vendredi 17 janvier 2025

Ce matin au kiosque 87 : général Rouyer, « En Fanfare » et Tana chez les paras,

Très petit cénacle ce matin : Amélie, Tana Umaga, Gilles le Biker, Genevieve et Christiane d’Anatolie.

Genevieve nous informe que ce n’est pas toujours facile de manœuvrer un pilulier. Je suis obligé de la croire sachant que, par bonheur, son usage ne m’est pas encore imposé. Nous sommes revenus sur l’échange que Gilles a eu avec son infirmière et ce que j’ai considéré comme un compliment quand elle a fait état de sa carrure (Tana l’a interprété comme une avance). Genevieve intervient dans le débat avec pertinence : vous n’avez quand même pas la silhouette d’un danseur mondain, lui dit-elle, s’adressant à Gilles. J’ai compris « danseur exotique » ; vous savez : tablette de chocolat, pectoraux glabres et musclés d’adonis, jeux de hanches sexuels et sourire figé laissant imaginé que le type est satisfait de se produire en string devant un parterre de touristes blasés. 

Pourquoi en sommes-nous venus à évoquer Ferrat, Aznavour, Trenet et Brassens avec un brin de nostalgie ? Si, voilà : Genevieve (encore !) qui nous demande si on a vu « En fanfare ». Je m’aperçois avec stupeur que Genevieve ne lit pas mes chroniques : mauvais point !

Bref, oui, j’ai vu « En fanfare » et j’ai même chialé durant une bonne partie du film ; mais, ça, pour des raisons très personnelles. Le final est formidable avec cette fanfare qui joue… mais non, je me suis gouré : j’ai confondu avec la scène splendide d’ « Emilia Perez » quand une autre fanfare reprend « Les Passantes » de Brassens. Dans « En Fanfare », c’est « Le Boléro » de Ravel, interprété a capella ; magnifique aussi.

Tana nous a parlé de son service militaire chez les paras à Pau. Il faisait partie de la musique du régiment. Un adjudant (probablement) lui ayant demandé s’il savait jouer d’un instrument, il lui avait répondu qu’il avait une dizaine d’années d’accordéon ; le juteux lui avait dit : c’est bon, donc tu vas aller jouer du cor ! Et c’est ainsi que Tana a joué du cor (pas « du corps », encore que…) en défilant au pas sur la Promenade des Pyrénées et sous le regard d’une Lolita qui cherchait à l’évidence à perturber cette troupe de testosteronés, en apparaissant « oualpée » à un balcon.

C’est à l’intérieur du kiosque que j’ai revu Christine. Elle m’a rappelé le nom de son aïeul général de Napoleon dont le nom est gravé sur le pilier nord de l’Arc de Triomphe : Rouyer, Marie François. Il y en a une petite tartine dans Wikipedia sur cet homme qui a passé 40 ans de sa vie à guerroyer un peu partout en Europe, de la Turquie à l’Espagne, en passant par la Belgique et l’Autriche, et sans le Guide du Routard ! Ce que ne dit pas Wikipedia, mais que Christine m’a révélé sous le sceau du secret, c’est que l’homme n’était pas seulement un hyper-actif sur les champs de bataille, mais aussi sous l’édredon ! Sa progéniture aurait dit-on fait pâlir d’angoisse Malthus (1766-1834). Et enfin, ce qu’ignore encore Wikipedia, c’est qu’il est enterré au château sinistre de Couvonges à Harchechamp dans les Vosges. Longtemps le bruit a couru que sa tombe était au Père Lachaise et que, compte-tenu de sa fertilité, de jeunes femmes en mal de maternité s’adonnaient frénétiquement à des exercices manuels sur une excroissance de son gisant ; mais tout ceci (le gisant, l’excroissance) n’est que pure légende et fut démenti par une commission d’enquête sollicitée par les amis du journaliste Yvan Salmon, dit Victor Noir (1848-1870).

Il faut ajouter qu’on a longtemps cru qu’une dénommée Malcy Anne Jeanne était sa fille, alors qu’il n’en était rien, mais qu’il s’agissait d’une drolesse qu’il avait adoptée, laquelle finit par faire un beau mariage avec un pair de France (j’évite la plaisanterie graveleuse), héritier de la famille Clary dont l’arbre généalogique s’enorgueillit de deux reines, une d’Espagne et une de Suède et Norvège, ainsi que d’une tripotée de députés et sénateurs. 

jeudi 16 janvier 2025

Ce matin au kiosque 86 : Echenoz, MBS, Volupté de la piqure et casquette ombragee

Gris, gris, gris. Pas vraiment un « beau matin soulignant le contour des choses », comme a pu l’écrire Virginia Woolf.

J’ai fini tard dans la nuit le dernier Echenoz, « Bristol », et mon avis est que l’auteur de « L’équipée malaise » n’a pas, dans ce dernier opus, forcé son talent… Peut-être retiendrai-je de ma lecture le passage plutôt loufoque (mais qui aurait pu être à se tordre de rire) du héros du nanar que Bristol tourne au Botswana et qui, parachuté d’un hélicoptère (?), atterrit sur le dos d’un éléphant que la toile de son parachute aveugle et rend furieux, si bien que ledit héros se prend les pieds dans les suspentes, hurle de peur et finit par se démettre une rotule. Peut-être, cette actrice de seconde zone nymphomane mais qu’un Frederic Dard aurait fait grimper aux rideaux avec davantage de jubilation ? Les personnages sont tellement improbables (le général africain des forces rebelles, la jeune Céline Oppen, Genevieve la maîtresse de Bristol, …) qu’on finit par ne pas y croire du tout. On passe un moment de lecture, c’est tout. « Peut mieux faire », voilà l’appréciation pour l’élève Echenoz.

Bon, les amis, on n’est pas là pour parler de mes états d’âme littéraires.

Isabelle, la compagne de JM, a apprécié que je précise dans la chronique précédente que ce n’était pas des salopards de collabos dont elle était folle, mais de la saga Sadorski. Ouf !

Quand je viens boire mon café sur la terrasse, il n’y a qu’un comité restreint : Tana Umaga et son épouse Sophie, le Biker et bientôt Genevieve qui nous a apporté une boîte de délicieux chocolats en provenance du nouveau chocolatier de Bécon : la Chocolaterie, un breton qui concocte d’excellents produits. Genevieve  toujours, nous fait 2 confidences, de ces confidences dont elle a le secret : elle n’écrit plus que sur une feuille comportant des lignes car elle avait constaté que ses phrases s’envolaient ; elle ne parvient plus à fermer les boutons pressoirs de ses manteaux. Aucun d’entre nous paraît pouvoir suggérer à Genevieve une thérapie à la hauteur des dysfonctionnements cognitifs majeurs qu’elle connaît. 

Tana enchaine sur la beauté de la France. Notre jury est unanime : elle est belle la France (et non : « Ah, ouais… elle est belle la France ! » comme quand un gugusse bien facho sur les bords maugrée contre la politique laxiste du gouvernement). La magie de l’intonation !

Le dieppois nous a rejoint, armé pacifiquement de son éternel sourire. Si j’ai bien compris, son épouse travaille chez un grand couturier (Dior?) dont une partie du business est au Proche-Orient, auprès des monarchies pétrolières. Son déplacement actuel serait en rapport avec la nouvelle épouse de MBS (tient, c’est drôle que ce découpeur d’opposants en tranches figure dans cette chronique !). Sur le nombre de ses femmes, le flou subsiste : MBS a affirmé qu’il n’en avait qu’une, mais le Journal du Québec écrit qu’il a aussi 3 concubines, quand d’autres médias lui en attribuent un cheptel de plusieurs dizaines. C’est étonnant ce pays on l’on est forcé de vivre dans une sorte d’anachronisme permanent.

Gilles le Biker s’est éclipsé quelques minutes pour se faire piquer. Il revient en nous disant que ces infirmières, elles doivent en voir des vertes et des pas mûres car la sienne lui a dit, avant de le piquer : vous ne craignez pas les piqûres ? Non, a-t-il répondu, en rigolant. Et l’infirmière de lui répondre : ah bon, parce qu’avec votre carrure, j’aimerais pas que vous vous fâchiez !

Vous auriez vu notre biker : tout fier (comme un bar tabac) de sa carrure ! Mon avis qu’il va retourner se faire piquer avec plaisir…

Robert, toujours d’une élégance d’hobereau, s’installe les bras surchargés de sac-cabas et encombré de sa béquille.

Bernard l’a précédé d’une petite longueur, coiffé de son éternelle casquette noire dotée d’une visière tellement longue que je m’interroge sur un défaut possible de confection. Du visage de Bernard, s’il n’enlève pas un jour sa casquette, je ne connaîtrais que le bas de son nez et sa bouche ; le reste est plongé dans une obscurité totale : la camera obscura ? Nous voit-il en silhouette inversée ? Croyez-vous qu’il se vexera si je l’interroge à ce sujet ?

C’est ainsi que les hommes vivent (avec ou sans casquette).

mercredi 15 janvier 2025

Ce matin au kiosque 85 : Les ventes explosent, le brumisateur et le hareng dieppois,

Il y a comme ça, dans la vie des séries, des mauvaises, comme des bonnes. Un avion se crashe quelque part dans le monde et rapidement 2 ou 3 autres l’imitent. Ça c’est les mauvaises. Les bonnes, c’est comme la vente, coup sur coup, d'un « Apprentissage » hier et d'un « Abuelo » ce matin. Ce n'est pas que je sois en attente urgente de rentrées d'argent, mais ça fait toujours plaisir à un auteur de voir sa production partir vers d'autres horizons. Que vont d'ailleurs devenir ces ouvrages ? Imaginons que leurs acquéreurs du moment les conservent un temps soit peu ; disons une vingtaine d'années. Qu'en feront les générations suivantes ? Finiront-ils dans un vide-grenier ? Oubliés sur une étagère de bibliothèque ? Resteront-ils en France ou bien s'envoleront-ils à l'autre bout du monde ? Dans un casier des bouquinistes des quais de Seine ? Au pilon ? Et si l'un d'entre eux accompagnait son propriétaire dans son cercueil ? On peut imaginer qu'au fond d'un bunker, après une apocalypse nucléaire ou une épidémie qui liquidera 80% de l'humanité, un homme ou une femme rescapé s'en emparera et lira à voix haute quelques extraits avant de se tirer une balle dans la tête. Et si la dernière volonté d'un criminel de la pire espèce était, avant d'être exécuté, de se plonger dans... Bon, on arrête de délirer. Tout ça parce que ce jour doit être marqué à nouveau d'une croix blanche.

Robert est le nouvel acquéreur d'un Abuelo. Robert, qui ne cesse de me proclamer très grand écrivain, n'a jamais rien lu de moi. Je mets son engouement sous le compte d'une extraordinaire force d'intuition ; "la forme la plus élevée de l'esprit", disait le grand ingénieur-architecte italien Luigi Nervi.

J'ai omis de préciser que ce matin Bécon est enveloppé dans une bruine façon brumisateur. J'ose cette comparaison par expérience : celle de 3 accouchements. Il y a quelque chose de breton dans l'ambiance béconnaise. Je ne serais pas surpris de voir les habitués danser sur le parvis au son du biniou.

Et aujourd’hui, le casting est le suivant : les Tuc (Madame m’offre et me sert un café), Paul (Tana Umaga) toujours frigorifié et Sophie son épouse (toujours attentionnée), Gilles le Biker, Christiane d'Anatolie, Geneviève, le Dieppois et Amélie.

Je n'avais jamais échangé avec le Dieppois, lequel est un homme charmant, discret, qui m'a appris que les spécialités de Dieppe étaient la coquille St Jacques (surtout ne jamais oublier le q de coquille !) et le hareng ; que ce dernier, le Clupea harengus pour « faire genre », est à l'honneur à l'occasion d'une fête annuelle au cours de laquelle il y a un concours d'avaleurs de harengs (par catégorie : vivant, fumé, à l'huile, mariné ou grillé). Le champion toute catégorie 2024 a avalé 513 harengs en 1H soit 8,55 à la minute, ou un toutes les 7 secondes si vous préférez ! J’ai ouï dire qu’un comité de soutien s'est constitué pour homologuer cette discipline aux prochains jeux olympiques. J'y crois qu'à moitié étant donné que l'amicale des avaleurs d'escargots n'y ait pas parvenu bien qu'elle y travaille depuis une dizaine d'années. (C’est magnifique l’écriture romanesque : on peut écrire n’importe quoi ! Pensez-vous que des lecteurs vont une seule seconde croire à cette histoire de concours d’avaleurs de hareng ? A l’époque des fake-news et de la crédulité, ce n’est pas impossible). 

Amélie m'a fait partager son envie d'écrire et même de devenir éditrice. Si je l'encourage sur l'écriture je suis plus modéré pour l'édition. Elle devrait me faire passer quelques récits prochainement.

Tana Umaga et Sophie m'ont à nouveau apporté des livres pour mes petits-enfants. J'ai croisé Sophie ce matin alors que je sortais de chez moi et qu'elle marchait sur le même trottoir en sens inverse, avec Utah en laisse. J'ai pu lui montrer ma modeste chaumine. Il faudra qu'un jour, j'invite tout ce petit monde à une "party". Aux beaux jours et avant que JM n'aille déprimer à la retraite.

Justement, JM : il m’a appris l’existence en kiosque d’un nouveau magazine, Papotin, qui n’était jusqu’à présent que vendu sur internet. Mais le plus incroyable, c’est l’histoire de cette autiste, murée dans le silence, qui ne s’exprime qu’en composant des mots et des phrases avec des lettres qu’elle dispose sur une table face à elle. Cette jeune femme vient d’écrire un roman, comme ça, lettre après lettre. Alors là (je veux dire « du coup »), chapeau et ça m’en fiche un coup (du coup) : moi qui dispose de toutes les facilités matérielles pour écrire et qui ne suis pas fichu d’avancer autrement que comme un escargot dans l’écriture de mon « Victoria o Muerte » ! Misère…

J’ai déjeuné avec un ami qui trouve que notre petite assemblée et le récit que j’en fais sont des choses formidables, dans un monde où les gens ne se parlent plus. Il me conseille sur la présentation de l’ouvrage et en particulier l’illustration photographique. Il pense qu’il faudrait que les personnages qui apparaissent au fil des chroniques soient photographiés de dos, sans que l’on voit leurs visages. Nous avons eu une autre idée : une photo du kiosque au petit matin, à l’ouverture, au début du recueil et la même, le soir, rideau fermé, en fin de bouquin. Et vous, vous en pensez quoi ?

Je lui ai fait une démo de ChatGPT et il a eu la bonne idée de lui poser la question : comment faire pour se protéger contre l’IA ? La réponse instantanée, en 6 points, est assez fascinante. Faites l’essai. Et puis, vous pouvez poursuivre en lui demandant : si je fais tout ça, quelle garantie me donnes-tu ? Réponse : 4 points sur ce qu’elle garantit et 3 sur ce qu’elle ne garantit pas. Je ne devrais pas vous encourager à tester ChatGPT car le danger est que vous n’allez plus cesser de lui poser des questions et qu’il faut savoir qu’il consomme 19 fois plus d’énergie que la même requête sur un moteur de recherche « ordinaire ». 

J’ai confié à JM qu’entre l’IA et le dérèglement climatique, je penchais pour l’IA comme le plus probable extincteur de l’humanité.

C’est ainsi que les hommes vivent. 




Ce matin au kiosque 84 : La Saga Sadorski, Jean Assolant et la bataille de Madagascar, Les gilets jaunes

Un jour à marquer d’une pierre blanche : JM est parvenu à vendre un Apprentissage !  Faut dire que l’on s’y est mis à deux et que si je n’avais pas donné le coup de pouce supplémentaire, un être vivant sur cette terre (bien mal menée, ne croyez-vous pas ?) n’aurait pas connu la félicité de découvrir une poésie dont hélas, seule, une postérité posthume reconnaîtra l'indéniable qualité…
Pour cette pierre blanche,  on va plutôt dire, qu’on s’y est mis à trois, car je ne dois pas oublier le destin, la providence ou tout simplement le hasard ou la coïncidence qui a fait que - appelons-la Christine - et donc, que Christine, soit venue au kiosque au moment même où JM me recommandais un petit livre de la saga Sadorski traitant des salopards de l’occupation et que sa compagne aime beaucoup (la saga, pas les salopards de l’occupation). 

Elle, Christine, venait pour commander un Lautréamont. Roman ? Poésie ? Nos avis se balancèrent un moment comme des jambons dans le clocher de Saint-Flour par jour de grand vent, mais j’interrompis d'autorité nos supputations en interrogeant Christine sur son intérêt pour la poésie. Elle m’avoua, sans que j’eus recours à une pression morale supplémentaire, qu’elle avait toujours aimé la poésie. Elle me précisa même qu’au bac, elle l’avait particulièrement bûchée au détriment du roman et que le destin, la providence ou peut-être le hasard ou une coïncidence (malheureuse) l’a fit tomber sur le roman. C’est à cet instant précis que JM (je rappelle que JM a été désigné dans cette chronique comme étant mon agent littéraire) se saisit opportunément d’un exemplaire de l’opus3 d’Apprentissage, le brandit sous les yeux (ébahis, forcément ébahis, aurait dit Marguerite Duras) de Christine en lui révélant que l’auteur est ici, juste là, que l'on pourrait même le toucher si la bienséance ne l'interdisait (du moins dans l'enceinte de ce kiosque Bolloré). 

« Vous écrivez de la poésie ? », me demande-t-elle ? « Je tente, je bricole, je m’égare, je m’essaie », dis-je, tout en baissant les yeux, vaincu par une timidité maladive. Christine s’est saisi du précieux recueil que mon agent lui a tendu dans un reflexe très professionnel, feuillette quelques pages et me demande tout de go si je lui offre. Toujours accablé par cette timidité chronique, je bafouille un "Ben pourquoi pas, mais, mais…", et puis dans mon for intérieur (assez faible) je dis tout bas : "allez, étant donné que c’est les soldes en ce moment, je veux bien le faire à 10€". Christine me remercie et, pour la remercier de m’avoir remercié, je lui lis d’un air grave et apitoyé la 4ème de couverture ; des extraits absolument magnifiques de quelques poèmes absolument remarquables. 

J’attends bien sûr avec intérêt ses commentaires.

On ne va pas non plus passer la matinée à parler de poésie au risque de vous perdre, cher lecteur, et, heureusement, Christine évoque son goût déjà ancien pour la généalogie. Pour être précis, elle en avait déjà parlé en écoutant JM présenter la saga Sadorski et en nous apprenant que des pilotes français, dont un de ses aïeux, s’étaient fait descendre dans le ciel de Madagascar par des anglais ; son ancêtre et ses camarades ayant pris unilatéralement la décision (peut-être avaient-ils entendu des voix comme Jeanne d’Arc ?) de bouter l’anglais hors du territoire malgache. 

Trêve de balivernes, soyons sérieux et direction Wikipedia qui nous apprend que l’aïeul de Christine s’appelait Jean Assolant, lequel a établi en 1929 la première liaison aérienne française entre les Etats-Unis et la France à bord de l’Oiseau Canari (Christine m'avait évoqué cet exploit). Il a été abattu et tué le 7 mai 1942 aux commandes d’un MD.406 (immatriculé 995) de l'Escadrille de Chasse No 565 par des chasseurs Martlet britanniques du Squadron 881 de Fleet Air Arm ayant décollé du porte-avions HMS Illustrious. Ses deux coéquipiers, le capitaine Léonetti (chef de la patrouille sur le MS.406 no 993) et le lieutenant Laurant (MS.406 no 842), sont également abattus lors de ce combat mais survivent. 

Cet épisode (que j’ignorais) s’inscrit dans ce que l’on appelle la Bataille de Madagascar (5 mai au 8 novembre 1942) qui a vu les troupes britanniques envahirent la colonie française, alors sous l’autorité de Vichy. De Gaulle qui n’a pas été prévenu est furieux. L'histoire ne dit pas quelle était la couleur de son caca, mais violet me semble une hypothèse à ne pas sous-estimer. Les anglais sont victorieux non sans dommages collatéraux (150 tués côté français et 107 côté anglais) et contraignent le gouvernement de Vichy à signer un armistice prévoyant le maintien d’une souveraineté française. Les français des FFL recouvrent la souveraineté de l’île en janvier 43 sous l’autorité du général Paul Legentihomme (dont l’histoire nous dit, qu’effectivement, c’était un gentil garçon).

Je crois me rappeler que Jean Assolant bénéficia de funérailles nationales (la France de Vichy n’était pas ingrate).

Christine nous parle également d’un autre de ses ancêtres, général sous Napoléon, dont le nom est gravé sur les pierres de l’arc de triomphe et non profané (à ce jour) par les gilets jaunes. 

D’aucuns me reprocheront certainement de ne pas poursuivre mon récit et de ne pas leur préciser si ce général fut emporté par un boulet à Waterloo, s’il ne fut qu’écrasé sous son cheval puis dévoré par les corbeaux, ou bien s’il coula des jours délicieux - peut-être borgne et amputé d’une jambe - dans une agréable demeure du Val de Loire (au hasard), en compagnie d'une épouse parfaite et de 25 ans sa cadette.

Mais je sais que l’attention de mes lecteurs (déjà soumise à rude épreuve) serait susceptible de se relâcher à l’évocation des mémoires complètes de ce général, aussi dois-je mettre à regret un terme à cette chronique du jour.

Je n'oublie pas que nous vivons une époque formidable avec l'annexion prochaine du Groenland et du Canada par les USA, le nième bombardement massif de l'Ukraine et la suite des réjouissances à Gaza, le soutien d'Elon Musk à tout ce qui sent cette odeur de moisi du fascisme et la dystopie bien réelle que vivent les habitant d'Anvers - et plus précisément ceux qui sont à proximité de l'ancienne usine chimique 3M - dont les terrains sont totalement pollués au perfluorooctanesulfonique : ils ont même interdiction de souffler sur la terre ! Le kg de terre dans ce coin de la Flandres bat tous les records (caviar et truffe peuvent se rhabiller !) : 10,3 millions d'€ le kg !

C'est ains que les hommes vivent...

mardi 14 janvier 2025

Ce matin au kiosque 83 : Sombrero, l’immeuble aux tournesols, la petite reine

Un beau soleil d’hiver réchauffe les 4 pensionnaires qui prennent l’air du temps au balcon de la Villa Bécon du parvis de la gare du même nom. Il y a là Genevieve, Gilles, René et son épouse. 

Le soleil envahit le kiosque où JM devrait se munir d’un sombrero sous peine d’insolation. Comme Marcel Amont ! Tiens : qui se souvient de Marcel Amont ? des Frères Jacques ? et de Zanini ? 

Mais enfin, voilà 3 jours que je ne me suis pas attelé au moindre début de chronique alors que la matière ne manquait pas. Un manque de courage, une indolence coupable, aucune inspiration ! Pourtant, de la matière, y’en avait ! Je vais un peu tout mélanger, mais le cocktail traduira peut-être bien l’extraordinaire variété des thèmes échangés dans ce cénacle. 

Un matin, Guy le Centaure, petit homme vif au verbe goguenard et au regard malicieux, déboule dans le kiosque en charriant JM sur tout et n’importe quoi. Manque de bol : j’ai oublié ce qu’il a débité à l’exception du fait qu’il avait grugé la société qui l’employait en se faisant payer 8h au lieu de 2 réellement effectuées, et ce, grâce à la complicité de son chef d’équipe ! Et puis aussi qu’il me trouvait sympathique, un peu naïf peut-être, mais sympathique. Guy m’a un peu plombé le moral en me donnant exactement mon âge. Moralité : inutile de croire que l’on fait encore jeune !

Dès que je croise Robert, il décline un grand nom de la littérature classique : un jour, je suis Chateaubriand, un autre Montherlant et plus récemment d’Ormesson. Demain, j’espère Flaubert, Balzac, Dumas, Proust, Maupassant, etc.

JM m’a raconté qu’il avait connu le fils (ou le petit fils) de l’architecte de ce très bel immeuble situé avenue Gallieni, au débouché de l’avenue Séverine ; une façade en meulière, des émaux déclinant les tournesols et une magnifique porte aux volutes florales art nouveau. Il paraît que l’architecte s’était réservé une maison à l’intérieur de la parcelle, visible seulement quand l’immeuble est ouvert.

Julie Depardieu, son compagnon Philippe Catherine et leur chien Zouzou, ont une nouvelle fois été repérés sur le parvis de la gare. C’est la seconde fois qu’ils s’immiscent dans cette chronique après l’entretien qu’ils avaient eu avec JM. Gilles nous apprend que Julie est assez grande ; derrière ses lunettes de soleil, il a estimé qu’elle devait faire 1,75m.  

Nous avons parlé des megafeux de Los Angeles et voguant de catastrophe en catastrophe, j’ai appris que 2 trams s’étaient heurtés à Strasbourg causant un nombre important de blessés. La mer de glace se ratatine comme une peau de chagrin et à Tigne on commence à démonter des tir-fesses ! Des avalanches engloutissent régulièrement des skieurs hors pistes que Gilles laisserait volontiers sous la neige s’il s’avérait qu’ils avaient été imprudents. « Ça nous coûte une fortune, c’est n’importe quoi ! », s’est-il emporté comme il sait s’emporter. 

René m’a parlé de la course Levallois-Honfleur à laquelle il a participé à plusieurs reprises. Course dont la dernière édition eut lieu en 2014 pour (apparemment) des raisons de mésententes entre les municipalités. Balkani voulait-il la baptiser la « Pasqua Vélo Racing Tour » ? 

Ensuite René me confie comment il se prépare pour affronter en vélo les cols des Alpes. Beaucoup d’efforts plusieurs semaines avant et, sur place, 3 jours de détente avant d’affronter les monstres. Mais quand l’épreuve est passée, quand on a bien souffert, on se régale d’un super déjeuner. Tout cela, dans une ambiance sympathique. Genevieve est tout à fait d’accord avec ces propos.

Et puis, René et son épouse évoque leur fils d’une cinquantaine d’années qui a été victime d’un AVC sérieux qu’il est parvenu, à surmonter, à force de volonté et certainement parce qu’il était très sportif. D’ailleurs, il a réussi à refaire du ski. Bien sûr, pas comme avant, mais… 

Ils me montrent les photos du visage de leur fils avant et après l’AVC. Sur cette seconde photo, je vois que la moitié inférieure de son visage est déformée. Ils me disent que ça c’est bien arrangé depuis. Un livre dont il est l’auteur doit être publié prochainement. Il faut impérativement qu’il soit sur les étagères de JM !

mardi 7 janvier 2025

Ce matin au kiosque 82 : Charlie-Hebdo, vélo, piscine et Marx

Un régal ! Je ne parle pas du temps. Pluvieux, venteux, griseux. Non, je veux parler de  mes rencontres de ce matin. D’abord, le kiosque ou le magasin de presse, selon. Roland est aux côtés de JM. Je me place un peu à l’écart, proche de la porte vitrée toujours condamnée. Je me permets de glisser à Roland : 

  • « Alors : ce Monsieur qui ne veut pas vieillir ? 
  • Il me répond : c’est vrai, je vais entamer une nouvelle dizaine et ça ne me plait pas.
  • 70 ?
  • Eh non : 80 !
  • Félicitations : vous ne les faites pas. Alors, toujours du vélo et la piscine ?
  • Oui, la piscine, au moins une fois par semaine. A Charras, le bassin de 50m. Je fais 2km, 2km et demi. Et puis le vélo, autour de Longchamp. Comme ça, si on a une chute, on vous emmène directement à Ambroise Paré tout près.
  • Formidable ! Mais vaut mieux éviter de tomber. J’ai 2 amis qui se sont très grièvement blessés avec des accidents de vélo.
  • Oh, si je les comptais… 

JM intervient : « tu n’achètes pas Charlie Hebdo ? Non, je réponds », d’un argument qu’à la réflexion je ne trouve pas très juste et donc je ne vous l’impose pas.

  • Tu as vu mon fils qui est dans Libé ?
  • Non, montre.

Je vais chercher un libé. Je lui fournit les explication et nous partons sur Elon Musk. De l’avis général, il part en vrille. « Pourquoi les gouvernements ne l’interdisent pas quand il interfère dans la politique des pays ? Il se croit tout permis parce qu’il est l’homme le plus riche du monde ! C’est scandaleux. Je ne comprends pas pourquoi les gens ne se tirent pas de X. Il paraît qu’aux Etats-Unis, certains propriétaires de Tesla ont placé un macaron sur leur vitre arrière indiquant qu’ils ont une Tesla, mais qu’ils ne sont pas d’accord avec les agissements de Musk. »

Voilà, en vrac, quelques échanges.

Roland enchaine en me disant qu’il a bien connu Cabu. Il a travaillé toute sa vie dans le monde des journaux et des magazines. Il faisait les maquettes et des corrections de texte. Sa boîte appartenait à un Lesieur. Elle était située sur les Champs-Elysees, tout près du Fouquet’s, au-dessus d’une agence BNP. Un grand nombre de publications étaient traitees à cette adresse en maquettage et corrections. Puis Lesieur a vendu, en 83, et on a fait une SCOP. Ralite nous a donné des subventions pour qu’on tienne. On a évité tous les licenciements. Et puis, progressivement, les publications ont pris leur autonomie et les employés se sont faits embaucher par elles. C’était un chouette travail. Cabu m’a fait plusieurs dessins. 

Nous sortons dehors (ce qui semble être un pléonasme mais on pourrait sortir en boîte de nuit, ce qui serait sortir à l’intérieur). C’est une bonne averse qui nous tombe dessus. Les habitués présents (Gilles, Robert, Fabrice, Christiane et Genevieve) sont en rangs d’oignon le long de la façade, protégés par l’auvent de la gare. Je me place entre Gilles et François. Je vais écouter Francois pendant une dizaine de minutes, mais j’avoue que je n’ai pas tout saisi de notre entretien, en partie parce qu’il y a une balayeuse qui prend un malin plaisir à passer et repasser devant nous en faisant un bruit d’enfer, en partie parce que je ne suis pas habitué à la prononciation de François et puis, enfin, dernier tiers : parce que je deviens peut-être sourd. Ce que j’en sais c’est que François a une fille de 22 ans et qu’il veille à ses fréquentations ; que Becon n’est pas aussi sage qu’il en a l’air et que, visiblement, il y a plein de choses que j’ignore ; que sa vie n’a pas été toujours facile ni linéaire, etc. J’aime bien Francois.

Roland revient taper une petite bavette et est fier de nous montrer un sac-cabas sur lequel est exposé le circuit des cols des Alpes. Il les a tous faits !

Genevieve intervient pour nous faire une confidence assez étonnante : « voyez-vous (elle aime bien commencer par « voyez-vous »), je crois, mes c’est mon interprétation, que la balayeuse fait tout ce bruit car c’est du vieux matériel dont on se sert pour apprendre aux débutants à se servir du matériel… »

Ah ? 

« Eh oui, poursuit-elle, quand il passe dans ma rue, ils font beaucoup moins de bruit. »

Ah ?

Je me demande si, quand Genevieve est chez elle, elle ne débranche pas son appareil auditif car j’ai l’impression que cette balayeuse fait toujours un boucan du diable, même quand elle passe devant chez moi.

Ou alors, ils nous ont affecté, pour le quartier, que des stagiaires ! Il faudrait écrire à Kossowski.

Accalmie, je vais rentrer. Mais je vais saluer JM avant de partir. Sur qui je tombe : Paulette ! (La petite-grande Dame).

Avec Paulette, il n’y a pas d’histoires de paupiettes (de veau), mais on échange sur l’état du monde et vers quel impasse il se dirige. Je lui ai prêté le livre du jeune philosophe japonais, Kohei Saito, qui revient sur les écrits de Marx et qui prône la décroissance. Le titre du livre est « Moins ! La décroissance est une philosophie » Elle me dit qu’elle le trouve très intéressant et que ça lui rappelle des choses de sa jeunesse. 

C’est ainsi que les hommes vivent !

dimanche 5 janvier 2025

Ce matin au kiosque 81 : Le matin où tout faillit basculer pour des questions de champ’

Je n’ai pu me rendre au kiosque que vers 11H. J’ai aperçu Paul, Sophie, Gilles et les « Tuc » à la terrasse en arrivant ; mais ils étaient sur le départ, et comme j’ai prie l’habitude d’aller saluer JM préalablement, je ne peux qu’observer, derrière la porte vitrée coulissante que JM a condamnée afin que le froid glacial n’achève pas de l’achever…, la retraite des têtes chenues quand elles ne sont pas enfouies sous un couvre-chef de circonstance. 

J’avais fait les courses au marché, si bien que je me suis pointé en traînant mon cabas à roulette. JM a considéré l’ensemble d’un regard d’huissier me livrant, après quelques grognements silencieux, le fond de sa pensée : ça fait très chic le cabas à roulette ; très « bécon ». Je ne lui ai pas montré l’état pitoyable de mon engin qui parvient, avec une fidélité de Pénélope, à me livrer le service demandé depuis une vingtaine d’années, ce qui, en passant, constitue de nos jours une performance dont la plupart des artisans du BTP pourraient s’inspirer.

C’est à ce moment que j’entendis dans mon dos une voix un peu rauque qui m’interpelait : « Ah ! Voilà notre Chateaubriand ! » Il s’agissait de Robert, les membres supérieurs encombrés d’un sac cabas (pas à roulettes, donc) et de sa béquille. Il entrepris de m’informer sur son désappointement du jour : il avait apporté du champagne et des galettes dont il souhaitait régaler la compagnie des habitués. Mais, hélas, cette félicité lui fut interdite par JM qui, ne disposant pas du sésame que constitue la fameuse Licence IV - laquelle autorise toutes les pochtronades de France et d’ailleurs - mit une censure non négociable à ces libations potentielles. Il semblerait que le régaleur ait tenté d’amadouer le dépositaire du droit ; sans succès, mais sans doute avec quelques grognements de part et d’autre. Il faut dire que JM a brandi une menace dissuasive : supprimer les tables ! Le lecteur insensible ne percevra peut-être pas la portée funeste de cette commination et, si tel était le cas, je dois avouer que je ne pourrais rien pour l’extraire de son errance mentale. Car, si la dissolution du groupuscule des habitués et la condamnation au silence de ces chroniques ne l’émeuvent pas plus que la fin de la cueillette des olives en Basse-Provence, j’avoue mon impuissance. Pour les autres lecteurs, les vrais, les passionnés, je les rassure : un accord a été trouvé entre les belligérants - l’un réintégrant son champ’ dans son sac-cabas, l’autre sa dignité derrière son comptoir.

« Vous avez raté quelque chose : j’avais amené des galettes des rois chaudes et du champagne ; mais nous n’avons pu que manger de la galette… », me dit Robert en jetant un regard chargé de regrets pour sa désinvolture au gardien-passeur.

Quelques temps plus tard, alors que je repassais au kiosque à la recherche d’un gant que j’avais égaré lors de mes pérégrinations matinales, JM me fit des confidences supplémentaires à propos des « événements » de la terrasse ; mais, puisqu’il s’agit de confidences, cher lecteur, j’en garderai le secret comme une tombe (une pyramide d’Egypte par exemple).

A la seconde où je boucle ce texte, une mère poursuit son gamin (4 à 5 ans), la gamin hurle, elle le chope, il continue d’hurler, il se roule par terre, la mère tente de le porter, le gamin se démène comme un possédé, elle finit par lui saisir une jambe et le traine derrière elle sur une trentaine de mètres. Heureusement le sol du hall d’arrivée du terminal 2E de Roissy est en marbre lisse.

Que voulez-vous : c’est ainsi que les hommes vivent.

vendredi 3 janvier 2025

Ce matin au kiosque 80 : Musée de la chasse, Edi Dubien, déni climatique, trombones et IA

Point météo : soleil d’hiver éclatant, fond de l’air froid mais pas glacial, vent nul.

C’est la 80eme et j’ai prévu de m’arrêter à 100. Donc, pour les ceusses qui voudraient figurer dans ce futur chef d’œuvre, va falloir faire fissa car il ne reste plus que 20 opportunités pour entrer dans l’histoire littéraire ! 

Today fast visit to the bookshop of the railway station of Bécon les Bruyères. (Je suis obligé de glisser quelques mots dans la langue de Shakespeare afin d’honorer les visiteurs réguliers des pays de langue anglaise).


Il est tellement tard (13H passée) que JM est en train de se faire la malle. Son alter ego de l’après-midi est déjà à poste, comme on dit dans la Marine.

Je reviens de la visite du Musée de la chasse dans le Marais avec comme invité l’artiste Edi Dubien.

J’avise le titre du « Monde » : « 2025, année décisive pour l’action climatique ». Depuis le temps que c’est décisif, l’annonce à un goût d’ultimatum. Mais quelle est la proportion de lecteurs qui en prendra la véritable mesure ? Une infinitésimale. 

Andreas Malm, l’auteur du brûlot (pour Darmanin) « Comment saboter un pipeline », écrit dans son nouvel opus « Avis de tempête - Nature et culture dans un monde qui se réchauffe » : « … la seule chose sensée a faire désormais est de tout abandonner pour mettre fin physiquement à la combustion d’énergies fossiles, dégonfler les pneus, pénétrer sur les pistes de décollage, assiéger les plateformes pétrolières, envahir les mines. » Espérons que nous n’en soyons pas encore là ; mais alors : quoi faire quand le déni est partout ?

J’ai reçu d’un ami physicien de haut niveau une vidéo intitulé « L’horreur existentielle de l’usine à trombones ». Ça dure, hélas, 38’, ce qui parait de nos jours une longueur rédhibitoire pour une vidéo sur YouTube qui traite d’un sujet sérieux ; en l’état : l’IA.

J’ai eu ce « courage » et je ne le regrette pas. Surtout pas : je vais la revisionner et la diffuser.

Je mets le lien dans cette chronique, sans vraiment espérer qu’elle devienne virale, ce qui, pourtant, pourrait être salutaire.

https://youtu.be/ZP7T6WAK3Ow?feature=shared

A demain !

jeudi 2 janvier 2025

Ce matin au kiosque 79 : Tagine au poulet, bœuf bourguignon, lamproie à la bordelaise, boudin blanc au foie gras et aux pommes-fruits et Tuc

Il a plu toute la nuit, autant dire que Becon ressemble ce matin à une serpillière mal essorée. Quand je sors un pied de la maison, quelques gouttes timides tentent de me faire croire qu’un parapluie est indispensable pour rejoindre la gare. Peine perdue, mes petites, vous ne m’aurez pas : j’ai consulté mon app « RainToday » qui me montrait la fuite vers l’Est d’une masse nuageuse importante et un territoire dégagé à l’ouest. 

JM accepte mes vœux tout en me faisant comprendre que les « bonne année », il en a marre ; il paraîtrait (c’est lui qui le dit), qu’il y en aurait des hypocrites. Si je ne le connaissais pas, je me draperais dans mon indignité. 

Ce matin, on parle tagine de poulet aux dattes et boeuf bourguignon de son côté, lamproie à la bordelaise du mien. On se concentre sur le bourguignon : le secret de JM, c’est de faire dorer à feu vif les morceaux de viande jusqu’à les quasi-cramer (j’ai dit quasi) et puis, servir ce plat avec le même vin qui a servi à faire la sauce dans lequel la viande a braisé. JM a régalé ses invités avec un Givry 1er cru. Mister Bolloré, s’il avait été invité, s’en serait léché les crocs.

JM ignore ce qu’est la lamproie. Même si je ne peux imaginer mon lectorat composé de pareils ignorants, je vais vous toucher 2 mots de ce poisson qui ressemble à une anguille dotée d’une gueule de sangsue et que l’on trouve principalement dans les estuaires. Pourquoi ai-je été amené à la ramener avec ma « lamproie à la bordelaise » : la sauce au vin (du bœuf bourguignon). Cette spécialité de Bordeaux se cuit dans un mélange du sang de la lamproie et de vin rouge ; lequel vin accompagne la dégustation de ce met que, pour ma part, je considère comme l’un des meilleurs qu’il m’ait été donné de manger. J’oubliais deux choses : la lamproie à la bordelaise se cuit avec des poireaux et se conserve ; les amateurs considèrent qu’il faut plusieurs années de conserve pour en obtenir une saveur inégalée.

Avant de rejoindre quelques habitués sur la terrasse, je considère avec amusement mon voisinage (celui d’Abuelo) avec le dernier titre de Marc Levy. 

JM, à qui je fait part de ma déception après la lecture du roman « Madelaine, avant l’aube », me montre le post-It d’une lectrice. Elle y est allée d’un commentaire assassin. En bon pro, JM a masqué la couverture au commentaire, par d’autres exemplaires, vierges eux.

Dehors, il y a Paul dont on voit à peine les yeux et qui se les pèle ; René, un grand adepte du vélo qui semble avoir peur de vieillir ; Guy qui nous parlera, avec son accent de Titi parisien, de « Langue de feu » et de « Cacahouète », deux prostituées qui œuvraient, l’une Porte de Vincennes avec de très nombreuses heures de vol si bien qu’elle semblait remisée comme une vieille caravelle dans une caravane aussi décatie qu’elle, l’autre Porte d’Asnieres, assise sur une bite en béton (dixit Guy, mais on pourrait aussi dire : un plot) à grignoter des cacahouètes ; ce qui, métaphoriquement, est d’une puissance rare et immédiatement compréhensible. 

Pourquoi en est-on venus sur le sujet des péripatéticiennes pathétiques ? C’est Gilles qui, après avoir évoqué le boudin blanc au foie gras accompagné de pommes-fruits rôties et fleur de sel qu’il s’est tapé au réveillon, nous a parlé d’une de ses traversées, jadis, du Bois de Boulogne (en tout bien tout honneur) à l’occasion de laquelle il fut consterné d’apercevoir sur le bord de la route une jolie jeune femme de peut-être 18 ans, habillée comme une étudiante (et non comme les putes patentées) en train de faire le tapin. Il a failli s’arrêter pour lui demander pourquoi elle était là. Un samaritain, ce Gilles. 

J’ai lu, il y a quelques temps, un article sur ce phénomène de la prostitution occasionnelle des étudiantes. Qu’en dire sans paraître « tonton la morale » ? Malgré ce que certaines affirment en banalisant cet acte, le seul fait, précisément, qu’il puisse y avoir banalisation, associé au constat que certaines étudiantes sont dans l’incapacité financière de se payer leurs études sauf à travailler comme semi-esclaves au McDo, en dit long sur notre société.

Sophie est enfin revenue de sa promenade avec Utah et met un terme à nos échanges entre mâles de réforme (échanges qu’il m’est interdit de coucher ici sous peine d’atteinte à la pudeur et aux bonnes mœurs).

Geneviève nous a rejoints en trottinant, un perpétuel sourire sur ses lèvres et un café dans une main.

Tout le monde (sauf moi) s’interroge sur le devenir des dénommés « Tuc » (qui possèdent une résidence à Touque dans le Calvados) auxquels Gilles a adressé un « cul de chèvre » (comprenez : un message Facebook) et qui, à cette heure tardive de la matinée, auraient dû s’être pointés ici-même. Que fait la police ? Que font les « Tucs » ?

Le saurons-nous lors du prochain épisode de cette saga du kiosque de Bécon ? Rien n’est moins certain et je suis saisi - dois-je l’avouer - d’un doute existentiel, voire ontologique.

C’est ainsi que les hommes vivent.

mercredi 1 janvier 2025

Ce matin au kiosque 78 : Vexin, empreinte carbone et petits fours

1er « Ce matin au kiosque » de l’année de tous les dangers ; une chronique « hors les murs » depuis la campagne picarde et plus précisément le Vexin français. Le magasin de presse est-il ouvert ? Imaginons que oui. 

Ce matin quelques habitués sont venus se souhaiter la bonne année. Chacun y est allé de son compte-rendu de réveillon. Pas de grandes fêtes, on s’est couchés tôt dans l’ensemble. Finis les cotillons et les turlututus chapeaux pointus ! Il y en a même un qui a avoué ne pas aimer les 31 décembre. Un couperet qui tombe sur une année qui n’existera plus jamais dans l’histoire de l’humanité (quel philosophe !). L’horloge indécente du temps qui s’affiche sans pudeur pour nous annoncer que la fin se rapproche inexorablement (quel cassandre !). Un autre s’en fout : un jour comme les autres avec son lot de grossièretés et de malheurs, d’humanité et de bonheur. La nouvelle année qui s’annonce : de quels événements tragiques va-t-elle accoucher ? Nous avons pris l’habitude d’un crescendo des catastrophes, toutes d’origine humaines : guerres, cyclones, inondations, megafeux, virus, variants de virus, variants de variants de virus, extinctions (et rebellions), pollution, exécutions, révolutions, etc.

2025, l’année du tsunami de l’IA ? Une année record supplémentaire en ce qui concerne le dérèglement climatique ? Une année supplémentaire d’aveuglement ou d’indifférence des plus riches ? « Fin du monde et petits fours ! » Un livre à lire afin de savoir comment les ultra riches profitent du dérèglement climatique pour s’en mettre plein les fouilles… parlez-moi de croissance verte et j’vous fous mon poing sur la gueule… sauf le respect que je vous dois…

Comment expliquer que des personnes dotées d’un niveau d’études supérieures, n’ignorant rien des conséquences mortifères de l’émission de CO2 et de GES dans l’atmosphère, ni de leur empreinte écologique désastreuse liée (entre autres choses) à l’utilisation éfreinée de l’avion, poursuivent (et peut-être même intensifient) leurs modes de vie énergivores ?

Tout le monde sait que la trajectoire que nous suivons nous mène à la catastrophe. Everybody Knows ! C’est même quelque chose de nature existentielle et que plus nous attendons pour changer nos comportements et plus nous aurons (mais surtout les générations qui vont nous succéder) à souffrir de notre aveuglement.

Sommes-nous devenus collectivement masochistes ?

Au kiosque, ce matin, je ne suis pas certain qu’on ait débattu des émissions de CO2 des trajets aériens. On aura rigolé du mea culpa de Macron au sujet de la dissolution, peut-être auront-ils parlé de moi en considérant que… sympa pour certains, pas trop pour d’autres.

JM aura-t-il été à sa caisse, plaisantant avec toutes ses admiratrices, prodiguant des conseils avertis auprès d’acquéreurs  potentiels de livres, mimant le renfrognement, désertant quelques instants ladite caisse pour s’en fumer une petite ? 

J’achève cette chronique - une première de cordée de l’année - dans le silence de mon salon que vient troubler insidieusement le bruit très faible d’un avion à réaction.