vendredi 3 février 2012

Résumé des épisodes précédents :
X était à bord d'un voilier magnifique qui vient d'échouer dans un port ; heureusement le long d'un quai. Quelques instants avant l'incident, il était en train de prendre l'apéritif à l'avant du bateau, dans un Chesterfield rouge, en compagnie d'une jeune femme bronzée et aux dents ultra blanches.

X ne devina pas immédiatement où le voilier venait d'accoster. C'est en prenant pied sur le quai constitué de grosses pierres de granit rose dans lesquelles les anneaux d'amarrage avaient inscrit leurs empreintes circulaires, qu'il le su comme une évidence. Pourtant, le paysage autour de lui ne correspondait pas à quelques chose de précis ; plus exactement, il s'agissait d'une sorte de patchwork, comme si le décor qu'il balayait du regard était constitué de fragments de plusieurs villes et lieux différents. X pouvait donc être à la fois à Brouage dont il distinguait quelques maisons basses et les remparts en pierre blanche des Charentes, à Venise sur la promenade de la Giudecca du Dorsoduro, ses frontons palladiens et les portes en bois fatiguées des anciens hangars à bateau, ou encore sur la cale n°1 de l'embarcadère de l'île de B., face aux deux hôtels enduits à la chaux qu'il a toujours connus ; l'un avec des volets rouges, et l'autre avec des volets bleus. D'autres images lui venaient à l'esprit, mais moins évidentes. X avait conscience de l'invraisemblance de ce paysage. Mais ce montage urbain était-il si irrationnel que ça ? N'existait-il pas en définitif, quelque part ? mais où ? Puisque ce n'était pas dans son imagination, puisqu'il pouvait le voir, le toucher, passer entre ses ruelles, être un instant rue du Bourg et un instant plus tard Calle de l'Abazia.


X sentit que quelqu'un lui effleurait l'épaule. C'était la jeune femme qui le rejoignait. Elle tenait toujours son verre de whisky à la main et sa casquette de marin était assez largement renversée vers l'arrière. X remarqua ses cheveux, ou plutôt l'absence de ses cheveux. La jeune femme lui souriait. Elle l'invita à se retourner. La mer n'existait plus. A sa place, X pouvait voir une plaine immense comme celle qu'il avait aperçue du haut des falaises de Bandiagara au pays Dogon. Ils s'approchèrent du bord du plateau. Sous leurs pieds un vide de caillasses et de gros rochers entre lesquels on devinait des passages aussi étroits qu'acrobatiques. Plusieurs panaches de poussière de sable se déplaçaient au loin. X en compta cinq, pratiquement de front. La jeune femme lui dit que c'était les hommes du propriétaire du bateau qui venaient en moto les rechercher, et qu'il fallait immédiatement se cacher. Il est probable qu'on leur avait demandé de retrouver l'équipage et de tuer chacun de ses membres.

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