mardi 28 février 2012

Cette année je me prends au mot et j'écris (9)

Ce matin sur le Post-it :
"Je vais écrire le charme du quotidien dans la plénitude du temps retrouvé."
Il y a quatre mots importants dans cette phrase : charme, quotidien, plénitude, et temps retrouvé.
Ils font écho (chez moi) à : lecture, vacances, calme, et amitié.
Qu'est-ce que le charme ? Cette indicible impression provoquée par une personne, une situation ou un objet, qui suffit à vous apporter une sensation de bien être, en même temps que de beauté. Une beauté pure et donc imparfaite. Une femme qui a du charme n'est pas "jolie", mais elle est forcément belle.
"C'est charmant" pour qualifier un village (forcément petit avec une architecture traditionnelle) ou un paysage (forcément vallonné et sous le soleil), renvoie à quelque chose de plus pittoresque, voire de mignon ; ça perd son charme, évidemment.

Le quotidien fait routine, ordinaire et un peu laborieux ou monotone. Pourtant la vie est faite de quotidiens qui ne demandent, pour peu que le destin ne les accable pas, à s'enthousiasmer. Mais il peut faire simple aussi ; s'oublier et passer plus vite qu'on ne le souhaiterait.


samedi 25 février 2012

Ai Weiwei au Jeu de Paume


Ai Weiwei est un artiste prolifique et engagé ; c'est un euphémisme. Pour ce qui relève de son travail photographique, il est possible de le constater actuellement au Jeu de Paume.
De New-York où il a vécu plusieurs années dans l'underground, à son pays d'origine, la Chine, Ai Weiwei dénonce pèle mêle :
- une urbanisation effrayante qui substitue avec brutalité un paysage de tours d'une laideur rare, à un habitat traditionnel abattu à coups de pelles mécanique
- une société chinoise totalement verrouillée
- l'incurie et la corruption des pouvoirs publics qui ont laissé se construire des bâtiments qui se sont transformés en tombe pour des dizaines de milliers de paysans du Sichuan lors du tremblement de terre de 2008, et en particulier pour 5345 écoliers dont les noms ont été recherchés et publiés par Ai Weiwei et son équipe 
etc...

Il se fait iconoclaste en brisant un vase de la dynastie des Han, en photographiant sa compagne relevant sa jupe à la manière de Marylin Monroe sur la Place Tienanmen, ou en imposant un doigt d'honneur, en premier plan d'une photo d'un lieu du pouvoir ou d'architecture iconique. Il témoigne d'une vision poétique de la vie quotidienne avec une profusion de photos qui défilent sur un mur d'images, classées par thème : l'architecture, l'artisanat, la nourriture, la nature, lui-même, etc.
Ai Weiwei a tenu un blog pendant plusieurs années ; blog fermé par les autorités chinoises. Ai Weiwei est un artiste du combat, celui pour le changement, avec un credo permanent : "créer de nouvelles possibilités pour le présent et l'avenir" avec pour seules armes l'art et la communication.

Vous dire que Ai Weiwei nous est sympathique ne vous surprendra pas.
C'est une expo qui est tout sauf anodine.

Nota : les photos ne sont pas d'Ai Weiwei 
de haut en bas :
- rue des Archives
- visage à la mèche blonde (Belleville)
- le chasseur (Belleville) 
- Sur les chemins de Compostelle (Neuilly)


mercredi 22 février 2012

Old ideas Show me the place

Montre moi le lieu

Montre moi le lieu
Où tu veux que ton esclave se rende
Montre moi le lieu
Que j'avais oublié, je ne sais pas
Montre moi le lieu
Pour que ma tête s'incline lentement
Montre moi le lieu
Où tu veux que ton esclave se rende


Montre moi le lieu
Aide moi à déplacer la roche
Montre moi le lieu
Je ne peux bouger cette chose seul
Montre moi le lieu
Où le Verbe devint homme
Montre moi le lieu
Où la souffrance a commencé

Les ennuis sont arrivés
J'ai sauvé ce que je pouvais sauvé
Un rayon de lumière
Une particule une vague
Mais il y avaient des chaines
Et je me suis emporté
Il y avaient des chaines
Aussi t'ai-je aimé comme un esclave

Montre moi le lieu
Où tu veux que ton esclave se rende
Montre moi le lieu
Que j'avais oublié, je ne sais pas

Pergame (libre traduction)

mardi 21 février 2012

Le mémorial des sorcières de Peter Zumthor





Il est fort à parier que Vardo en Norvège devienne prochainement un lieu de pèlerinage pour les fêlés d'architecture. C'est ici, aux confins de l'océan artique, sur une île au large de la mer de Barents, que Peter Zumthor, suisse, ébéniste, architecte, Pritzker Price 2009, est venu ériger un drôle de monument à la mémoire de 91 personnes brûlées vives au 17ème siècle, sous prétexte de sorcellerie.
Le bâtiment ressemble à un séchoir à poisson (rack) de 125 m de long et de 7 m de large ; une largeur dans laquelle vient se jucher, comme sur des pilotis, un couloir de 1,90 m de large constitué d'une toile blanche en téflon tendue sur les piquets d'épicéa. 91 petites ouvertures carrées percent la toile, avec, au droit de chacune une petite ampoule électrique, et un panneau de soie rappelant le nom de la victime, son acte d'accusation, ses aveux et sa condamnation.
Un pavillon carré du à la plasticienne Louise Bourgeois accompagne l'oeuvre de Zumthor.
Un très bel article accompagné de photos, elles aussi remarquables, figure dans le N° d'AMC de février.
Ce N° nous gâte car un entretien (rare) de cet homme que l'on dit "huluberlu" et "difficile" y est également publié. Extraits : 
"L'esprit du temps est un thème qui ne m'intéresse pas. Je veux seulement construire de bons bâtiments."
"Je travaille avec des émotions, avec des intuitions. Avant d'être construits, les bâtiments sont des images. (...) C'est absurde, mais une sensation est déjà presque une image."
" (...) les gens avec lesquels je travaille doivent m'être sympathiques. (...) J'ai refusé des commandes de gens très fortunés qui m'ont proposé de faire ce que j'avais envie de faire. Cela ne m'intéresse pas. C'est la raison pour laquelle je ne suis pas riche. M'enrichir financièrement avec l'architecture n'a jamais été mon but."

Wellcome chinese friends ! Wellcome Ai Weiwei !

Hier 2 blogeurs chinois sur Everybody Knows. ! Magnifique. Sans doute suite au texte récent sur Ai Weiwei. Bien sûr, 2 chinois sur un peu plus d'1 milliard c'est peu... A suivre.

Les chaises (d'après Antoni Tapies et Ai Weiwei)



Deux travaux sur un accessoire essentiel de la vie quotidienne que l'art transcende. L'un (à gauche) de l'artiste Antoni Tapies (disparu dernièrement) avec l'architecte barcelonais Jordi Garcès (une chapelle laïque faite à l'université Pompeu Fabra) ; l'autre du dissident chinois Ai Weiwei (disparu un moment et réapparu, mais sous surveillance...) avec les architectes suisses Herzog et de Meuron (biennale de Venise 2008)

Cette année je me prends au mot et j'écris ! (8)

Le Post-it du jour :
"Chaque jour est exceptionnel.
Plus d'idées noires.
Je tourne la page."

"Chaque jour est exceptionnel" Je ne sais pas qui a écrit cette première connerie. D'ailleurs, il n'a pas signé. Pas fou le bougre ! Mamadou s'est levé ce matin à 3H30. Comme tous les matins depuis qu'il a débarqué dans notre-beau-pays-la-France, il y a 4 ans, après avoir voyagé sur plus de 7000 km dans des conditions (exceptionnelles), traversé huit pays, versé plus de 6000 € à des crapules (ordinaires). Il s'apprête à emprunter notre réseau de transport en commun (exceptionnel) pendant 2H et 15 mn. Changer 3 fois et marcher encore à peu près 20 mn. Mamadou est mousse. Non, pas sur un paquebot de croisière qui risquerait d'aller se vautrer sur les rochers d'une côte sur laquelle il a accosté jadis à bord d'une coquille de noix, avec 30 personnes à bord (et à peu près le même nombre de disparus). Mousse sur un chantier. C'est à dire homme à tout faire, et en particulier :
- le barbecue de midi avec les planches en bois des anciens coffrages, dans le fût scié en deux dans le sens de la longueur ;
- les courses pour les uns et les autres à l'arabe du coin ;
- l'achat des packs de Kro pour les non musulmans ;
- le nettoyage des chiottes éternellement dégueulasses ;

samedi 18 février 2012

Le vocabulaire de l'architecture contemporaine

Comme tous les domaines d'activité spécifiques, et plus encore par le fait de son ancrage historique, l'architecture dispose d'un vocabulaire qui lui est propre. Un grand nombre de mots sont communs avec d'autres disciplines, en particulier la musique (rythme, harmonie, composition, ...), mais l'architecture leur donne un sens différent.
1er exercice de cette "recherche" : lister en vrac les 100 mots relevant du vocabulaire architectural qui viennent "spontanément" à l'esprit.
2ème exercice : trouver une typologie pertinente dans laquelle ces mots peuvent se classer
3ème exercice : extraire de textes contemporains un certain nombre de mots appartenant à ce vocabulaire, en mesurer les occurrences, et comparer à la liste de l'exercice 1
4ème exercice : quand on en sera là, on verra !

1er exercice : Problématique, Enjeux, Stratégie, Transparence, Perméabilité, Ouverture, Ilot, Opacité, Réflexion, Dialogue, Proposition, Matérialité, Physicalité, Usage, Porosité, Accrochage, Respect, Rupture, Liaison, Articulation, Elévation, Perspective, Profondeur, Territoire, Parcelle, Mitoyen, Restructuration, Réhabilitation, Friches, Délaissé, Dent creuse, Mitage, Résiduel, Curage, Top and Down, Porte-à-faux, Casquette, Fente, Oculus, Modénature, Image, Scénario, Habillage, Corniche, Poésie, Aléatoire, Attique, Projet, Imposte, Rythme, Fluidité, Processus, Scansion, Harmonie, Corps, Lisse, Epaisseur, Echappée, Bavard, Muet, Aveugle, Froid, Modularité, Flexibilité, Intelligent, Durable, Inscription, Variation, Ponctuation, Respiration, Densité, Aléatoire, Matière, Donner à voir, Frontalité, Intégration, Opposition, Lieu, Posture, Effacement, Affichage, Ecriture, Style, Modénature, Allège, Mur-rideau, Terrasse, Retrait, Situation, Refend, Pignon, Espace, Pratique, Jeu, Rapport, Echelle, Mesure, Prospect, Emprise, Confort.

Veinard(e)s, on a (presque) tout changé à droite !


Décryptage :


Ai Weiwei, le plasticien chinois, est l'un des plus grands artistes contemporains, mais il ne peut pas quitter la Chine. Allez comprendre pourquoi ! C'est vrai qu'on peut aussi se demander pourquoi la Chine - mais aussi la Russie - ne vire pas le dictateur syrien (voir dans "Le Monde" l'article à peine soutenable de Jonathan Little). Everybody Knows vous a déjà parlé de son travail (vous n'avez qu'à chercher !).
Une exposition de ses photos va s'ouvrir la semaine prochaine au Musée du jeu de Paumes à Paris. A ne rater sous aucun prétexte !

Pioupiou : ça veut dire ce que ça veut dire...  on en reparlera

Le street-art est un art à part entière. Everybody Knows tente de vous le prouver avec cet accrochage et les "lips" volés aux murs de Paris.



J'aime tout particulièrement cet anthropomorphisme que l'on peut retrouver sur la dalle de la gare Montparnasse. Rien n'est étudié ; tout est le fait d'un hasard qui est le concours de milliards de circonstances. La vie quoi ! Et vous voyez comme moi un petit bonhomme avec son nez rouge, la tête enfoncée dans les épaules et qui vous salue avec sa main droite (non ?)

J'allais oublier : qui c'est le N°1 des ventes à la FNAC de Boulogne ? Si vous m'aviez écouté, vous l'auriez déjà acheté !

Poésie, architecture et procédés constructifs

Je b'étonne avec Ricciotti ou je m'étale avec Rogers ?
Je me brique avec Mario Botta ou je me boise avec Bidard et Raissi ?
Je m'empierre avec Perraudin ou je me cartonne avec Shigeru Ban ?
A vous !
NB : je me rends compte que cette poésie peut échapper à un grand nombre d'orbites cruelles ; décryptage : 
- les noms sont ceux d'architectes
- b'étonne avec Ricciotti car il est le chantre du béton, m'étale avec Rogers car c'est itou mais avec le métal, etc.
- Bidard et Raissi sont les concepteurs du futur siège de l'INPI à Colombes ; lequel est doté d'une structure porteuse bois (au passage, merci à CVV qui se reconnaîtra si elle vient jusqu'ici ; ce qu'elle ne fera pas !)

Cette année je me prends au mot et j'écris ! (7)




Aujourd'hui le Post-it dit ceci :
" C'est l'histoire de Plume et de Crayon qui allaient écrire un livre ensemble, mais ne le savaient pas encore." Charlie
Pour les orbites cruelles qui prendraient Everybody Knows juste maintenant (je vous en prie... pas de pensées incorrectes !), l'exercice consiste, à partir d'un Post-it extrait d'un minuscule opuscule en contenant 48 dont le titre est "Cette année.....", de broder quelques mots. Nous en sommes donc à l'exercice 7.
En classes primaires, nous écrivions avec des plumes Sergent Major que nous trempions dans l'encre bleu marine des encriers de porcelaine blanche encastrés dans les tables de bois scarifié de nos pupitres d'écolier. Tour à tour, nous étions en charge de remplir d'encre les minuscules orifices. L'opération s'effectuait tous les deux ou trois jours, le matin, un peu avant que la sonnerie retentisse qui convoquait les élèves à s'aligner sur deux rangs, face au porche d'entrée des classes. Il s'agissait d'une pension de curés. Le maître, immense et sec, sanglé dans une blouse grise, observait avec autorité sous la marquise de verre armé, la manœuvre brouillonne des gamins. Dans la journée, de mauvais bougres s'employaient à introduire dans les encriers des premiers de la classe - forcément des fayots - des boulettes de papier buvard. Ainsi se rétablissait un certain équilibre des chances dans les travaux d'écriture : les futurs cranes d’œufs régalaient leurs cahiers de superbes pâtés comme pouvaient le faire les cancres, avec une facilité équivalente, mais moins de naturel, bien entendu.
Avez-vous déjà vu une plume de cigogne ? C'est une chose incroyable ; elle vous fait immédiatement penser à un ange.


mercredi 15 février 2012

Le TGI de Paris (enfin) dévoilé !

Nous avions la Très Grande Bibliothèque (TGB), le Train à Grande Vitesse (TGV), les Lignes à Grande Vitesse (LGV), le Grand Paris (GP) ; nous avons désormais le TGI de Paris qui, comme son abréviation ne l'indique pas, n'est pas le Tram à Grande Innovation ou le Très Grand Inquisiteur, mais simplement le Tribunal de Grande Instance (de Paris).
Sa silhouette en forme de gradins va dans quelques années prendre place dans le Skyline parisien du futur aux côtés des inamovibles (Tour Eiffel, Tour Montparnasse) et des possibles (Tour Triangle, B3a et Hermitages).
L'exercice était complexe : une tour qui n'en soit pas vraiment une, un bâtiment pour le public et un pour les magistrats tout en gardant une cohérence à l'ensemble, un site à Paris mais un positionnement qui ne soit pas vécu comme un dos tourné vis-à-vis de la banlieue, un geste architectural mais sans ostentation, l'appel à la modernité mais une certaine intemporalité également, solennité et humanité, ...



La proposition de Renzo Piano, qui parvient à résoudre cette quadrature du cercle, est d'une intelligence remarquable ; elle donne vraiment corps à un mythe : celui de la ville verticale, mais avec mesure, équilibre et humanisme. Le dessin ne cède à aucune des facilités que la société du spectacle impose trop souvent à l'architecture : débordements de végétation verticale, colorations excessives et autres déhanchements. C'est une architecture sérieuse qui vient rappeler qu'un bâtiment de la République est d'abord un outil de travail, respectueux d'un site, pensé pour les utilisateurs avant les magazines spécialisés...
L'exposition qui se tient actuellement dans les locaux du Palais de Justice de Paris est tout à la fois d'une très grande richesse et d'une grande modestie. Elle fourmille de détails constructifs, de dessins, de croquis. Elle ne s'égare pas dans le jargonnage pédant. En bref, elle honore le monde de la conception (architectes et ingénieurs) et celui de la construction (entreprises). Elle témoigne de la qualité du dialogue entre art et technique.
Un petit texte imprimé sur le haut d'un panneau rappelle qu'un tel projet est bien entendu imparfait et qu'un certain nombres de choses doivent encore être mises au point.
Le talent particulier d'un grand architecte est de savoir enrichir son projet jusqu'au terme de sa réalisation.
On peut faire confiance à Renzo Piano pour qu'il en soit ainsi.

mardi 14 février 2012

Lire "Le Capital" en moins de 2H !

Le Capital, œuvre majeure de Karl Marx achevée par son disciple Engel, somme de plus de 3.000 pages fondatrice du monde moderne, peut être lu en moins de 2 heures grace à l'excellente édition en 2 tomes seulement de Demopolis ; et ce, sans abuser du "Guide de la lecture rapide" des Editions Marabout.
Et en plus, on comprend (presque) tout !...

Merci à FDJ qui se reconnaitra si elle parvient jusqu'ici.

dimanche 12 février 2012

Old ideas - Crazy to love you



Crazy to love you (La folie de t'aimer)


Je devais être fou de t'aimer
D'être descendu au fond du trou
D'avoir passé tout ce temps dans cette tour
Mendiant ma folie pour que cela cesse

Je devais être fou de t'aimer
Toi qui ne fut jamais celle
Que je traquais dans le souvenir de mes peines de coeur
Les tresses de ses cheveux et sa robe entièrement défaites

Quelquefois mes pensées m'emmenaient au loin sur une route
Je suis un vieil homme et les miroirs ne mentent plus
Mais la folie est là comme un masque
Plus profonde qu'un simple au-revoir

Je devais être fou de t'aimer
De laisser tout tomber
D'être tous ces gens que je détestais
De n'être plus personne en définitive

Je suis fatigué de choisir le désir
Je suis sauvé par une fatigue agréable
Les portes de l'engagement ne sont plus fermées
Mais il n'y a plus personne pour tenter de partir

Quelquefois mes pensées m'emmenaient au loin sur une route

...

Je devais être fou de t'aimer
Toi qui ne fut jamais celle
Que je traquais dans le souvenir de mes peines de coeur
Les tresses de ses cheveux et sa robe entièrement défaites

 Léonard Cohen (traduction libre)



Sonates pour piano de Scarlatti

"Lecteur, que tu sois dilettante ou professeur, ne cherche pas dans ces compositions une profonde érudition, mais plutôt un jeu ingénieux de l'art... Montre-toi donc plus humain que critique, et ton plaisir n'en sera que plus grand."
Ainsi l'écrivait Domenico Scarlatti, en 1738 ; il avait alors 53 ans. Il venait d'écrire 30 pièces pour clavecin qui préfiguraient les 555 sonates qui allaient le rendre célèbre.

Merci à DdS qui m'a fait découvrir cette musique interprétée par Horowitz, dont la beauté est à elle seule une promesse de bonheur.

Le Pavillon blanc (à propos du)

Extrait du texte de Jean-Paul Curnier pour le livre des éditions Al Dante consacré à la médiathèque-centre d'art de Colomiers de l'architecte Rudy Ricciotti :

"Travailler ne doit pas humainement se limiter au fait d'échanger de l'argent contre du temps de vie perdu et sans qu'y soit jamais utilisé la faculté d'invention personnelle. Cela devrait être clair pour tout le monde, mais on en est encore loin. Car ce que l'on est en droit d'espérer aujourd'hui, c'est que la signification et la perception d'un bâtiment nouvellement construit ne s'accompagnent plus dans leur propre environnement de cette indifférence lugubre que l'on connait trop bien, de ce vide dans les esprits."

Dominique Perrault à Barcelone ou l'hommage à Mies

L'hôtel-tour ME Barcelona est situé sur l'avenue Diagonale, perspective majeure du plan de la ville conçu par Cerda*, longue de 11 km, orientée nord-ouest / sud-est, reliant le quartier de l'Illa à celui de Diagonal Mar et Forum, le nouveau port de Barcelone. 
Elle est édifiée dans un quartier dont le tissu urbain est dense, comprenant un grand nombre de bâtiments dont les façades laissent deviner un passé d'activités liés à la mécanique ou la petite industrie ; les hauteurs des immeubles d'habitation sont relativement faibles (6 ou 7 niveaux au maximum).
L'architecte a voulu composer un bâtiment qui réconcilie la ville horizontale - traditionnelle - et la ville verticale - la Barcelone moderne. Ce défi, il l'a relevé en proposant une tour d'une très grande finesse comportant, dans sa partie basse, un retrait d'une hauteur correspondant sensiblement à celles des corniche supérieures des constructions existantes voisines.
Ce retrait engendre un porte-à-faux qui constitue l'un des aspects les plus caractéristiques du bâtiment. L'autre aspect, l'autre signature de cet édifice, relève du traitement de la façade. Il n'y a pas ici de démonstration spectaculaire. Perrault a du se souvenir que s'il était dans la ville de Gaudi, il était aussi dans celle qui abrite l’œuvre de Mies van der Rohe ; icône du minimalisme et de l'élégance. 
Comme souvent dans ses projets (Très Grande Bibliothèque, Cour Européenne des Droits de l'Homme), l'architecte a fait appel à un produit issu du monde industriel (il faudra qu'un jour un étudiant fasse une thèse sur cette fascination que Perrault a pour l'univers de l'industrie...). Donc, il a pris une tôle en aluminium micro-perforée, comme celle utilisée dans les bardages des usines pour leur cloisonnement intérieur, et il l'a placée entre deux vitrages.
Le module élémentaire de sa façade étant ainsi constitué, l'architecte peut ensuite jouer sur un nombre réduit de paramètres : transparence (totale, opacité, semi-transparence), tailles de module (2) et alternance de ces derniers. La modénature donne une impression de simplicité, de précision et d'une très grande clarté.
Structurellement, le bâtiment est constitué aux deux tiers en béton et, pour le tiers suivant correspondant à la partie en porte-à-faux, en métal matériau beaucoup plus léger.
Le pignon de la tour est souligné par une bande verticale plus sombre, d'une largeur égale à quatre modules, et aux allures de galon de smoking (image de l'architecte). Au sommet de la tour, un très chic restaurant avec terrasse permet de contempler la mer et la montagne.
L'ensemble hôtelier est complété, sur l'arrière, par un immeuble plus bas, reprenant le même dispositif en termes d'enveloppe. Au dernier étage de celui-ci se trouve une piscine.

A proximité immédiate, le promoteur américain Hines a confié à Dominique Perrault la conception de "Diagonale 123" un ensemble de bureaux. L'architecte joue le dialogue subtil avec le voisin et produit une sculpture géométrique de verre, habillée de noir, avec de très fines rayures horizontales brillantes et réfléchissantes.
Du grand art !
Merci à JG et DdS - qui se reconnaîtront s'ils viennent jusqu'ici - pour leurs commentaires éclairés, et leur très grande disponibilité...

* Ildefons Cerdà i Sunuyer (1815-1876) était (excusé du peu) : Ingénieur des Ponts, Urbaniste, Architecte, Juriste, Economiste et (accessoirement ?) homme politique catalan

Note : j'ai été très surpris d'apprendre que Dominique Perrault (de son aveu-même) n'avait jamais mis les pieds en Espagne - et donc à Barcelone - avant 1997, année où il reçut le Prix Mies van der Rohe...

samedi 11 février 2012

Old Ideas - Different sides

Après "Going Home", "Lullaby", juste le refrain "cohénien" de la 10ème chanson de l'album "Different sides" :

"Nous nous disions qu'il y a des lois pour obéir
Mais franchement je n'aime plus ta conception des choses
Tu veux changer la façon dont je fais l'amour
Je veux te quitter et partir seul."

Léonard Cohen (traduction libre)

Old Ideas - Lullaby

Après "Going home", "Lullaby" qui signifie "Berceuse". Un Haïku sur une musique d'un calme absolu. Tous les parents qui ont des enfants à bercer devraient immédiatement acquérir ce CD ! Le refrain... Le refrain !...






Berceuse

Dors bébé dors
Le jour s'enfuit
Le vent dans les arbres
Parle en langues

Si ton cœur est déchiré
Je ne veux pas savoir pourquoi
Si la nuit est longue
Voilà c'est ma berceuse

Tu vois la souris a mangé les miettes
Alors que le chat a mangé la croûte
A présent ils sont tombés amoureux
Ils parlent en langues

Si ton cœur...

Dors bébé dors
Il y a un matin qui vient
Le vent dans les arbres
Parle en langues

Si ton cœur est déchiré
Je ne veux pas savoir pourquoi
Si la nuit est longue
Voilà c'est ma berceuse

Léonard Cohen (traduction libre)




Old Ideas - Going Home


Le dernier CD de Léonard Cohen est tout simplement prodigieux. A 72 ans, l'immense poète et chanteur canadien nous livre 41' et 41" de bonheur absolu avec 10 chansons qui sont le reflet de l'individu : vérité, simplicité, élégance, détachement, attention, humour, sens du sacré, ...
Voilà pourquoi, ici, on aime beaucoup.
Premier exercice de traduction avec la 1ère chanson de l'album, "Going Home", que j'ai traduit simplement par "Revenir"


Revenir
J’aime parler avec Léonard
C’est un athlète et un berger
C’est un bâtard paresseux
Qui vit en costume
Mais il dit vraiment ce que je lui raconte
Même si ce n’est pas très correct
Il n’a simplement pas la liberté
De refuser
Il parlera avec les mots justes de la sagesse
Comme un sage, un visionnaire
Bien qu’il se considère comme pas grand-chose en réalité
Seulement l’élaboration furtive d’une chanson à succès.

Revenir
Sans mon pardon
Revenir
Un jour, demain
Revenir
Là où c’est mieux
Qu’avant
Revenir
Sans mon fardeau
Revenir
Derrière le rideau
Revenir
Sans le costume
Que je portais.


Il veut écrire une chanson d’amour
Un hymne au pardon
Un manuel pour vivre avec la défaite
Un cri au-dessus de la souffrance
Une réconciliation avec le sacrifice
Mais ce n’était pas ça ce que j’attendais de lui
Finalement
Je veux être certain
Qu’il n’a plus de fardeau
Qu’il n’a plus besoin d’une vision
Qu’il a seulement la permission
De se soumettre dans l’instant
Ce qui SIGNIFIE : voilà ce que je voulais lui dire
Encore une fois.

Revenir…

J’aime parler avec Léonard
C’est un athlète et un berger
C’est un bâtard paresseux
Qui vit en costume

Léonard Cohen (traduction libre)

cette année je me prends au mot et j'écris ! (6)


Sur le Post-it aujourd'hui :
"Donc, plus de jérémiades !
Un Post-it bleu d'amour
Un jaune pour les conseils
Et un vert pour le rangement."

Arrêtons-nous quelques instants sur le mot "jérémiades". Tout un chacun connait la signification : plaintes fréquentes et importunes, gémissements, lamentations, geignements, etc. Mais qui en connait la véritable origine ?
En réalité Jérémie avait, il y a fort longtemps, un petit job de prophète en CDI dans la banlieue nord de Jérusalem. (Je fais une digression. Prophète est un de ces petits métiers que la révolution industrielle et la globalisation mondiale ont fait disparaître. Et pourtant, avec le nombre de chômeurs que nous avons à présent, l'idée de réhabiliter ce job pourrait faire son chemin. Aucun problème pour trouver des enseignants : la classe politique en regorge ! Je clos cette digression)
Revenons donc à Jérémie. Prophète, il n'avait pas vraiment choisi. Lui il se voyait plutôt "sacrificateur" ; comme son père, et sans doute le père de son père, et encore le père du père de son père, si ce n'est le père du père du père de son père, comme il est d'usage de le préciser dans la Bible. Jérémie n'eut pas qu'une enfance malheureuse ; toute son existence fut une suite continue de malheurs, et même aujourd'hui, il n'est pas considéré comme l'auteur de la plupart des écrits qu'il n'aurait pas commis. Vous suivez ?

jeudi 9 février 2012

Dieu est dans le détail au musée Picasso de Barcelone

Pendant plus de trente ans, Jordi Garces, architecte catalan, a travaillé à l'extension du musée Picasso de Barcelone. Cette longévité, inhabituelle dans une intervention placée sous le regard jaloux des édiles municipales (Jordi a connu cinq maires différents), mérite d'être soulignée. Mais c'est d'avantage l'intelligence du parti et la qualité du résultat qui doivent être honorés.
L'actuel musée est constitué de la réunion de plusieurs demeures mitoyennes (trois ?). L'unité du lieu est donnée par une rue intérieure que l'architecte a créée en se servant de la typologie historique de ces demeures qui s'ouvraient sur la voie publique dans une séquence : porche, patio formant citerne, communs au rez-de-chaussée, habitation à l'étage desservi par un escalier extérieur. C'est les communs ou les réserves voûtés que l'architecte a réunis en enfilade, en créant des ouvertures d'une très grande discrétion. Au rez-de-chaussée, de plain pied avec la rue, il a installé un espace urbain libre dont il a soigné les perspectives avec la ruelle publique ; le visiteur est, tout à la fois, à l'intérieur du musée et en relation avec la ville. L'architecte offre ainsi une sensation de perméabilité - de liberté - entre l'espace public et l'espace privé.


cette année je me prends au mot et j'écris (5)

"Parfois le mot bouscule
Les grilles du langage.
Parfois je deviens ce que
J'ai nommé.
Alors, parfois, la Vie !"
Andrée CHEDID

Parfois l'esprit tente
de fuir au-delà de la raison.
Parfois il m'arrive
D'envier mes rêves.
Alors, parfois, la Vie !

Parfois la réalité se perd
Dans des doutes invaincus.
Parfois j'abdique dans
Une faiblesse facile;
Alors, parfois, la Vie !

dimanche 5 février 2012

Cette année je me prends au mot et j'écris ! (4)

Sur le post-it aujourd'hui : "Les latins disaient déjà : "Verba volent, scripta manent." Les paroles s'envolent, les écrits restent."
Et que d'écrits ! Sur Everybody Knows, entre le 16 novembre 2008, jour de sa naissance, et le 24 juillet 2011 (date à laquelle je me suis arrêté provisoirement de recopier les textes sur un fichier Word), c'est un total de 152.121 mots qui ont été commis sur ce blog.
En extrapolant, sachant qu'à ce jour, 803 messages ont été commis (dont seuls 661 de publiés et 142 laissés au stade de "brouillon" pour des raisons liées à leur contenu - médiocre, trop osé, trop engagé, sans intérêt apparent, ...), qu'à la date du 24 juillet, le nombre de messages publiés s'élevait à 498 et correspondaient à 452 pages Word, il est probable qu'en ce dimanche enneigé de la Sainte Adélaïde ou de la Sainte Agathe (au choix), nous en soyons à :
Nombre de messages commis : 498 / 0,82* = 607
* part de messages publiés / au nombre de messages total

samedi 4 février 2012

Le Guépard de Giuseppe Tomasi, Prince de Lampedusa

Louis Aragon considérait "Le Guépard" comme "l'un des plus grands romans de ce siècle" (le 20ème). On serait tenté par partager le point de vue du poète ; un tel jugement impose de disposer d'une culture suffisante ; ce n'est pas le cas. Donc, on se contentera d'affirmer qu'il s'agit d'un chef d'oeuvre...
L'histoire est celle de la fin de la maison Salina incarnée par le Prince Don Fabrizio, personnage complexe, aristocrate curieux, hédoniste absolu (il évite aussi le déplaisir), lucide spectateur de la décadence d'un monde auquel il appartient, acteur - au travers du soutien qu'il témoigne à l'arriviste Tencredi, son neveu et pupille - de la révolution en marche puisque "Si nous voulons que tout continue, il faut d'abord que tout change." ; phrase devenue presque un mythe chargé de cynisme et d'absurde.
C'est une œuvre tour à tour sombre et sensuelle, morbide et somptueuse, servie par un style magnifique qui accompagne la description des ors décatis du palais de Donnafugata, des paysages de Sicile écrasés par la chaleur ou de la volupté d'Angelica.

Cette anné je me prends au mot et j'écris (4)

Sur le Post-it aujourd'hui : "Pour chasser une idée fixe, plutôt aérer mes idées par une lecture drôle"
Qu'est-ce qu'une lecture "drôle" ? Spontanément, je répondrai : Reiser, San Antonio ("Remets ton slip gondolier", par ex.), Saramago, Jean-Claude Dubois (hors romans neurasthéniques), le "Dictionnaire ouvert jusqu'à 22 heures" de l'académie Alphonse Allais, le dernier Jonathan Coe "La vie très privée de Mr Sim", Houellebecq (hors passages neurasthéniques également).

Comment fabrique-t-on une histoire "drôle" ?

1) Prendre un fait d'une banalité forcément affligeante ; par exemple, un pet en réunion de comité de direction venant ponctuer l'annonce, par le PDG, du bilan déficitaire de la société, peut-il constituer la base d'une histoire "drôle" ?

2) Développer le fait tout en évitant d'être lourd et scabreux ; par exemple, poursuivre sur le fait précédent en écrivant que l'ensemble du comité de direction - à l’exception du PDG - se met à péter pendant 10' victime des spasmes d'un fou-rire débridé, peut-il constituer la suite d'une histoire "drôle" ?

3) Rebondir après la 1ère scène qui était susceptible d'être "drôle" afin de poursuivre dans une veine plus subtile ; par exemple, faire entrer la secrétaire du patron - dont tout le monde sait qu'elle couche avec lui - dans la réunion du comité de direction avec un plateau chargé de cafés et de jus d'orange, et lui faire tordre un nez interrogatif sur l'origine de l'odeur ambiante juste avant qu'elle ne se prenne les pieds dans le câble du projecteur, renverse les cafés et le jus d'orange sur le costume Smalto du PDG, alors que l'appareil scélérat (le projecteur) diffuse à présent le diaporama du dernier week-end à Marrakech du patron et de ladite secrétaire, peut-il constituer une poursuite crédible dans une veine plus subtile ?

4) Trouver une chute absolument délirante ; par exemple, montrer la secrétaire tenter de ressortir rapidement de la pièce, rouge de honte, et se prendre la porte de la salle de réunion en pleine figure car elle vient d'être ouverte par l'autre assistante - celle qui couchait avant avec le PDG - laquelle, alertée par le fracas de la chute du plateau, des cafés et des jus d'orange, s'est précipitée "innocemment" pour voir ce qui se passe ; décrire le visage ensanglanté de la favorite, forcer sur le détail en précisant que le sang a giclé jusque sur ses prothèses mammaires PIP ; tout ceci peut-il constituer une chute absolument délirante clôturant cette histoire "drôle" ?

vendredi 3 février 2012

Cette année je me prends au mot et j'écris ! (3)

A l'instant où j'écris je me rends compte que les deux premiers textes placés sous le titre "cette année je me prends au mot et j'écris" que j'avais laissés au stade de brouillon (et donc non consommables par vos orbites cruelles) ont disparu... Ça m'apprendra à les cacher !  (J'entends les sarcasmes)
Pour suivre la démarche de l'auteur, quelques explications : "cette année je me prends au mot et j'écris" est un minuscule opuscule contenant 48 post-it que l'on m'a offert ; sur chacun d'entre eux est inscrit une petite phrase ou bien une proposition d'exercice. J'en suis au N°3.
Merci à FDJ (généreuse donatrice) qui se reconnaitra  si elle parvient jusqu'ici...

Sur le Post-it aujourd'hui : "Grandes envolées littéraires : taquiner la muse en écrivant des vers"

Le soleil, dans l'axe glacé de la Seine,
En Dieu parfait, en orange électrique
Qui s'élève, puissante et sans peine,
Au-dessus des ombres historiques.

Une tour de la Grande Bibliothèque
S'embrase spontanément
- 11 septembre en remake -
Caressée par les doigts de l'astre saignant.

Résumé des épisodes précédents :
X était à bord d'un voilier magnifique qui vient d'échouer dans un port ; heureusement le long d'un quai. Quelques instants avant l'incident, il était en train de prendre l'apéritif à l'avant du bateau, dans un Chesterfield rouge, en compagnie d'une jeune femme bronzée et aux dents ultra blanches.

X ne devina pas immédiatement où le voilier venait d'accoster. C'est en prenant pied sur le quai constitué de grosses pierres de granit rose dans lesquelles les anneaux d'amarrage avaient inscrit leurs empreintes circulaires, qu'il le su comme une évidence. Pourtant, le paysage autour de lui ne correspondait pas à quelques chose de précis ; plus exactement, il s'agissait d'une sorte de patchwork, comme si le décor qu'il balayait du regard était constitué de fragments de plusieurs villes et lieux différents. X pouvait donc être à la fois à Brouage dont il distinguait quelques maisons basses et les remparts en pierre blanche des Charentes, à Venise sur la promenade de la Giudecca du Dorsoduro, ses frontons palladiens et les portes en bois fatiguées des anciens hangars à bateau, ou encore sur la cale n°1 de l'embarcadère de l'île de B., face aux deux hôtels enduits à la chaux qu'il a toujours connus ; l'un avec des volets rouges, et l'autre avec des volets bleus. D'autres images lui venaient à l'esprit, mais moins évidentes. X avait conscience de l'invraisemblance de ce paysage. Mais ce montage urbain était-il si irrationnel que ça ? N'existait-il pas en définitif, quelque part ? mais où ? Puisque ce n'était pas dans son imagination, puisqu'il pouvait le voir, le toucher, passer entre ses ruelles, être un instant rue du Bourg et un instant plus tard Calle de l'Abazia.