcendance, comme un dernier espoir avant que tout « explose ».


Ce matin au kiosque 61 : La nef des fous

Il pleut sur Becon. Un faux temps de novembre car, si la pluie détrempe les amas de feuilles jaunies qui jonchent les trottoirs du quartier des maisons bourgeoises, la température est plutôt douce pour la saison. Je rejoins le kiosque à l’abri de mon parapluie. J’avais laissé samedi Jean-Michel en mauvaise forme. Je l’interroge sur son état physique (à défaut de m’inquiéter de son état mental) : pas brillant et tout le week-end au lit. Mais, ce matin, il est fidèle au poste ; ses étagères affichent les dernières productions du monde selon Bolloré. Une dame s’enquiert de la disponibilité de « Londres » de Céline. Négatif. Je m’autorise à lui dire qu’elle peut s’en passer. Et pourtant, elle a entendu tellement d’éloges sur le bouquin ! JM lui dit qu’il y a mieux en magasin en désignant « Abuelo » et en appuyant sur le fait que l’auteur est ici présent. Comment dit-on ? C’est comme s’il avait pissé dans un violon ? Rien de grave. Ma susceptibilité d’écrivain incompris s’est émoussée au fil du temps.

JM a été cambriolé le 10 novembre. Il me montre sur son smartphone les photos de son intérieur mis à sac. Sept coups de tournevis ont été repérés sur la serrure de l’arrière du logement. Ce sont les bijoux de sa campagne qui « ont pris chers » (comme on dit à présent). Ils étaient partis à Orléans fêter les 90 ans de leur oncle. Le chien était resté à l’intérieur et un voisin devait venir dans l’après-midi pour le sortir. Quand il est venu, le chien était dehors. Le voisin a cru qu’ils étaient dans la maison. Quand JM et sa compagne sont rentrés d’Orleans, ils ont été surpris de voir le chien dehors. Puis, JM a ouvert la porte d’entrée et le chat est sorti précipitamment. Une autre bizarrerie, avant de découvrir l’état de l’appartement avec toutes les affaires sens dessus dessous. Dépôt de plainte au commissariat et venue le lendemain de la police scientifique. Dépôt de plainte à l’assurance. Le mot de conclusion de JM : on n’est plus en sécurité…

Durant notre discussion qui traite de sujets divers comme celui du boycot de X, JM continue à servir des clients. Une dame paraît intéressée par notre échange sur X (a-t-elle bien compris qu’il ne s’agissait pas de porno ?). Je parviens difficilement à comprendre comment on ne peut pas sauvegarder ses données stockées dans les messages échangés sur ce réseau social, désormais caisse de résonance du trumpisme et de toutes ses déclinaisons misérables. Ça me fait penser qu’il faut que je poursuive la sauvegarde des textes de mon blog. 

Un jeune homme noir commande 3 cafés et un sachet de sucre qu’il emmène sur la terrasse sur un plateau en plastique et sans oublier de nous souhaiter une bonne journée.

Robert arrive sur ses béquilles. Élégant chapeau de gentleman-farmer solognot et mitaines. Il me salue d’un « Monsieur Labbé », en me disant qu’il n’allait pas continuer à m’appeler ainsi. Je n’ai pas la présence d’esprit de l’inviter à dire « Claude ». J’évoque le fait que j’ai déduit, chez des personnes plus jeunes que nous, que la signification du mot « Labbé » leur échappait car elles me demandaient comment ça s’orthographiait. Sécularisation de la société…

Robert me demande si j’étais en Bourgogne. (JM m’a dénoncé !). Oui, chez des amis et, à ce propos, je me souviens que nous avons évoqué lors d’un dîner la famille Chausson. Le père de mon amie était un cousin germain (probablement) d’un Chausson et à ce titre, il fut directeur de 2 établissements de la Société Algéroise des radiateurs Chausson. Puis nous évoquons l’île de Ré où Robert a loué plusieurs années, en particulier à Loix et à La Flotte. Il avait même fait construire un voilier en bois au chantier naval de La Rochelle avec son cousin. Ils l’ont convoyé jusqu’à Sainte-Maxime, où ils avaient une résidence, via le canal du midi. Magnifique, le canal du midi à cette époque.

J’ai omis de préciser que nous poursuivions la discussion, Robert et moi, à l’extérieur, à la table où Geneviève et Christiane étaient installées, devisant de leur coté. 

A un certain moment, après avoir passé en revue toutes les félicites de l’île de Ré, je me suis rendu compte que je n’avais pas salué ces dames.

La conversation a repris entre nous 4 sur des sujets aussi divers que l’usage du smarphone pour la photographie (une sorte d’hérésie pour Robert qui aime à photographier la Sologne avec les beaux appareils dont il dispose), le paiement ou la lecture du journal (juste les titres car le contact avec le papier d’un « vrai » journal est irremplaçable). D’un commun accord (avec mon abstention), l’usage de la monétique contemporaine est rejetée. L’autre grand sujet c’est le monde comme il va et sa folie. Le gouvernement de Trump comme la nef des fous ; Macron qui va faire des simagrées avec Javier Milei, le président argentin (lui a-t-il offert une tronçonneuse ?) ; mais ici, voyez Panot… la poissonnière !  D’un commun accord à nouveau (avec mon abstention), Mathilde Panot est vouée aux gémonies, clouée au piloris fictif du parvis du kiosque de la gare de Bécon-les-Bruyères. Je me fais la réflexion que LFI a réussi à cristalliser un rejet définitif parmi une population qui, si elle n’est pas franchement de gauche bien sûr,  n’épouse pas non plus les thèses de l’extrême-droite. Mais il semble plus courant, plus évident aujourd’hui, de dénoncer les écarts de la gauche radicale que ceux de l’extrême-droite. Le fruit de la dédiabolisation du RN ?…


samedi 23 novembre 2024

Yes we can ? 4 : boycotter X ?

Récemment, j’ai été amené lors d’un repas à faire part de mon étonnement concernant le fait que les grands médias et les
 personnalités de gauche n’avaient pas suivi l’initiative du Gardian, du Vangardia ou de Ouest-France de boycotter le réseau X. Je fus doublement étonné de ne pas avoir de soutien d’autant que la plupart de mes interlocuteurs étaient de jeunes adultes de gauche.

Qui plus est, j’ai ressenti que mes propos étaient tournés en dérision parce qu’il semblerait qu’il y ait une loi d’airain : X est incontournable. J’ai eu le malheur d’ajouter que la gauche était assez largement absente des réseaux sociaux comparée à l’extrême-droite (un certain nombre d’articles récents l’ont parfaitement identifié). 

Face à l’argument d’incontournabilité qui m’apparaissait comme un aveu défaitiste (et peut-être aussi conformiste), j’ai pensé à un certain nombre de combats dans l’histoire pour lesquels il eut été facile de baisser les bras tant les chances de la minorité résistante paraissait infinitésimales. (Nouveau signe de ringardise).

Ce réseau social est aujourd’hui aux mains de l’homme le plus riche du monde qui s’en sert comme d’un instrument de propagande au service de ses idées toxiques et de son business lucratif. Il n’en a évidemment pas l’exclusivité et, jusqu’à présent, il est encore ouvert à tous, ou presque, car certains comptes opposés à Musk ont été fermés.

Pourquoi ne pas adopter aussi cette attitude de résignation vis-à-vis du capitalisme ou de l’agro-industrie, qui sont en position ultra-dominante ? Twitter a été créé il y a moins de 20 ans. Peut-on imaginer qu’en 2044 on soit encore obligé de s’abonner à X pour « exister » ? 

Notre époque se caractérise par une véritable soumission aux réseaux sociaux qui constituent le socle fragile et prioritaire des relations entre individus, autant que la possibilité de se créer un double narcissique. Je suis abasourdi par la religion du « like » ou du « follower ». Ce n’est plus le « cogito ergo sum », mais le « je like donc je suis ». « L’existentialisme » façon X est réduit à 280 caractères (gratuits) et à l’instantanéisme ; ça me paraît un peu court pour faire société.

Bref, tout ça est un peu en vrac, mais n’y a-t-il pas aujourd’hui une alternative à trouver ? 

J’ai entendu parler d’au moins 2 réseaux concurrents : Mastodon et Bluesky.

Et si David contre Goliath n’était pas qu’un récit biblique ?

vendredi 15 novembre 2024

Yes we can ? 3 : Quoi pour réinventer le bonheur ?

« Dire qu ‘ « il faut une politique économique plus juste et équitable » est une chose, croire que cela conduira le peuple à se détourner des populistes est une illusion », pense mon ami B. faisant suite aux déclarations de Lucie Castets parues dans Alternatives Économiques.

Il a sans doute raison et le « dire » doit être suivi du « faire » et du « faire savoir », sans quoi il ne s’agira que de vaines incantations.

Le « faire savoir » est aujourd’hui fondamental et il passe par les canaux des réseaux sociaux qui sont une caisse de résonance incontournable à une époque où une majorité de personnes - et en particulier dans les classes d’âge de 18 à 35 ans - s’informent quasiment exclusivement via ces médias. 

Plusieurs articles ont souligné le déficit de la gauche en matière de maniement des réseaux sociaux dans le relai des idées politiques. Ce déficit s’explique en partie du fait qu’il est plus facile de dénoncer ou d’affirmer sans preuves que de bâtir un argumentaire solide, documenté et objectif. Par ailleurs, à l’ère du triomphe du clash, de la « punchline »et de la « scrollture » (scroller + lecture), le message alliant virulence et concision constitue une arme de destruction massive de la capacité de réflexion et d’analyse. Un message relayant des idées positives, des actions suggérant un effort particulier sur la base de concepts tels que la protection du vivant, la solidarité ou une notion du bonheur détachée de pulsions consuméristes et d’enrichissements financiers, sans qu’il s’agisse d’un appel à embrasser une cause philosophico-ésotérique fumeuse, a ainsi toutes les difficultés du monde pour trouver son auditoire. 

Question en guise de conclusion : Et si nous parvenions à redéfinir le bonheur ?

mercredi 13 novembre 2024

Yes we can ? 2 : Orwell plutôt que Marx ou Hégel ?

Voici un premier commentaire d’un ami avec lequel je converse de ces sujets :

Mon cher Claude

(…) La question est sérieuse : comment sort-on du populisme à l’heure des réseaux ? Les réseaux peuvent-ils se retourner ? La dimension économique je  n’y crois pas. Les populistes peuvent affamer le peuple qu’il les soutiendra encore. Ça s est vu sous toutes les dictatures. Il est très difficile d’en sortir. Il faut utiliser au maximum les espaces qui nous restent.

Ceci veut aussi pour Castets. Dire « il faut une politique économique plus juste et équitable » est une chose, croire que cela conduira le peuple à se détourner des populistes est une illusion.

Décidément la question du peuple moteur de l histoire et du progrès social et humain est centrale et des plus épineuses.

(…) 

Il faut espérer que les populistes feront suffisamment d’erreurs pour scier la branche sur laquelle ils ont indûment pris place.

Décidément il faut peut être substituer Orwel à Marx et Hegel.

Espérons néanmoins : chaque jour est un jour nouveau et le monde peut en être bouleversé.

Yes we can ? 1: Quelle stratégie pour un message humaniste ?

Le monde se prépare à des lendemains compliqués ; ça n’a échappé à personne sauf aux simples d’esprit ; même les cyniques doivent y trouver matière à profit ; je range les indifférents parmi la première catégorie, avec moins d’excuses.

J’entends souvent l’argument, relevant du fameux et parfois sinistre « bon sens », consistant à déclarer que l’histoire de l’humanité a toujours été ponctuée de crises épouvantables (guerres, épidémies, génocides, etc.) et qu’elle s’en est toujours sortie. Bien sûr, celle qui s’annonce fera date. Mais la Science saura se faire providentielle et nous permettra de surmonter cette crise ; c’est tout du moins l’avis des technicistes (qui ne sont pas tous, ni cyniques ni indifférents).

Rien n’est moins certain : les signes d’un effondrement possible si nous ne changeons rien à nos modes de vie - effondrement annoncé par le milieu scientifique depuis 50 ans - sont de plus en plus tangibles et défraient l’actualité.

Mais il me semble important de distinguer 2 crises, même si elles sont interconnectées : l’une de nature sociétale (ou sociale, ou psychologique), l’autre environnementale. 

Dans cette chronique, j’ai voulu m’intéresser prioritairement à la première, sans négliger la seconde de nature éminemment « existentielle » ; les résultats de l’élection aux US ne sont pas étrangers à ce choix.

Ainsi, je m’interroge, non pas sur les causes de l’attractivité du populisme et de l’extrême-droite dans des pays qui ont longtemps porté les valeurs de la démocratie - on connaît assez bien ces causes sans que l’on puisse toujours en analyser ou comprendre les paradoxes -, mais sur la capacité d’un discours porteur de valeurs démocratiques, préconisant en particulier la solidarité et la protection du vivant, à parvenir à renverser le « main stream » actuel dont le paroxysme est tout entier dans le courant « MAGA » dont on peut résumer les leitmotivs : xénophobie et priorité nationale, glorification de la consommation et déni environnemental, haine des élites et des immigrés.

Mon vœu le plus cher, dans ce cadre, serait de trouver une réponse à la question qui me taraude depuis un certain temps : quelle stratégie non violente adopter pour parvenir à renverser cette tendance ?

J’ignore si ce texte sera lu et suscitera des commentaires, mais un autre vœu serait que la réponse puisse se bâtir à partir de plusieurs - le plus possibles - de contributions.

A suivre (dans une prochaine chronique).