mardi 30 décembre 2008

L'inconnu du 1er janvier de la Porte de Champerret

Jeudi 1er janvier 2009, vers 15H30. Je suis en voiture et sur le chemin pour aller chercher mon fils ainé, F., à la gare Montparnasse. Depuis B., lieu de mon domicile, et compte tenu du jour et de l’heure, le trajet le plus pratique consiste à prendre la périphérique extérieur à la porte de Champerret, de sortir Porte de Brançion puis de longer les voies SNCF par les rues Castagnary et Falguière ; c’est tout droit jusqu’à la gare. Le tout est jouable en une demi-heure maximum.
Le feu passe au vert Porte de Champerret, et alors que je vais prendre la bretelle d’accès au périf, je remarque un homme qui fait du stop juste à l’entrée de cette bretelle. La quarantaine, plutôt bien habillé, un costume gris foncé, une serviette à la main. J’ai un moment d’hésitation et puis je me dis qu’on est le 1er janvier et que je pourrai bien faire quelque chose de sympa ; un truc qui ressemble à une bonne action. Je freine un peu au dernier moment et me gare plutôt sur la gauche le long des plots en plastiques ; ce qui irrite semble-t-il la grosse Mercedes qui me suit et me klaxonne copieusement. Normal, je n’ai pas mis mon clignotant, et le bon sens eut voulu que je me gare plutôt à droite. L’homme ouvre la porte avant et s’engouffre dans la voiture. Je lui dit bonjour et je lui demande où il va. « Porte d’Italie », me répond-il, assez direct et d’une voix essoufflée. « OK, c'est mon chemin, mais je vous laisserai Porte de Brançion car je vais à Montparnasse ; qu’est-ce qui vous arrive ? ». « Problème de voiture. » Toujours assez direct et ponctué d’un gros soupir. L’homme regarde devant lui. Le périphérique est dégagé. Tout en roulant, je l’observe du coin de l’œil. Il est un peu ramassé, vouté. Il est grimaçant. Sa serviette est entre ses jambes. Il sent un peu fort la transpiration, la poussière, le gaz d’échappement.
- « Je m’excuse », dit-il subitement comme s'il avait interprété mes pensées, « je sens un peu fort , mais je suis dans une vraie galère depuis ce matin. »
- « Qu’est-ce qui vous arrive ? »
L’homme se retourne vers moi, je remarque un défaut dans son œil gauche qui est mi-clos. Il se lance dans un discours saccadé, un peu agressif.
- « Je me suis fait tout voler ce matin à Compiègne. J’étais à la terrasse d’un café et j’avais laissé sur la table mon portefeuille et les clés de ma voiture. Trois types sont passés en courant et ils m’ont tout piquer. Ils avaient du repérer ma voiture. Vous savez, Monsieur, il vaut mieux ne pas perdre tous ses papiers et les clés de sa voiture un 1er janvier en France. Et puis l'assurance ne veut rien savoir car il n'y a pas eu d'effraction. Je suis dans la merde."
- "Vous auriez du casser votre serrure", lui dis-je
Il me regarde d'un drôle d'air. J'ai sans doute du dire une connerie. Il poursuit.
- "Je suis allé voir les flics et tout ce qu’ils m’ont dit c’est que c’était pas étonnant, qu’avec une voiture comme ça, on attisait les convoitises… Je leur ai répliqué qu'étant donné que je refile 68% de mes revenus au fisc, alors avec les 32% restant, j’ai quand même le droit de m’acheter la voiture que je veux ; on est en démocratie ! ».
- « Et vous avez quoi comme voiture ? »
- « Un Q7 »
Je ne sais pas ce que c’est qu’un « Q7 », et ça doit se voir, puisque l’homme me précise immédiatement :
- « Vous savez, le 4X4 Audi, la grosse. Je n'ai de compte à rendre à personne. Je travail suffisamment, alors si j’ai envie de m’acheter une voiture, je me l’achète, non ? ».
J’ai envie de lui dire que je trouve complètement débile d’avoir une bagnole aussi grosse, mais je m’abstiens ; je n’ai pas non plus envie de partir avec ce type sur un débat au sujet des 4X4, l’avenir de la planète, les riches, les pauvres, les fonctionnaires qui foutent rien et ceux du privé qui travaillent.
- « Et qu’est-ce que vous faites à Compiègne ? »
- « Je n’habite pas à Compiègne, je vous ai dit que j’étais de Dijon »
Je n'ai pas le souvenir qu'il m'ait parlé de Dijon.
- « Ah bon ? Oui, et alors, à Dijon ? »
- « Je suis dans les ressources humaines, j’ai monté mon cabinet en libéral il y a 9 ans ; je suis consultant pour des sociétés qui licencient du personnel. Avant, j’étais DRH dans une entreprise dont le siège social était à Dijon ; celle qui ferme ses portes là, en ce moment, vous avez du en entendre parler sans doute. »
- « Oui, je vois ». Je me rappelle vaguement d’une information de ce genre, mais impossible de me souvenir du nom de l’entreprise.
Fichtre, me dis-je, un type qui roule en 4X4 et dont le job est d’aider les boîtes à se débarrasser de leurs employés ; la timbale !
- « Et puis je suis hyperdiabétique. Vous ne savez pas ce que sais que de vivre avec une sonde en permanence branchée à une réserve d’insuline. Si je ne mange pas, je vais crever. »
- « Mais non, ne dites pas ça »
- « Si, je vais crever, je le sais. Sauter deux repas, c’est pas possible. Je vais faire un malaise. Je ne vois déjà plus les couleurs. »
En disant ça l’homme me regarde avec insistance. Il parle d’un ton un peu agressif comme quelqu’un en bout de course. Il est essoufflé. Il se plie un peu vers l’avant en se tenant le ventre.
- «Il faut que vous alliez à l’hôpital, aux urgences »
- « Mais à l’hôpital, ils s’en foutent. » Me répond-il sur un ton agacé. "J’y suis allé ce matin, mais ils m’ont dit que j’avais tout : la réserve d’insuline, la sonde, …que mon cas relevait plus de l’hôtellerie-restaurant que de l’hôpital. On voit que vous ne savez pas ce que c’est de nos jours de tout avoir perdu un premier janvier en France. »
Evidemment, je suis un peu désemparé. C'est vrai, il m'arrive de perdre (régulièrement) ma carte de crédit, mes papiers, mes clés de voiture, mais j'avoue ne pas avoir l'expérience de la simultanéité des emmerdes. Quoi lui dire ? De toute façon, je n’ai pas le temps de réfléchir car il enchaine avec un débit de plus en plus saccadé.
- « Je vais Porte d’Italie car mon amie a un appartement là-bas, mais elle n’est pas là en ce moment ; elle est à l’étranger, elle ne revient que demain et je n’ai pas les clés. Voilà tout ce qu’il me reste. » Il me met sous les yeux une vieille carte d’identité crasseuse sur les bords. « Vous croyez qu’on peut faire quelque chose avec ça ? Tout est fermé aujourd’hui. Je sais que je vais mourir, mais c’est pas grave, tant pis, il faut bien crever un jour. »
- « Mais ne dites pas ça … »
- « Vous êtes commercial ? »
- « ??? »
- « Oui, je dis ça car j’ai vu votre vignette d’assurance, là en bas de votre pare-brise, c’est Gras-Savoye ; c’est une voiture de fonction ? »
- « Oui, en quelque sorte… » Je suis quand même très surpris que l’homme désespéré d’il y a quelques secondes puisse disposer encore de la curiosité déductive de faire le lien entre le nom d’un assureur et mes fonctions professionnelles.
- « Quand j’étais DRH, nos commerciaux étaient tous assurés chez Gras-Savoye. »
- « Ah bon ». Je dois vraiment avoir l’air d’un con.
Nous sommes maintenant au niveau d’Issy les Moulineaux. On peut voir une forêt de grues à tours métalliques et des panneaux publicitaires qui vantent les mérites d’un futur programme de bureaux qui sera plus « HQE » encore que jamais. La planète peut être tranquille et dormir sur ses deux pôles : les promoteurs prennent soin d’elle !
- « Je travaille un peu dans ce secteur », lui dis-je en essayant d’avoir un minimum de contenance et en montrant de la main les chantiers de béton. « Mais je ne peux pas dire que je sois uniquement commercial ; je réponds à des offres… »
- « Ah oui, je vois, la construction, vous répondez à des appels d’offres publics », répond-il avec beaucoup d’assurance, comme s’il semblait connaître parfaitement mon secteur d’activité.
Ce type est assez troublant. Je manque d’à-propos lucides qui devraient me conduire à lui dire qu’il a certainement des amis, qu’on peut les appeler si il veut. C’est vrai, avec une situation comme il a, un 4X4 monstrueux, une profession libérale qui doit lui permettre, malgré ses revenus déclarés imposés à 68%, de mettre un peu de black à gauche chroniquement, il doit bien avoir quelques amis que l’on pourrait joindre, il joue sans doute au golf, peut être qu’il est au Rotary… En même temps je me demande comment je vais me sortir de cette rencontre, si j’ai bien fait de faire monter ce type dans ma voiture, s’il ne va pas me sortir un cutter de sa serviette que je vois toujours coincée entre ses jambes. Je pense au psychopathe d’Aix en Provence qui s’est enfui il y a deux jours de son asile (le gars avait quand même été interné pour avoir exécuté à coups de hache le concubin de sa grand-mère !), cet « individu très dangereux » (comme il est dénommé par toutes les radios qui se délectent de cette opportunité de livrer aux ondes un peu de croustillant sanguinolent durant la trêve des confiseurs), il pourrait bien avoir traversé la France et se retrouver aujourd’hui sur le bord du périphérique à faire du stop, se faire embarquer par un couillon comme moi, taraudé par sa conscience judéo-chrétienne, et s’appliquer à faire que ledit couillon achève sa brève existence médiatique dans les colonnes « faits divers » atrocement mutilé à coups de cutter ! Mais mon passager ne me laisse pas le temps d'imaginer le pire. Il reprend.
- « Je souffre. Vous ne savez pas ce que c’est que d’être hyperdiabétique le 1er janvier en France et de savoir qu’on va crever comme un chien car on n’a plus ses papiers ; je sens que je vais crever ; je vais mourir de suffocations, j’ai des maux de têtes, j’ai la gorge gonflée, … »
Effectivement, me dis-je, il a raison : je ne sais pas vraiment ce que c’est, et en plus j’avoue égoïstement que ça correspond à une expérience qui ne me tente que très moyennement ; j’ai toujours manqué de curiosité et, c'est vrai, la misère sur un plan personnel est une situation que je préfère examiner d’un point de vue extérieur.
J’aperçois avec un certain soulagement le panneau indicateur signalant la sortie prochaine Porte de Brançion ; avec un certain soulagement et aussi une légère angoisse. Que va-t-il me demander en final ? Va-t-il « cracher le morceau » que je ne peux pas le larguer comme ça, que si je fais ça je le condamne à une mort certaine, que je dois bien avoir un lit pour l’accueillir, etc. S’il me dit ça, qu’est-ce que je vais lui répondre ? Je pense au couple d’auto-stoppeurs allemands que j’avais accueillis pour une nuit à la maison, il y a quelques années. C’était en juillet. Me ventant de cet exploit, ma famille avait été unanime pour me dire que j’étais « innocent », que j’étais même un peu « malade », qu’il y avait ma fille dans la maison (elle m’a avoué plus tard s’être enfermée à clef dans sa chambre !) et qu’elle aurait pu être violée par le type. Mes arguments comme quoi je les avais pris à Poitiers et que nous avions parlé ensemble plus de trois heures avant d’arriver sur Paris, qu’ils m’avaient dit revenir d’une marche de plusieurs semaines sur les Chemins de Compostelle, que nous avions pu échanger sur leurs convictions, leurs situations actuelles (lui était menuisier et elle étudiante en histoire des religions), la ville où ils habitaient, les villes dont ils étaient originaires, etc., et qu’ainsi il était légitime de penser que je pouvais m’être forgé une opinion objective sur ce couple de jeunes « terroristes », n’avait convaincu personne. Je restais un indécrottable naïf dont n’importe qui pouvait abuser. Et même après avoir découvert qu’ils avaient dormi dans un lit, près d’une table de nuit sur laquelle il y avait une enveloppe non cachetée pleine de billets (pour plus de 1000 euros !) destinée à être remise à un de mes neveux qui devait partir à l’autre bout du monde quelques jours après, et qu’ils avaient certainement du se rendre compte de ma négligence puisqu’ils avaient laissé sur l’enveloppe un petit mot très touchant de remerciement ; aucune réhabilitation n'avait été prononcée : le naïf s’était vu doublé d’un inconscient !
Bon, dans le cas présent, j’avais passé moins de vingt minutes en compagnie de l’ex DRH et j’avoue que mon enthousiasme vis-à-vis de ce type s’établissait assez largement en-dessous de la moyenne, même s’il m’inspirait un réel sentiment de pitié. Il était de hors question de le ramener à la maison et de l’héberger : scandale au foyer !
Voilà la Porte de Brançion et sa bretelle de sortie. Ca fait quelques secondes que dans la voiture règne un silence chargé d’un cocktail un peu lourd de sentiments diffus : reproche, culpabilité, gêne, pitié, interrogation, …
- « Je ne sais pas ce que je vais faire maintenant. », tranche mon passager, « il va faire – 4 cette nuit, pour moi, c’est la fin. » Il hoche la tête et pousse des soupirs immenses.
- « Mais non, vous allez rencontrer une autre personne qui va vous aider », lui dis-je, sur un ton moyennement convaincu.
- « Je vais être à cours d’insuline, et à l’hôpital il faut être sur le point de crever pour qu’ils vous aident », me rétorque-t-il comme s’il m’accusait d’être complice de la déficience des services publics.
Ca y est, j’ai décidé : je vais lui donner un peu d’argent. Je sais que j’ai un ou deux billets dans la poche de mon jean. Je m’arrête. Je sors un billet de vingt euros et un de dix. Je lui tends les dix euros.
- « Non, je ne peux pas, je n’accepte que ce que je peux pas rendre », me dit-il, tout en prenant le billet. Je lui réponds :
- « Allez, prenez, je ne peux pas faire grand chose de plus, je regrette, »
- « Vous savez que je vais mourir, nous ne nous reverrons pas, Monsieur », et il sort de la voiture ; juste avant de refermer la porte, il lâche assez solennel, comme le ferait un supplicié face à l’échafaud, avec cette conscience de la postérité dont seules les figures historiques savent témoigner dans les instants les plus cruciaux : « adieu »
Le feu est au rouge et il est à côté de la voiture, secoué de spasmes, plié en deux en toussant comme un tuberculeux au stade terminal. Je l’observe encore quelques secondes dans mon rétroviseur alors que je suis reparti. Il n’a vraiment pas l’air en grande forme.
Suis-je un barbare ? Qui est cet homme ? Un affabulateur ? Un mythomane ? Un pauvre type réellement hyperdiabétique et dans une galère noire ? Un remarquable comédien qui en était peut-être à son 3 ou 4ème tour de périphérique et était parvenu à pigeonner une bonne dizaine de gusses comme moi ?
Et par dessus le marché, j’ai oublié de lui souhaiter une bonne année !

d'Alfred de Musset tiré du "Le fils de Titien, amour à la vénitienne"

"En quelque circonstance qu'on se trouve, il est impossible de voir une femme parfaitement belle sans étonnement et sans respect (...) il est curieux que ce qui est véritablement beau est l'ouvrage du temps et du recueillement, et qu'il n'y a pas de vrai génie sans patience."
J'ai oublié d'indiquer que ces quelques mots sont dédiés à mon épouse, bien entendu...

lundi 29 décembre 2008

Les gratte-ciels de Shangaï sont des copies !

Selon une étude publiée en mars par le Shanghai Daily, la structure des gratte-ciels de Shangaï ne résisterait pas à d'éventuels tremblements de terre : la moitié de l'acier acheté par les constructeurs de la ville ne remplit pas les critères essentiels de qualité et de résistance définis par les autorités chinoises. Certains échantillons prélevés pèsent même moins lourd que le fer, alors que le fer est le principal composant de l'acier.

mardi 23 décembre 2008

"Les phrases du jour" Archives

Le sentiment que le concept de vérité objective est en passe de disparaître du monde ... m'effraie bien plus que les bombes."
Georges ORWELL

Super fête à Thouars !
"... l'existence n'a guère d'intérêt que dans les journées où la poussière des réalités est mêlée de sable magique, où quelques vulgaire incident devient un ressort romanesque."

Marcel Proust (A l'ombre des jeunes filles en fleurs)

Longtemps je me suis couché de bonne heure."

Voltigeurs (ils sont réapparus !)

"La fierté c'est le petit-déjeuner des imbéciles.

Des jours sans fin. Roman de Sebastian Barry

"La liberté n'a qu'une langue et tous les hommes en connaissent l'alphabet."

Auteur Inconnu (entendu à la radio par hasard)

"L'idée d'un avenir entièrement basé sur les ingénieurs, je la considère comme barbare."

Samuel Courtauld

Aujourd'hui, rien n'est caché ou presque : nul n'ignore ce qui se passe ; le pire, c'est que cela ne change rien.
Eric Fassin "Un état d'insécurité"

"La religion, les professeurs, les femmes, la drogue, la route, la célébrité, l'argent...rien ne m'offre autant de satisfaction ni ne procure autant de soulagement à mes souffrances que le fait de noircir des pages, d'écrire."

Léonard Cohen

Post Vérité

Fake

Pour moi la poésie est une réalité. La poésie n'est pas une chose différente. La poésie est le plus vrai reportage d'une situation intérieure ou extérieure.
Je crois que le travail d'un artiste est de faire ouvrir les cœurs pour tous les gens d'un pays, pour tous les gens du monde.
Question d'un journaliste : Quelles sont les forces qui vous font marcher ? ... (silence).
Réponse : l'idée d'un absolu.
Léonard Cohen


"Ce qui peut arriver de mieux à un écrivain est d'avoir eu une enfance malheureuse."
Ernest Hemingway

se tiendre (autrement) :-)

"Obligé par le malheur des temps de faire à la fois une oeuvre et une besogne."
Victor Hugo

A des retraités mécontents, Macron a répondu en citant une conversation survenue quelques minutes plus tôt avec le petit-fils de Charles de Gaulle : "Il m'a dit, on pouvait parler très librement mais la seule chosequ'on n'avait pas le droit de faire, c'est se plaindre. C'est une bonne pratique qu'avait le Général !", a affirmé le président de la République avant d'ajouter : "Le pays se tiendrait autrement si on était comme ça".
Typhoon

Le secret des grandes fortunes sans cause apparente est un crime oublié, parce qu'il a été proprement fait."
Balzac. "Le Père Goriot"


Dérèglement climatique

Le choc des temporalités constitue pour les activités de création en général, et pour l'architecture en particulier, une menace.

JN Spuarte. Philosophe, poète.

Migrants

Frappes (aériennes)

"Regarder c'est inventer."
Dali

Inclusif (une société inclusive)

"Le monde n'obéit pas à la rationalité supposée des Lumières (...) il est en réalité régi par l'incertitude."
Jean-Luc Marion in Philosophie Magazine avril 2017

Black Friday : une contamination consumériste de plus !

Populisme : qualifie un comportement qui flatte les instincts triviaux de tout un chacun en lui évitant l'effort de s'interroger, précisément, sur ses instincts triviaux.JN Spuarte

"Nos imaginaires sont colonisés par l'ivresse du surmenage."Gaël Giraud

Confiance : qui ne s'acquiert ni par l'argent, ni par le pouvoir, mais par une indicible relation que seul le temps et les faits parviennent à révéler.JN Spuarte

Grève : mot désuet désignant l'agitation d'une minorité engagée pour la défense de droits qu'une majorité muette s'empressera d'adopter

"Au bout du compte, je crois, nous sommes tous libres de nos choix."Jonathan Coe. "Numéro 11"

"On peut dire que l'histoire de la culture moderne n'a pas été autre chose que l'opposition continuelle entre l'exigence d'un ordre et le besoin de distinguer dans le monde une forme changeante, ouverte à l'aventure, imprégnée de possibilités.Umberto Eco. 1962. (Art. paru dans Le Monde supplément livres 13/05/16)

Bienveillance ou bienveillant
Ce sont des mots qu'on ne cesse de voir dans la presse depuis quelque temps. Tout est bienveillant : la pédagogie, le management, le Pape François, le travail, Nuit debout, et même Macron (of course) !

"Tant qu'on me laissera écrire, je montrerai qu'il fut une époque où l'on croyait en la victoire de la morale sur les instincts, en la force de l'esprit et en sa capacité de maîtriser les pulsions meurtières de la horde."Sandor Maraï "Les Confessions d'un bourgeois"

... la seule chose, le seul carburant inépuisable de l'humanité, il n'y en a pas deux, c'est l'intelligence, et l'intelligence collective, l'inventivité collective."Pierre-Michel MENGER

Il faut choisir : ne rien faire ou être libre.

Il faut penser la catastrophe comme ayant déjà eu lieu pour avoir une chance de l'éviter.Jean-Pierre Dupuy (sur les pas du philosophe Hans Jonas)

Ceux qui ne sont guidés que par le désir de pouvoir ne sont pas en général des gens très intéressants. Ils ne sont traversés par aucun doute.Patrick Deville. Entretiens, paru dans la revue Transfuge. septembre 2014

Je pense que la période 1989/2020 représentera un tournant historique au cours duquel, s'il n'y a pas de résistance, on détruira deux à trois siècles de progrès social, intellectuel et culturel (...). L'obscurantisme est revenu mais cette fois, nous avons affaire à des gens qui se recommandent de la raison. Là devant, on ne peut pas se taire.
Pierre Bourdieu
Fin de siècle le 31 janvier 1999

""La culture d'un homme se mesure à sa capacité à apprécier les choses. Nous sommes ce que nous apprécions, rien de plus."

F.L. Wright

Le drame de l'Afrique, c'est que l'homme africain n'est pas assez entré dans l'Histoire. (...) Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n'y a de place ni pour l'aventure humaine ni pour l'idée de progrès." (Car) Le stéréotype se construit à présent dans le discours politique et, ce roman ("Il faut beaucoup aimer les hommes" de Marie Darrieussecq, Prix Médicis) le prouve, la littérature demeure notre meilleure arme pour le dynamiter.
Eric Chevillard. Le Monde des Livres. 12.11.2013

 Ce n'est pas le succès qui vous procurera le bonheur, mais l'écriture. (...) La beauté vous fait mal, c'est une souffrance éternelle, une plaie qui ne guérit pas, une lame de feu. (...) Que la beauté soit votre seule fin.(...) Laissez là la gloire et la fortune, embraquez-vous demain sur un bateau et reprenez lamer."
Brissenden parlant à Martin Eden dans "Martin Eden" de Jack London.Lorsque tout est préparé

Pour me montrer intelligent
Le sot que je porte caché
Prend la parole de ma bouche.
Pablo Neruda (1904-1973)
"Dans le cul la balayette"
Expression désuète (années 50-60 ?) synonyme de "Tu te fais baiser"


"Il faut mourir aimable (si on peut)."
Joseph Joubert


 « Utilise-moi pendant le temps qui te convient et convient à ton action et à ton casting ».
CL !!!!!!!

FachismeAu sens large, le terme s'est étendu à tout mouvement politique ou organisation s'appuyant sur un pouvoir fort au service d'une classe humaine dominante, la persécution d'une classe ennemie chargée de tous les maux, l'exaltation du sentiment nationaliste, le rejet des institutions démocratiques et libérales, la répression de l'opposition et un contrôle politique extensif de la société civile. (Wikipédia)

"Il faut du style et de l'élégance dans l'action, et aussi de l'humour. C'est fondamental. Comment croyez-vous que vieux, pas tres drole, gros et boutonneux, j'aie pu epouser une femme belle comme la mienne ?"
Ph Starck

"Paréidolie"Du grec ancien "para" (à côté de), et "eidôlon" (apparence, forme), consiste à associer un stimulus visuel informe à un élément identifiable, souvent une forme humaine ou animale.
Ex : Pergame est atteint de paréidolie aiguë depuis sa plus tendre enfance, et il vous le prouvera bientôt !
Or, comme chacun sait, toute adaptation est un déchirement."
Claude Parent
"Une carte du monde qui n’inclurait pas l’Utopie, n’est pas digne d’un regard, car elle écarte le seul pays auquel l’Humanité sans cesse aborde."

Oscar Wilde



"Aposiopèse"

Du grec aposiopesis ("silence brusque", du verbe "se taire", il s'agit d'une figure de style qui consiste à suspendre le sens d'une phrase en laissant au lecteur le soin de la compléter.

Carlos Fuentes use à l'envi de l'aposiopèse.

"Breloque"Accessoire généralement métallique derrière lequel court une foultitude d'appelés et qui se donne à très peu d'élus (comme d'habitude !).
Les écrans transforment progressivement le spectateur en consommateur désinvolte et avide de célébrités. On est passé de la fascination à la curiosité. Et même avec les nouvelles technologies digitales, à la construction de l'individu ordinaire comme star : voici le règne de l'égo-star, promue par YouTube et les réseaux sociaux."
Extrait texte exposition sur le cinéma et les écrans au Musée San Telmo de San Sebastian"

 "La nuit, je pense à ces choses. Je suis satisfait de ce que je sais, mais à présent je pense beaucoup à tout ce que j'aurais pu savoir, qui aurait été bien plus que tout ce que je peux apprendre maintenant, qui a disparu à jamais maintenant."
Daniel Mendelsohn "Les disparus"

 "Tweet"Gazouillis en anglais.
Peut effectivement servir à véhiculer des noms d'oiseaux, pourvu qu'ils ne dépassent pas 140 caractères.
Personnellement je ne parviens pas à comprendre l'intérêt du "tweet" sauf à parvenir à commettre inévitablement un jour une bourde à l'occasion d'un envoi mal maîtrisé.
Peut-on tourner 7 fois son tweet dans la bouche avant de tweeter ?
C'est à l'évidence ce qu'aurait du faire Mme Tweetweiller...

"Palais de l'Elysée"Architecte : Armand-Claude Mollet en 1720
Premier propriétaire : Louis Henri de la Tour d'Auvergne, comte d'Evreux
Offert à la Marquise de Pompadour par le roi Louis XV en 1753.
Palais princier de Joachim Murat, beau-frère de Napoléon 1er, en 1805

Résidence impériale des deux napoléons

Souvenons-nous que dans la mythologie grecque, les champs Elysées désignaient une région paradisiaque des Enfers, réservée aux hommes vertueux et aux héros !...

" Il y a d'abord Totoche, le dieu de la bêtise, avec son derrière rouge de singe, sa tête d'intellectuel primaire, son amour éperdu des abstractions ; en 1940, il était le chouchou et le doctrinaire des allemands ; aujourd'hui, il se réfugie de plus en plus dans la science pure, et on peut le voir souvent penché sur l'épaule de nos savants ; à chaque explosion nucléaire son ombre se dresse un peu plus haut sur la terre ; sa ruse préférée consiste à donner à la bêtise une forme géniale et à recruter parmi nous nos grands hommes pour assurer notre propre destruction. "
Romain Gary "La promesse de l'aube"

 " Le bon critique est celui qui raconte les aventures de son âme au milieu des chefs d'oeuvre "
Anatole France

" On ne s'exprime pas sans raison. Mais l'expression est une raison en soi. "
Ai Weiwei


" Les vieux messieurs arrachés pour un moment à leurs tables de bridge et à leur rocking-chair applaudissaient de leurs mains parcheminées, leurs faibles voix couvertes par les vivats aigus des cocottes décolletées penchées à leurs côtés, offrant comme dans des corbeilles leurs seins éblouissants, leurs lèvres ouvertes sur les humides grottes roses de leurs bouches aux dents éblouissantes, et jetant des fleurs. "
Claude Simon "L'Acacia"
 
PioupiouDésigne un jeune fantassin. Le mot est dû à Antoine-François Varner dans une comédie publiée en 1838 et intitulée Le Pioupiou. Ce mot a ensuite connu un grand succès dans le sillage de la chanson de Montéhus, Gloire au 17e, composée en souvenir de la mutinerie des soldats du 17e régiment d'infanterie de Narbonne qui avaient refusé de tirer sur les manifestants lors de la révolte des vignerons du Languedoc en 1907. Après 1914, le mot « pioupiou » a subi de nombreuses concurrences, notamment celles de « bidasse » et de « troufion » qui l'ont supplanté dans le langage courant.
Le "pioupiou" peut également désigner le quidam, le type ordinaire, le "pékin" moyen ; vous et moi, donc.
On nous prend pour des "pioupious" pourrait être le cœur de la conscience politique des élections présidentielles...

 Sérendipidité Wikipédia nous dit qu'il s'agit d'un fait consistant à réaliser une découverte inattendue grâce au hasard et à l'intelligence, au cours d'une recherche dirigée initialement vers un objet différent de cette découverte.
Contre-exemple : Claude Guéant qui découvre que les "civilisations ne seraient pas toutes égales" ne fait pas de sérendipidité, mais commet une allégation qui n'est due ni au hasard ni à l'intelligence

" La création, c'est entre la mémoire et l'oubli. "
D"après Borges (relayé par Piano)

DégraderParmi les 29 synonymes que le Dictionnaire de la langue française accessible sur le net proposent, j'ai choisi :
Abâtardir, Avilir, Déchoir, Déshonorer, Destituer, Rabaisser et Ruiner.
Bien sûr la dégradation du "triple A" ! Mais les autres ? Vous y pensez ? Celle du capitaine Dreyfus ? La dégradation des sols ? Celle de notre flore intestinale due au pesticide DDT ? Celle des monuments de la région des Doukkala au Maroc ? Et la dégradation du jaune de chrome des tableaux de Van Gogh ?

" J'écris pour la même raison que je respire, parce que si je ne le faisais pas, je mourrais "
Isaac Asimov

"Un beau soleil doré chauffait doucement les pierres jaunes du cloître. Une femme puisait de l'eau au puits. Dans une heure, une minute, une seconde, maintenant peut-être, tout pouvait crouler. Et pourtant le miracle se poursuivait. Le monde durait, pudique, ironique et discret (comme certaines formes douces et retenues de l'amitié des femmes). Un équilibre se poursuivait, coloré pourtant par toute l'appréhension de sa propre fin. "
Albert CAMUS "Amour de vivre"

"As I grew older, I understood that instructions came with this voice. And the instructions were these... Never to lament casually. And if one is to expresse the great inevitable defeat that awaits us all, it must be done within the strict confines of dignity and beauty. "
Léonard Cohen

"Ce sont de vieux hommes émaciés, tannés, sans dents, souvent sans yeux. (...) On ne sait pas ce qu'a été leur vie, on sait qu'ils finiront à la fosse commune. Ils n'ont plus d'âge, plus de biens à supposer qu'ils en aient jamais eu, c'est à peine s'il leur reste encore un nom. Ils ont largué toutes les amarres. ce sont des loques. ce sont des rois."
Emmanuel Carrère "Limonov" (dernières phrases du livre)

Impétrant
Qui sollicite un titre, une charge, un privilège. Qui obtient de l'autorité compétente ce qu'il a sollicité.

Valise
Diplomatique, sous les yeux, en croco, à roulettes, porteur de, ...

Le concours des décorations florales a cette année pour thème "rigueur et folie".
La folie s'opposant à la rigueur, nous avons travaillé dans l'optique d'être aussi fous que rigoureux !
Une discussion s'est donc installée entre les fleurs et les jardiniers.
Square des Batignolles, aout 2011

Anosognosie

Zut : je ne me souviens plus du tout de sa signification !

"Doxa : ensemble - plus ou moins homogène - d'opinions, de préjugés populaires ou singuliers, de présuppositions généralement admises, sur lesquelles se fonde toute forme de communication, sauf, par principe, celles qui tentent de s'en éloigner telles que les communications scientifiques ; et en particulier le langage mathématiques."

Application : la communication politique se réduit la plupart du temps à une doxa !
"Je pense qu'il n'y a pas de joie plus grande que de faire quelque chose qui est à la fois beau et réellement utile."
Anna Heringer, architecte

"D'une certaine manière j'ai été le poète de ma vie."
Roberto Burle Marx
Architecte paysagiste brésilien mort en 1994

"Porter attention aux détails constitue la plus belle parure du langage. Faire preuve de finesse, toujours. Ne jamais se prendre au sérieux. Réserver un espace à l'ironie, qui distingue entre un homme qui pense et un homme qui se contente d'aligner des mots."
Aharon Appelfeld
(Le garçon qui voulait dormir)

"C'était à Magara, faubourg de Carthage, dans les jardins d'Hamilcar."
Flaubert (Salammbô)

"E.coli entero-hémorragique" : serial tueuse qui se déguise en concombre espagnol pour créer la panique en Europe en ce début juin.

"La science ne fait qu'établir ce qui est, pas ce qui devrait être. En dehors de son domaine, elle aura toujours besoin d'avis de valeur, et divers.
Albert Einstein (en introduction de "Cradle to cradle")

"Sofitel" : chaîne d’hôtellerie de luxe proche du Capitole ! (par allusion à la Roche Tarpéienne)

"Think tank" : ça y est ! J'ai participé à mon premier "Think tank" ; laboratoire d'idées en français. Ca aurait pu être un "brain box" ou une "think factory", non : un "think tank" garantie pur jus ! Vous voulez savoir ce que c'est un "Think tank" ? Simple :
Invitez 50 pékins sur une péniche, un après-midi ensoleillé, sous un prétexte ridicule (par exemple : en quoi le développement durable va-t-il transformer le comportement des agents immobiliers ?) ; vous précisez que ça ne durera pas cinq plombes et qu'il y aura un cocktail à la fin. Voilà, vous avez un "think tank".

"Fleur" :
joli moi de mai où les jardins se déchainent, qui se conjugue avec liberté, exubérance, jeunesse, renouveau, amour, beauté, espoir, paix... partout ?

"On coudoie avec surprise cette foule bigarrée qui semble dater de deux siècles (...) comme si le passé splendide des temps écoulés s'était refermé pour un instant. Suis-je bien le fils d'un pays grave, d'un siècle en habit noir et qui semble porter le deuil de ceux qui l'on précédé."
Gérard de Nerval. Voyage en Orient (1851)

"du coup" :
observez-bien, c'est la nouvelle expression à la mode ; vous me direz, il y a aussi "énorme" et "c'est du dur" ; et ce n'est pas réservé aux jeunes : hier matin à la radio, des journalistes éminents, qui se répondent avec des "du coup" en veux-tu en voilà !
Du coup, du coup, ça me coupe ce que je voulais dire (du coup !).

(...) en architecture, le critique est un spécimen rare. C'st notre "expert" qui fait état des nouvelles réalisations, et, vu que "notre expert" est presque toujours un architecte, ses intérêts personnels l'empêche de développer une critique objective à l'égard de ses collègues."
Robert Byron"(certains jours) on souhaiterait être dispensé de chronique. Avoir le droit, face à l'actualité, d'utiliser un joker. Car à quoi bon ajouter sa pierre et redire l'horreur, la peine, le doute. Commenter le mystère et broder sur la mort, dans notre monde devenu un vaste café du commerce."
Bruno Frappat, journaliste, chroniqueur au journal "La Croix"
Millisievert : 1 seul correspond à la limite annuelle maximale autorisée d'irradiation.
170 millisieverts, c'est la dose reçue par 3 employés de le centrale de Fukushima. 2 sont hospitalisés.
"Tsunami"
Mot d'origine japonaise. Signifie littéralement "vague portuaire" ; pourrait se traduire également par "vague mortuaire". Plus personne n'ignore aujourd'hui ce qu'est un tsunami depuis que les écrans du monde entier ont déversé en continu ces images d'apocalypse où l'on peut voir des maisons, des cargos ou des avions emportés par les torrents boueux chargés de millions de débris. Le tsunami est un phénomène naturel. La catastrophe, amplifiée par les moyens de communication et par le drame nucléaire, nous saisit d'une vertigineuse angoisse : le syndrome de la planète des singes. On se souvient de la scène finale quand Charlton Heston découvre sur une plage les vestige de la statue de la Liberté et qu'il demande à Dieu de maudire les responsables de la destruction du monde jusqu'à la fin des siècles !

"Un monde plus sûr ne peut être qu'un monde qui respecte davantage la nature, et encourage la sobriété plutôt que la satisfaction d'exigences matérielles démesurées."
"Il faut cesser de croire que l'on peut dompter la nature par la technique."
Wolfgang Kromp, physicien autrichien

"Si (...) quelqu'un veut se lancer dans la lecture en étant totalement dépourvu et de passion et de patience - la passion de l'artiste et la patience de l'homme de science -, ce quelqu'un pourra difficilement apprécier la grande littérature."
Vladimir Nabokov

"Dégage"
"Dégage" renvoie à "de l'argent donné en échange de quelque chose, qu'on peut dépenser à sa guise. Si on le dé-gage, il devient libre." nous dit Alain Rey.
Une nouvelle fois le peuple tunisien nous donne une leçon d'intelligence. Leur ex-président recevait (s'octroyait), semble-t-il, des sommes d'argent significatives que, visiblement, il dépensait à sa guise (en oubliant au passage son peuple).
En lui disant "dégage" la rue tunisienne lui a juste dit qu'il était libre ... de ne plus être son dictateur. CQFD

"Homme, quand comprendras-tu que ne pas aboutir fait ta grandeur ?"
Goethe

"Non, vraiment, il n'est pas besoin de magie ni de féerie, il n'est pas besoin d'une âme ni d'un mort pour que je sois à la fois opaque et transparent, visible et invisible, vie et chose : pour que je sois utopie, il suffit que je sois un corps."

"Le corps utopique" Foucault (Michel)

Procrastinateur.
On ne parle plus que de ça ! Nous sommes tous des p..., à des degrés divers.
Que celui qui n'a jamais procrastiné nous jette la première pierre !

"Le soleil brillait, vif et plein. Comme je m'en retournais, je remarquai soudain mon ombre devant moi, comme j'avais vu l'ombre de l'autre guerre derrière la guerre actuelle. Elle ne m'a plus quitté depuis lors, cette ombre de guerre (...). Mais toute ombre, en dernier lieu, est pourtant aussi fille de lumière et seul celui qui a connu la clarté et les ténèbres, la guerre et la paix, la grandeur et la décadence a vraiment vécu."

Dernières lignes de "Le monde d'hier" de Stefan Zweig

Indignation
L'indignation est une posture stérile si elle ne vient pas après l'analyse, et si elle ne se poursuit pas dans l'engagement

" Des roues hydrauliques à la machine à feu, des turbines aux centrales thermiques et à l'industrie du pétrole, le grand révolutionnaire de la société moderne, c'est lui, l'ingénieur, admirable et inquiétant. A travers lui, c'est plus fondamentalement la notion de progrès que le philosophe interroge, le fait que nos sociétés aient tourné la science non plus vers une compréhension de l'homme comme une partie d'un tout, la biosphère, mais vers la satisfaction de leur volonté de puissance."

Extrait article du Monde Mag daté du 1/01/11 à propos du livre "Voyage dans l'anthropocène" de Claude Lorius et Laurent Carpentier

"C'est à son contact que j'ai appris que le véritable bonheur n'est point dans la jouissance, dans l'intensité des désirs, mais au contraire dans cette sereine absence de tout désir, qui voit dans le fait même de la liberté la plus haute des réalisations."

Stephan Zweig "Souvenirs et rencontres"
Rencontre avec Emile Verhaeren

Miracle

Il est très probable que nous nous rapprochions d'une époque où la croyance au miracle représentera la dernière des rationalités possibles.

"Celui qui vient au monde sans vouloir le déranger ne mérite ni égards ni patience "

René Char ? (J'ai attrapé au vol cette citation en écoutant la radio ; une très belle émission sur le livre de Stephane Hessel "Indignez vous !". Je ne suis pas certain de l'exactitude du " sans vouloir le déranger", mais le reste est bon)


"Dans mes écrits je me pose la question suivante : qu'est-ce que le réel ? Parce que sans cesse nous sommes bombardés par des pseudo réalités, produits par des gens très sophistiqués, utilisant des mécaniques électroniques très sophistiqués. Je ne doute pas de leurs motifs. Je me méfie de leur pouvoir. Ils en ont énormément. Et c'est un pouvoir étonnant : celui de créer des univers entiers, des univers de l'esprit. Je devrais le savoir. Je fais pareil. "

Philip K. Dick ("Comment construire un monde qui ne tombe pas en morceaux après deux jours")

"Le grand mal, le seul à vrai dire, ce sont les conventions et les fictions sociales, qui se plaquent sur les réalités naturelles - oui, toutes les fictions, depuis la famille jusqu'à l'argent, depuis la religion jusqu'à l'Etat. (...) L'argent ne vaut pas mieux que l'Etat, et la famille que les religions. "

Fernado Pessoa ("Le banquier anarchiste")

Mystificateur
Personne qui aime à s'amuser des gens en les trompant, les abusant, les dupant, les leurrant, en abusant de leur crédibilité.
Il y a chez le mystificateur une certaine jouissance à tromper. Le mystificateur est forcément un cynique.
"Le mystification propre à l'esprit qui se dit révolutionnaire reprend et aggrave aujourd'hui la mystification bourgeoise." Camus. "L'Homme révolté"
Le nombre des mystificateurs célèbres est (très) élevé. Dans quel secteur d'activités prospèrent-ils le plus : en politique ? dans la finance ? dans le show-biz ? en religion ?
"..., architecture, musique silencieuse."
Goethe
"Nous autres, civilisations, nous savons maintenant que nous sommes mortelles." Paul Valery 1919

"L'architecture est toujours la volonté de l'époque traduite dans l'espace et rien d'autre." Mies Van der Rohe
Et puis une autre parce que c'est pas tous les jours qu'on ressuscite : "Changer le rapport de l'homme à la nature n'est qu'un début ; il est temps de métamorphoser la civilisation pour poétiser la vie." Edgar Morin
C'est pas beau ça ? (allez voir mes voeux)

"Produire des choses ordinaires extraordinaires"
Nicolas Michelin (architecte)

"Il est étrange de ne plus habiter la terre
De ne plus suivre les usages à peine appris
De donner ni aux roses, ni aux choses
Dont chacune était une promesse
La signification de l'avenir humaine..."
Rilke, cité par Aymeric Zubléna (architecte) à l'occasion de son discours d'investiture à l'Académie des Arts et des Lettres

"Inventer la félicité dans la solidarité plutôt que dans l'accumulation frénétique suppose une sérieuse décolonisation de nos imaginaires." (nom de l'auteur oublié)

"Ma tombe au cimetière marin de Bréhat. Mon grand-père y est installé depuis près d'un demi-siècle, baigné épisodiquement par les équinoxes indociles, enviés par les propriétaires importés qui ne rêvent que de caveaux insulaires. Voilà encore une oeuvre architecturale, c'est vrai un peu en déshérance, mais je compte bien y remédier prochainement..."

"Saint Guilhem le désert. Oct 2008. C'est un très beau village à quelques encâblures Nord de Montpellier. Il faut éviter les hordes estivales et déambuler au gré des ruelles ou de places agrémentées de platanes et de fontaines. J'ai pris cette photo aux derniers rayons d'un soleil automnal de fin d'après-midi ; les fantômes avaient dressé leur table sur les murs, les ombres flottaient."

"Venise. Oct 2008. Ceci est le reflet d'une impasse sur un bout de canal silencieux dans un coin du Trastevere où je m'étais assez volontairement égaré un dimanche matin. J'ai toujours été intrigué par les reflets ; ils ont une autre poésie que le réel et, dans le cas particulier des canaux de Venise, j'ai l'impression qu'ils m'indiquent qu'il y a une autre vie derrière."

"L'Arcouest face à Bréhat. Aout 2008. Il s'agit d'un lieu extrêmement important dans ma vie. Sur la photo, ce bout d'embarcadère disparait dans l'eau comme par épuisement. C'est une voie qui devrait nous conduire jusque dans l'île dont on aperçoit les émergences sur une ligne d'horizon proche, et en fait, elle capitule. Il y a un mystère dans ce renoncement de l'oeuvre humaine sur les éléments, et une question qui s'impose : fallait-il vraiment y aller ?"

"La légende associée à cette oeuvre peinte sur les restes du mur de berlin est : "How's God ? She is black". Beautiful non ?"

"C'est un défaut humain que de penser que le groupe auquel on appartient est le meilleur de tous, et que les autres ne valent rien." Yéhudi Ménuhin.

"Mais pour arriver à un début de retour éthique, il y a un ménage doctrinaire à faire et il faudra chasser les vautours au flytox chargé d'absynthe." Rudy Ricciotti dans une tribune sur le thème "Peut-on positiver la crise financière et la récession qui en découle ?.

"Pourquoi prendrai-je soin de la postérité ? Est-ce que la postérité s'est préoccupée de moi ?" Groucho Marx.

"On commence enfin à avoir des ingénieurs qui doutent, donc qui écoutent les questions que leur pose l'époque." Jean-Marie Duthilleul, ingénieur-architecte, dans le cadre d'une conférence sur le thème "Continuer l'histoire" donnée lors des "Entretiens de Chaillot". Il disait juste avant cette phrase : "Le projet n'est pas une formalité dans une procédure, c'est une invention collective. Les interventions des architectes et des ingénieurs doivent être intégrées - et non juxtaposées - dans une même démarche de conception, dans une même vision."

"Une odeur à la fois fauve et miellée, comme une senteur d'oasis diluée dans l'air calciné du désert." Julien Gracq Le rivage des Syrtes p 214. Je cherchais depuis très longtemps (1980 ?) comment qualifier cette odeur trouble, sucrée et légèrement écoeurante qui caractérise certaines heures en Afrique. J'ai trouvé !

"Laissez nous prendre en responsabilité nos vies ! On sait mieux que vous : on est dedans !" Cri de révolte adressé aux architectes-urbanistes par un artiste, le chanteur Jacques Higelin, interviewé sur la question de l'architecture et de la ville (Paris) ; à voir sur le site du Pavillon de l'Arsenal.

"Le pire pour elle était passé : c'était ce licol de bête à l'encan, cette croupe jaillie des linges, rebondie de santé et à l'épanouissement obscène, qui bafouait maintenant le visage comme un rire gras." p 156 "Le rivage des Syrtes". Dans cette scène, on assiste à la flagellation fesse nue d'une "diseuse de mauvaises aventures" que l'espion fourbe Belsenza a fait capturer et veut punir de ses prédications funestes. La fille est jeune, belle et ses traits son nobles. Les policiers autour d'elle sont grossiers et barbares.

"Jamais je ne vais savoir être vieux." Bernanos

"Parce qu'il s'est laissé entraîner par sa propre violence, l'homme d'Occident doit réinventer tout ce qui faisait la beauté et l'harmonie des civilisations qu'il a détruites." JMG Le Clézio

"Ce que je suis, ce que je fais, ce que je ne suis pas capable de faire, c'est comme une terrasse, une terrasse qui donne sur autre chose, c'est cette chose qui est belle." Phrase du poète portugais Fernando Pessoa qu'Alvaro Siza cite dans le livre d'entretiens qui vient de paraître "Une question de mesure", à propos de l'idée d'architecture "conjoncturelle".

"Ils ont échoué parce qu'ils n'ont pas commencé par le rêve". W. Shakespeare

"Sous sa peau diaphane, ses veines comme des vers essouflés s'entrelacent avec les os saillants de sa carcasse". Atiq Rahimi "Syngué Sabour Pierre de patience".

Mes ennemis sont les gens qui choisissent de rester ignorants car ils sont poltrons et ils aiment courir en bandes." Diamonda Galas. Chanteuse américaine d'origine grecque

Une fleur de magnolia dans une attitude de très grande humilité qui semble proposer au passant de gouter à quelques unes de ses étamines. "Mieux vaut être une brebis galeuse dans un troupeau bêlant qu'un mouton bêlant dans un troupeau galeux".

dimanche 21 décembre 2008

Emile Nolde au Grand Palais

Ce serait dommage de rater cette exposition. J'ai découvert une peinture qui m'a vraiment impressionné. Je n'étais pas plus tenté que ça d'y aller, mais comme toute ma famille m'avait abandonné !...
Certains tableaux m'ont fait penser à Kieffer. La mer, celle de son pays d'origine le Danemark, est traitée avec une puissance remarquable : la masse tourmentée de l'eau peinte dans des couleurs sombres enveloppant le bouillonnement de l'écume sous un ciel aux teintes bleues, jaunes, vertes, roses.
Les visages de ces hommes et femmes de Nouvelle-Guinée sont saisissants de vérité ; ils existent devant nous.
La vie berlinoise, une vie artificielle, décadente pour l'homme originaire de la campagne qu'était Nolde, est traitée avec des teintes brutales, sans concession pour les visages et les silhouettes déformés, mécanisés.
J'ai particulièrement aimé le tableau de ces remorqueurs qui crachent leur fumée dans un ciel et une mer prodigieusement jaune !
Parti plusieurs mois en expédition dans les colonies allemandes du Pacifique Sud, Emile Nolde écrit : "Tout l'enthousiasme qu'inspirent aux européens la mission et le progrès industriel ne peut faire oublier le fait qu'ils sont surtout aveugles à ce qu'il y a de plus précieux (...). Les hommes primitifs vivants dans leur nature, ils ne font qu'un avec elle et sont une partie du cosmos tout entier. J'ai pafois le sentiment qu'eux seuls sont encore de véritables hommes et nous quelque chose comme des poupées articulées, déformées, artificielles, et plein de morgue."

Visionnaire, humaniste, philosophe.

Est-ce que je dis une bêtise si je cette peinture m'a fait penser à : Van Gogh, Gaughin, Toulouse-Lautrec, Van Dongen, et jusqu'à Kieffer et Pollock !... Sans doute.
En février, l'exposition va au Musée Fabre de Montpellier pour quelques mois. Nous irons la voir là-bas également.

La question de l'omelette baveuse est une question fondamentale

Pour une vision plus philosophique, quasi-linguistique et de haute volée de la bavosité de l'omelette, se rendre immédiatement après l'amuse-bouche ci-dessous sur le blog de Gérard. Je publie ici mon commentaire qui est bien en retrait sur le plan existentiel, mais, je ne suis qu'un ingénieur !

"Excellent ! Où je decouvre que toi aussi, tu as eu une enfance malheureuse peuplée d'omelettes ultra cuites voire dégageant une légère et infâme odeur de cramé. Il est très vraisemblable que tu n'as pas non plus échappé aux oeufs trop durs submergés d'une béchamelle figée qu'un cuisinier sadique s'employait parfois à teindre en rouge Ketchup. Quand j'ai connu Monique, je n'avais pas de ronds. Pour manger, mes potes et moi, nous avions très souvent recourt à ce produit qui pourrait vous faire croire en Dieu (si celui-ci ne nous laissait pas quotidiennement dans la merde) ; je veux paler de l'oeuf que nous accomodions le plus souvent en omelette ou en soufflé (ah les soufflés !). Comme je me débrouillais pas trop mal en cuisine (la concurrence n'était pas impitoyable) je me suis retrouvé bientôt à élaborer les omelettes et les soufflés (ah les soufflés !), lors de nos soirées. J'ai développé un savoir-faire empirique et barbare reconnu par le cercle de mes amis et qui (je me le demande à présent) participa peut-être d'une manière déterminante dans la conquête de l'héritière sur laquelle j'avais jeté mon dévolu ! Qui sait où vont se loger les mystères de l'amour ?Dans le texte remarquable que tu consents à nous livrer, il y a - il me semble - une absence : le battage des oeufs. La mère Poulard l'avait transformé en attraction touristique. Le battage des oeufs est fondamental - me semble-t-il - pour acquérir cette bave qui doit légèrement ourler des lèvres de l'omelette repliée en deux (bien entendu). L'omelette est l'un des plats les + érotiques que je connaisse. L'omelette elle-même doit présenter une peau légèrement hâlée, perlée de beurre (sans excès). L'omelette baveuse appelle la salade dotée d'une vinaigrette soutenue. Pour moi la reine des omelettes est celle fourrée aux cèps. Des ceps bien fermes que l'on aura pris soin de faire revenir au préalable dans une poele, et que l'on recouvrira du liquide oncteux et mousseux des oeufs battus additionnés d'un peu de lait et d'un peu d'eau (un doigt de crème fraiche constitue un bonus), une pincée de fleur de sel, et si on est en verve quelques poussières de noix de muscade."

La marathonien aux semelles sanglantes

J'emprunte à Gérard cette photo mystérieuse prise un matin d'automne à Hyde Park. Le joggeur inconnu a hanté pendant de longues années les jours et les nuits de mon ami. Par un concours de coïncidences (sans obligation d'achats) j'ai reconnu la foulée de cet individu. J'ai raconté l'histoire à Gérard. Il semble guéri. C'est beau l'amitié.

J'ai bien connu le coureur à pied que le hasard t'as permis de prendre en photo un matin d'automne (le 9 octobre 19.. précisément, jour de mon anniversaire – comme ça tu y penseras !) alors que tu sortais d'un pub anglais du cœur de Londres (comme l’aurait-dit le regretté Serge) où tu avais du accomplir ton devoir d'accompagnateur de quelques clients (cette fois il s’agissait de joyeux drilles quoique un peu sots mais assez fortunés pour mériter des attentions de banquier : deux dentistes, un huissier de justice, trois experts et un agent d’assurance), qui n'avaient eu de cesse depuis le matin où vous foulâtes le sol britannique que de te questionner sur la possibilité d’aller à l’essentiel : les putes dès le premier soir car, après concertation démocratique, l’unanimité des participants s’était déclarée contre la suggestion - que tu avais chuchotée d’un air gourmand dans l’avion lors de ton débriefing - de réserver le premier soir à la visite de la Tate Gallery et les soirs suivants aux putes bien entendu. Tout à ton plaisir de gouter aux délices de la contemplation prochaine des toiles de maîtres, tu ne vis pas l’ombre de la stupeur parcourir en une seconde les visages benêts de tes invités. Ton inclinaison pour la matière artistique avait failli te perdre (les cons menaçant d’en parler à ton supérieur avec lequel ça se passait toujours comme ça : les putes dès le premier soir). Mais, observant que tu avais vraiment à faire à des embourbés du bulbe, ta clairvoyance, ton professionnalisme et ton à-propos légendaires t’ont alors dicté de procéder d’urgence à un rectificatif que tu leur a livré en pâture d’un air faussement complice : « Messieurs, la Tate vous avez compris qu’on s’en branle ; on va aller se « tâter » autre chose, si vous me suivez. Les putes, c’est pour ce soir ! ». Alors là, c’était « bingo » ! Même l’huissier de justice a saisi la blague et c’est lui qui le premier a lancé un « pour Gérard, hip hip hip… ! », repris pendant plus d’un quart d’heure par chacun des sinistres couillons que ton supérieur de l’époque t’avait demandé exceptionnellement de convoyer (il faudra que tu éclaircisses un jour ce mystère), jusqu’à ce qu’une hôtesse passablement accorte, à qui l’un des experts-comptables demanda si elle pouvait se mettre à poil (ce qui déclencha instantanément un ricanement grotesque chez l’autre expert du passif), sécha en 2 secondes la misérable troupe par un lapidaire : « bon les mous du bide et du reste, faudrait voir à la fermer, sinon on va se fâcher ! », appris vraisemblablement lors d’un stage de convoyage des cadres sup du BTP pour les matches du tournoi des 6 nations.
Je me marre, mais te souviens-tu que le thème officiel de ce voyage d’études était : "Des conjectures sur la conjoncture en terme de prospective macro-économique comparée entre le secteur bancaire rural du bas Sussex (là, ça avait également bien plu au dentiste) et la région proche de La Motte-Beuvron » ? Quelle subtile couverture pour cette petite virée entre dépositaires de comptes bancaires joufflus !
Tu étais alors banquier, et quand on est banquier, on n'en reste pas moins homme ; pas vrai ?
Donc ton gars, je l'ai bien connu. Il s'appelait - et s’appelle encore – Charles-Edouard Linguat. Il était postier, marié, père de deux petites filles : Anne-Louise et Marie-Charlotte, âgées respectivement de 6 et 8 ans à l'époque de la photo. Sa femme le trompe bien entendu (pas seulement parce qu'il est postier ou coureur de fond, mais parce que c'est comme ça et qu’il faut bien que le corps exulte – comme aurait dit le vieux Jacques). Elle le trompe avec son patron, un sinistre snob du nom de Grégoire de Clorennec, agent immobilier de son état. Alors que ton objectif (un Leica ……) est en train de saisir Linguat dans une foulée allègre autant que matinale, sa femme - Marie-Elizabeth- est en train de se faire sauter par de Clorennec ; et pire que tout : dans le lit conjugal, sur l’empreinte encore tiède, du corps sportif de ce pauvre cocu de Charles-Edouard ! Mais ce que ne sait pas ce con de Clorennec, c'est que Charles-Edouard ne va pas courir 3 heures comme d'habitude (il se prépare pour le marathon de Londres qui doit avoir lieu dans 10 jours), mais une heure seulement car il a une colique d'enfer due très vraisemblablement au pâté de foie de Marie-Elizabeth qu'il s'est tapé hier soir (le pâté de foie et non Marie-Caroline, évidemment, autrement il y aurait accord du participe passé au féminin et tapé ce serait écrit « tapée » ; cette digression grammaticale pour convenir une fois encore que le diable est bien dans le détail !). J’éviterai de donner la recette du pâté de foie de Marie-Elizabeth dans ces pages car, l’ayant également testé(e) (les deux : je dois avouer que je fus moi-aussi l’amant fugace de Marie-Elizabeth, mais je précise : avant l’agent immobilier ; j’ai une éthique et un honneur !), la colique me ravagea jadis une matinée entière. Donc Charles-Edouard, qui n’en peu plus de se contracter les sphincters anaux tout en s’exerçant à parfaire sa foulée marathonienne (essayez si vous vous croyez plus fort !) va prendre la décision fatale de revenir plus tôt que prévu chez lui, au 14, Clayton Street, à quelques encablures d’Hyde Park. Comme c’est un mari attentionné (je souligne, car on ne parle jamais assez des maris attentionnés dans la littérature contemporaine), il va s’arrêter chez Starbucks, à l’angle de Clayton Street et de Macadam avenue, acheter un sac de muffins aux pépites de chocolat à la jeune serveuse qui a une poitrine euphorique, des lèvres charnues à la limite du vraisemblable, un regard langoureux de vestale crétoise, des boucles blondes qui caressent le galbe rose de ses épaules ligotées par ses bretelles de soutien-gorge comme les paupiettes de mon boucher, et… (je m’égare), alors que s’il avait été un peu plus perspicace, il aurait défoncé la porte de l’armurier qui est à l’angle de Buildmaster road et de Canargy Street, acquis un Smith et Wesson, et troué proprement la tête de son rival, alors que …
En sortant de Starbucks il croise Mrs Butterfly qui, comme chaque matin que notre Seigneur fait, promène ses minuscules Yorkshire (5 en tout !) à la manière de la vieille dame « d’un poisson nommé Wanda ».
« Morning, Mrs Butterfly ».
« Morning, Mr Linguat », lui répond la septuagénaire tout en laissant son regard imperceptiblement s’attarder avec une certaine nostalgie sur la braguette du boxer-short un peu ajusté de Charles-Edouard.
« To be and to have been, that is the problem ! », répliqua Charles-Antoine dans un anglais approximatif quoique primesautié.

Et voilà notre Charles-Edouard, inconditionnel de Philippides, qui arrive au seuil de son domicile adoré. Il saisi sa clé de la main droite, la gauche tenant toujours avec délicatesse le sac de muffins aux pépites de chocolat que la serveuse à la poitrine charnue, aux boucles blondes invraisemblables et langoureuses … (stop : je m’égare). Il pousse délicatement la porte de couleur verte (plus précisément « Old Green England ») de son abri qu’il croit familial et se déchausse sur le tapis brosse sur les poils duquel se détache en lettre gothique et de couleur sombre un « Bienvenue » franc et massif qui ne trompe pas quant à la qualité de l’accueil qui peut être réservé à toute personne de passage (sous réserve de disposer d’une carte de séjour en règle ; c’est quand même la moindre des choses !). Je tiens à noter ici, afin que le lecteur sache que je ne suis pas insensible à un certain degré de précision dans le récit, qu’un écrivain plus soucieux du détail que moi pourrait évoquer le fait que ce tapis brosse, comme tous les tapis brosse du monde d’ailleurs et pour peu qu’on s’y intéressât, abrite dans l’épaisseur de ses poils drus, une incroyable richesse, une profusion d’éléments aussi différents que des milliers de colonies d’acariens grouillant d’activité, des vestiges plus ou moins décomposés de déjections canines, quelques traces d’urine témoignant du passage récent et probable d’un incontinent (serait-ce l’oncle de Marie-Elizabeth ?), des bouts de poils de toute sorte, et bien d’autres échantillons de la vie quotidienne qu’un esprit curieux et littéraire saurait résumer en quelques pages bien senties, fustigeant définitivement l’indigence de la littérature contemporaine qui ne sait plus disserter que sur des thèmes sans doute fondamentaux, mais néanmoins arides, comme : « Et si c’était vrai ? », ou « Serais-tu là ? », ou encore « Je reviens te chercher ».
Bien, revenons pour notre part à notre héros : la caméra de surveillance du hall d’entrée, que Charles-Edouard s’était vu imposer d’installer par un assureur peu rassurant, et dont les images seront visionnées plus d’une cinquantaine de fois par les policiers de la NSY quelques jours après le drame, montrent un Charles-Edouard grimaçant (sans doute ses troubles intestinaux) tenant le sac de muffins de la main gauche, et sa paire de chaussures d’entrainement avec sa main droite. Il n’est visiblement pas tout à fait dans son assiette ; la maîtrise de ses sphincters anaux mobilisent une très grande partie de ses facultés mentales. Il hésite un instant puis prend la décision salutaire pour la moquette d’aller immédiatement aux toilettes. Charles-Edouard disparaît du champ de repérage de la caméra.
Vingt minutes plus tard, il réapparait sur l’écran. Il semble soulagé (la moquette aussi !). Rien en apparence a changé dans son attitude. A peine peut-on distinguer sur son visage un léger rictus sauvage, un voile de haine que les évènements tragiques de la suite peuvent seuls expliquer.
« J’espère qu’il s’est lavé les mains cet enfoiré ! », commenta l’agent Robert B. Crafford de la NSY, en charge de l’enquête en visionnant la bande.
On souhaite effectivement qu’il se soit laver les mains (pour les muffins). On se demande pourquoi il porte toujours une paire de chaussures à la main droite, d’autant qu’il s’agit de ses chaussures de sprint dont la semelle est équipée de 9 pointes en acier inoxydable de 2,5 cm de longueur (diamètre 3 mm pour être précis). Pourquoi des chaussures à pointes et non ses chaussures de jogging ? La réponse à cette question sera apportée bien plus tard, lors de l’enquête menée par l'agent Robert B. Crafford de la NSY, et alors que le perspicace représentant des forces de l’ordre visionnait pour la 47ème fois le film de l’arrivée de Charles-Edouard dans le hall. Il remarqua un détail en bas à droite de l’écran qui avait échappé jusqu’à présent à tous les fins limiers de la NSY ; détail qui devait lever un voile déterminant sur l’affaire (je suis dans de beaux draps !).
Bien, revenons à notre héros : il jette un œil à la cage d’escalier. La caméra capte encore un court instant son regard aux reflets psychopathétiques, et puis l’écran se fige affichant le calme bourgeois d’un intérieur qu’on dirait reconstitué pour les besoins d’une série B.
Il est possible d’imaginer que Charles-Edouard gravit ensuite les marches de l’escalier devant le conduire à la chambre nuptiale. Ouvre-t-il délicatement la porte du nid conjugal, ou bien fait-il une entrée fracassante dans ce qu’il faut bien s’accorder à nommer « l’antre de la débauche » comme le firent dès le lendemain de la révélation du crime, tous les tabloïdes dignes de ce nom ?
Le visionnage de la cassette de ce con de de Clorennec tendrait à privilégier la 2ème hypothèse tant il est vrai que subitement, alors que l’agent immobilier déguisé en coolie cantonnais s’apprête à porter l’estocade dans son exercice de copulation asiatique à une Marie-Elizabeth totalement soumise, la besogne plutôt bien rythmée jusqu’à présent (je veux dire depuis le début du visionnage de la cassette) laisse place à la stupeur et aux tremblements : de Clorennec se retourne saisit d’effroi, hurle un « je vais vous expliquer », puis un « c’est un malentendu ».
Je suis peut-être aller un peu rapidement pour le lecteur attentif. A cet instant du récit, il faut préciser que de Clorennec est un pervers. En effet l’individu ne pouvait chevaucher sa maîtresse sans se faire filmer. Il disposait donc deux caméras sur pied aux 2 angles de la pièce (des esprits chagrins souligneront qu’en théorie une pièce normale à 4 angles ; mais ce sont des esprits chagrins !) qui filmaient l’intégralité du kama-sutra illégitime. C’est ainsi que les agents de la NSY purent avec une facilité déconcertante reconstituer l’intégralité du fait divers qui se déroulait curieusement en automne d’ailleurs. (c’est bon, Gérard ?).
Et qu’est-ce que vit l’agent Robert B. Crafford de la NSY quand il visionna la cassette de l’agent immobilier ? Il vit un Charles-Edouard se précipiter sur son rival et commencer par lui labourer le bas du dos avec ses pointes de sprint. Le roi du bail 3-6-9, imaginant que le mari jaloux s’en tiendrait là, répétait en pleurnichant que c’était un malentendu. Erreur fatale ! Charles-Edouard qui s’était rééquipé de son « Sonotone » à l’occasion de son passage dans les toilettes, ne supportait pas que l’on puisse le taquiner à propos de sa surdité précoce. Les plaintes du bonimenteur de la pierre-refuge ne firent qu’exciter le cocu. Rapidement, il passa du dos, au ventre (qu’il avait assez gras et luisant) pour s’acharner définitivement sur le visage, le cou et le crane. Je ne sais pas si vous avez déjà vu l’effet que fait (mais c’est fou !) une semelle à pointes en acier inoxydable de 2,5 cm de longueur et de 3 mm de diamètre quant elle est plantée d’un geste (très) nerveux dans le faciès livide d’un type à poil déguisé en coolie cantonnais, et que l’initiateur du geste semble vouloir arracher avec ledit instrument (la semelle + les pointes) la totalité du visage du gusse en question. Même si ce dernier l’a mérité ; c’est difficile à supporter, croyez-moi !
Et Marie-Elizabeth dans tout ça ? Evidemment, elle laisse tomber son amant, qu’elle a toujours pris pour un con, et s’emploie à calmer son joggeur de mari. Le film montre que Charles-Edouard, couvert de sang de la tête au pied, interrompt le carnage un instant pour se retourner vers son épouse infidèle (laquelle, bien entendu, le supplie d’arrêter en tentant de lui prodiguer, à l’aide de tous ses organes disponibles, un massage effréné du bas-ventre). Mais le répit est de courte durée, car il lui assène quasi-immédiatement un énorme coup de boule façon Zidane en coupe du monde qui lui éclate la moitié supérieure du visage. Il ratisse ensuite avec sa semelle la partie tuméfiée et le reste encore valide à la manière d’un artiste donnant à son œuvre la touche finale ; celle qui participe du sublime.
Pendant 3 heures, Charles-Edouard, petit postier prenant son pied à petits pas, se métamorphose sous l’œil mécanique des caméras du chantre de la rentabilité assurée, en un monstre froid, achevant progressivement les amants avec juste ses deux semelles et ses crampons.
Charles-Edouard fut condamner à 20 ans de réclusion et libéré au bout de 12 ans pour bonne conduite.
A sa sortie de prison, il se reconvertit dans la fabrication de chaussures à crampons.
Il vit depuis plusieurs années dans le Sussex (et ça fait toujours marrer les dentistes !).
J’ai négligé de vous indiquer que si de Clorennec était déguisé en coolie cantonnais, c’est qu’il tentait précisément sur sa maîtresse une brouette cantonnaise. Il échoua bien entendu au 3ème mouvement (le plus acrobatique) et du se cantonner (!) à la brouette chinoise, plus superficielle et plus accessible il est vrai !Les deux policiers dont on aperçoit la silhouette dans la brume du petit matin sont en réalité des frères siamois d’origine hongroise : les frères Debrencensko. Ils défrayèrent la chronique judiciaire des années 90 car ils se retrouvèrent au coeur des affaires criminelles les plus sordides de l’époque. Le fait qu’ils soient sur la photo ne préjuge en rien d’un quelconque lien avec l’affaire dite du « Marathonien aux semelles sanguinaires » relatée précédemment. Mais on peut nourrir quelques doutes (de toute façon, ça ne coûte pas très cher), car les frères Debrencensko, agents de la NSY et donc a priori au-dessus de tout soupçon, étaient en fait les propres instigateurs des meurtres épouvantables sur lesquels ils enquêtaient (ça me rappelle quelque chose !). Mais c’est une autre histoire !

lundi 15 décembre 2008

Madoff, Zimbabwe, Moscou, Baloutchistan et Albinos

Je reprends le célèbre slogan de Reiser plus pertinent que jamais pour vous proposer cette petite liste des horreurs de notre époque (classée crescendo) :
- Wall Street, NYC : "scandale Madoff" : l'ex patron du Nasdaq a enflé ses clients (heureusement, en majorité des enflures*) de 50 milliards de dollars !
- Zimbabwe : le virus du choléra a infécté plus de 20% de la population du Zimbabwe, pays où les médecins sont payés 5 dollars par mois !
- Moscou : Chamil Oudamanov, c'est le nom de ce daghestanais que sa famille a reconnu sur une vidéo alors qu'il était en train de se faire décapiter par des neonazis russes. Ca c'était en 2007. Dans la nuit du 5 au 6 décembre dernier, c'est la tête d'un immigré tadjik de 20 ans, Azizov, que l'on a retrouvée dans une poubelle !
- Baloutchistan : "l'engin commence par creuser une fosse. puis le conducteur qui est aux manettes joue de la lame dentelée. C'est comme un couteau géant qui broit leur chair, leurs os, leur crâne. puis une salve de coups de feu les fauche. La pelleteuse pousse les corps martyrisés dans la fosse, leur tombeau. Elles saignent abondamment mais (...) elles n'avaient pas encore succombé à leurs blessures quand les tortionnaires ont commencé à les recouvrir de sable et de pierres." Elles étaient 3 femmes qui voulaient vivre chacune avec l'homme qu'elles avaient choisi. Ells s'appelaient Hameeda, Ruqqaya et Rameena.

Qu'est-ce qu'on fout ????????????
Dieu, qu'est-ce que tu fous ??????????
* je rectifie : en fait, il y a dans les "enflés", des écoles, des universités, des fondations, etc. ... qui n'ont rien à voir avec les assoiffés de pognons qui devaient bien savoir que servir 10% de revenu net c'était louche (même moi je le sais !), mais qui s'en foutaient tant que ça "crachait" !

Et puis Gérard me rappelle que j'ai ommis d'évoquer le martyr des albinos pris par certains fanatiques en Afrique comme des victimes expiatoires !

dimanche 14 décembre 2008

La chanson des vieux amants de Jacques Brel

"Finalement, finalement, il nous fallu bien du talent pour être vieux sans être adultes..."

Picasso et ses maîtres au Grand Palais

Une incroyable profusion de chef-d'oeuvre - Rembrandt, Le Gréco, Manet, Vélasquez, Zurbaran, Courbet, Chardin, Ingres, Goya, Cézanne, ... - auxquels Picasso rend hommage par des toiles parfois sages mais jamais dociles, le plus souvent fulgurantes et iconoclastes. La confrontation de "La Pisseuse" et de "Femme se baignant dans la rivière" de Rembrandt, laisse à ses deux toiles leur force respective. Ce n'est qu'à la seconde vision de "La Pisseuse" et après avoir écouté une amie et une collègue me parler de leur passion pour cette toile que j'ai véritablement perçu (reçu) sa force ; enfin du bleu, du noir, du désordre apparent du dessin volontairement maladroit et géométrique se dégageait une véritable émotion. Je m'approchais de la toile de Rembrandt et j'imaginais ce qui pouvait fasciner Picasso : la fulgurance de la touche de peinture du maître hollandais ?
Je suis resté longuement devant "Fernande à la mantille noire", peint entre 1905 et 1906. Cette femme est triste et belle. Le tableau semble pleurer dans ses harmonies de gris (où la peinture coule par endroit comme la pluie sur une vitre sale) d'où n'apparait que deux taches de couleur : un bleu sombre sur la poitrine et des lèvres pâles qui semblent très légèrement rehaussées d'une pointe (à peine) de rouge. Ce tableau m'a fait penser à la Joconde, en tant qu'oeuvre inaccessible.
"Olga", sublime Olga, assise comme une aristocrate dans une large robe aux teintes rouilles et que Picasso (si j'ai bien conpris), désespéré de son échec conjugual, exécuterait mi-pieuvre, mi-démente, dans le "Grand nu au fauteuil rouge", qui témoigne son impuissance dans la camisole de ses membres et de l'espace contraint du tableau devant un miroir vide.

If it be your will

Une interprétation d"If it be your will" de Cohen, par Anthony and the Johnson que je trouve magnifique

La mémoire et la mer

Quand la poésie et la musique se conjuguent dans le sublime